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Les inégalités sociales dans l’acquisition du langage chez les jeunes enfants (la recherche de Bernard Lahire présentée dans The Conversation)

12 avril

Enfance : comment les inégalités de langage se construisent

auteur
Marianne Woollven
Maîtresse de conférences en sociologie, Université Clermont Auvergne (UCA)

Selon les livres qu’on leur lit et la manière dont on pratique l’humour en famille, les enfants apprennent plus ou moins bien à jouer avec les mots. Décryptage de ces inégalités de langage précoces.

Le vocabulaire des jeunes enfants varie en fonction des caractéristiques économiques et culturelles de leurs familles. Dans la mesure où le langage est une ressource socialement valorisée par les institutions, à commencer par l’école et les administrations publiques, ces variations sociales dans la maitrise du langage constituent des inégalités.

Comment expliquer leur reproduction ?

Une enquête sociologique collective sous la direction de Bernard Lahire, menée auprès d’enfants âgés de 5-6 ans issus de différents milieux sociaux et publiée dans l’ouvrage Enfances de classe. De l’inégalité parmi les enfants apporte des éléments de réponse.

L’acquisition du langage est un objet d’étude classique de la psychologie et de la linguistique, ces disciplines ayant contribué notamment à mettre en évidence des normes de développement dans ce domaine. Dans une perspective sociologique, elle est envisagée comme un processus se déroulant au cours de la prime enfance, essentiellement dans le contexte familial, mais les normes que l’on considère sont de nature culturelle.

L’objet de la recherche était d’étudier la socialisation des enfants (c’est-à-dire l’ensemble des processus par lesquels ils acquièrent des façons de faire, de penser et d’être qui sont situées socialement) afin de rendre compte de la construction précoce des inégalités dans différents domaines : le logement, la scolarité, le corps, les loisirs, etc.

Des rapports au langage socialement différenciés
Concernant le langage, l’étude des inégalités dans la petite enfance suppose non seulement d’évaluer la « qualité » linguistique des discours selon des critères comme la richesse du vocabulaire ou le degré de correction grammaticale et syntaxique mais aussi d’envisager le rapport au langage, c’est-à-dire la manière d’utiliser le langage.

Or deux rapports au langage inégalement légitimes s’opposent. Le premier consiste à traiter le langage en lui-même, comme un objet autonome qui peut être manipulé indépendamment du contexte d’énonciation. Ce rapport au langage qualifié de réflexif est fortement valorisé dans l’ensemble des institutions de la société et tout particulièrement dans le cadre scolaire. Le deuxième rapport au langage, qualifié de pragmatique, revient à utiliser le langage de manière pratique, pour faire des choses, dans des contextes spécifiques.

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L’enquête montre qu’à travers tout un ensemble de pratiques familiales quotidiennes les enfants apprennent progressivement à considérer le langage plutôt d’une manière ou de l’autre, selon les groupes sociaux auxquels ils appartiennent. Cela les prépare inégalement à la vie sociale et plus particulièrement aux situations scolaires.

Parmi l’ensemble des pratiques étudiées dans l’enquête, penchons-nous plus particulièrement sur les choix de livres lus aux enfants d’une part et les usages de l’humour d’autre part.

Choix de lectures : des critères utilitaires ou esthétiques [...]

Extrait de theconversation.com du 10.04.24

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