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« L’ancienneté des enseignants en ZEP » parmi les critères d’évaluation par Matignon de l’action du ministre de l’Education nationale

4 janvier 2008

Extrait du « Monde » du 04.01.08 : M. Fillon évalue ses ministres avec des consultants privés

Matignon a mis en place des critères chiffrés de performance

Pour la première fois, les ministres de Nicolas Sarkozy vont recevoir leur bulletin de note trimestriel. Ces prochaines semaines, François Fillon recevra individuellement chaque membre de son équipe pour le leur remettre et le commenter. Alors qu’un remaniement est attendu après les élections municipales de mars, cette première convocation pourrait-elle prendre des allures d’"entretien préalable" à un licenciement ?

Les critères d’évaluation, propres à chacun des quinze ministres ainsi qu’au haut-commissaire aux solidarités, sont au nombre de trente. Sur la "feuille d’évaluation" de Xavier Darcos, le ministre de l’éducation nationale, on trouve le nombre d’heures supplémentaires réalisées par les enseignants et l’ancienneté des enseignants en ZEP. Sa collègue à l’enseignement supérieur, Valérie Pécresse, sera jugée sur le nombre d’universités ayant opté pour la nouvelle gouvernance ou le taux d’abandon en première année de licence. Brice Hortefeux, le ministre de l’immigration et de l’identité nationale, sera jugé à l’aune du nombre d’étrangers en situation irrégulière expulsés et du nombre d’étrangers admis au titre de l’immigration de travail.

Nicolas Sarkozy l’avait promis, le 29 mai, après la composition du premier gouvernement Fillon : les ministres se verront assigner "des objectifs qui permettront d’évaluer leurs résultats". Envoyées durant l’été à chacun des ministres par MM. Fillon et Sarkozy, les lettres de mission détaillaient avec précision la feuille de route de chacun. "L’Elysée nous a demandé d’élaborer, à partir des objectifs définis par ces lettres, un outil de suivi précis pour que les engagements du président soient tenus et pour passer d’une politique d’annonces à une politique de résultats", confie un des architectes politique de ce nouvel outil.

Matignon a confié une mission au cabinet en stratégie Mars & Co pour l’aider dans cet exercice inédit pour un gouvernement. "Tous les objectifs politiques de Sarkozy sont chiffrables", a conclu le cabinet. "C’était très nouveau pour les cabinets ministériels, poursuit ce conseiller ministériel. Surtout que ces indicateurs ne sont pas budgétaires ou administratifs. Ce sont avant tout des critères politiques qui visent au respect des lettres de mission, des engagements et des discours de campagne de Nicolas Sarkozy." Pour mémoire, à l’été 2006, l’UMP avait confié aux consultants du Boston Consulting Group le soin de corédiger son programme législatif.

Ainsi, le slogan du "travailler plus pour gagner plus" s’incarne-t-il derrière l’évaluationde plusieurs ministres : les heures supplémentaires des enseignants pour M. Darcos, et le "compteur à heures sup" que Christine Lagarde, la ministre de l’économie, a été invitée à mettre en place avant juin 2008. La ministre sera aussi jugée sur un nouvel indice des prix dans la grande distribution, pour l’inciter à réformer la loi Galland.

D’une manière générale, les ministres sont invités à faire "du chiffre" : à la culture, Christine Albanel sera jugée sur "l’évolution de la fréquentation des musées lorsqu’ils sont gratuits", "la part de marché des films français en France", ou "l’évolution du piratage des fichiers audio et vidéo". Aux affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui prépare la présidence française de l’Union européenne du deuxième semestre, doit inciter ses collègues à se rendre à Bruxelles : c’est lui qui sera rendu responsable "du nombre de ministres français présents à chacun des conseils de ministres de Bruxelles et Luxembourg".

L’exercice, qui ambitionne d’évaluer rationnellement l’action des ministres et de l’Etat, peut avoir effets pervers. Les associations fustigent depuis longtemps l’objectif chiffré d’expulsions de sans-papiers. Surtout, il a des limites politiques : le remaniement ne reposera pas uniquement sur ce nouvel outil d’évaluation. La contribution à la politique d’ouverture, le score obtenu aux élections municipales pour les ministres candidats, leur cote de popularité et leur poids politique personnel compteront largement autant que les résultats.

Pour autant, les ministres savent que MM. Sarkozy et Fillon ne plaisantent pas : le 8 novembre, le premier ministre a rappelé les règles du jeu dans une communication en conseil des ministres. Nicolas Sarkozy avait été un précurseur : à l’intérieur, il avait mis en place une batterie d’indicateurs (taux d’élucidation des délits, atteintes aux biens, violence aux personnes).Plusieurs ministres se sont vu rappeler avant Noël que leur longévité dépendrait de leur capacité à tenir leur contrat. La ministre du logement, Christine Boutin, s’est inquiétée de ne pas pouvoir remplir ses objectifs de mise en chantier de logements et de financement de logements sociaux.

Matignon se défend de vouloir en faire "une machine à sanction, mais un moyen de mieux coordonner le travail intergouvernemental et d’installer une culture du résultat". L’exercice d’évaluation sera intégré à la revue générale des politiques publiques, qui vise à réformer tous les domaines d’intervention de l’Etat et dont la première salve a été lancée par Nicolas Sarkozy le 12 décembre.

Le président de la République a indiqué, le 8 novembre, qu’il sélectionnerait une vingtaine d’indicateurs, parmi les 450 de ses ministres, pour en faire "de grands indicateurs destinés à rendre compte auprès des Français de l’action engagée pour moderniser en profondeur notre pays". Une citation au tableau d’honneur que chacun des ministres aura à cœur de décrocher.

Christophe Jakubyszyn

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Extrait de Libération.fr du 05.01.08 : Le cabinet Mars & co s’attaque à l’entreprise Fillon

[...] Une collaboration qui refléterait une tendance.« Le secteur public fait de plus en plus appel aux cabinets de conseil privés », note-t-on dans l’une de ces sociétés. Mais cette méthode est une première à l’échelle d’un gouvernement. « Accueil des élèves handicapés » ou « progression de l’assouplissement de la carte scolaire » pour l’Education, « fréquentation des musées quand ils sont gratuits » pour la Culture, « nombre d’étrangers admis au titre de l’immigration de travail » pour l’Immigration, etc. La mission de Mars & Co s’en tenait à la définition de ces critères - une trentaine par ministère - selon les objectifs fixés dans les lettres de mission de l’Elysée. Le cabinet, précise Matignon, n’interviendra pas dans l’évaluation des ministres. Contacté par Libération, les responsables de Mars & Co n’ont pas souhaité répondre, invoquant « une mission de discrétion ». [...]

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10.01.08 - La liste des critères d’évaluation de Xavier Darcos et les limites de la méthode

Extrait de France info du 09.01.08 : Confidentiel : les critères d’évaluation du ministre de l’Education Nationale Xavier Darcos

Comme tous ses homologues du gouvernement, Xavier Darcos, le ministre de l’Education nationale, va être évalué par François Fillon. Sur quoi devra-t-il rendre des comptes ? France Info s’est procuré des extraits de la grille d’évaluation...

Elle comportera une trentaine de critères. Et ce qui est intéressant, ce sont les indicateurs retenus pour mesurer si les objectifs ont été atteints... Puisque les objectifs, on les connaît. Ils sont contenus dans la lettre de mission que Nicolas Sarkozy avait adressée à Xavier Darcos comme à tous les ministres en septembre (et dont la philosophie se trouve aussi dans sa Lettre aux éducateurs).
On peut en rappeler quelques uns : travailler plus pour gagner plus, accueillir les « orphelins de 16 heures », en finir avec la carte scolaire, améliorer l’orientation, donner plus de place au sport, améliorer l’apprentissage des langues vivantes, etc.

Concrètement, quels indicateurs sont retenus ? Deux catégories. La première est assez classique, ce sont des chiffres qui reflètent des réalités quantitatives : pour reprendre les mêmes exemples, pourcentage de collèges accueillant des « orphelins de 16 heures », pourcentage de boursiers demandeurs ayant bénéficié d’une dérogation à la carte scolaire, pourcentage de lycéens bénéficiant d’une information personnalisée sur l’orientation, nombre d’heures supplémentaires effectuées par les enseignants (ça, c’est pour « travailler plus pour gagner plus »)...

La deuxième catégorie touche aux résultats des élèves, et ça c’est une petite révolution. Résultats aux évaluations en CE1 et en CM2 mais aussi résultats de la France dans les classements internationaux du type PISA - ce classement de l’OCDE dont la dernière livraison a été publiée en décembre et où la France a obtenu de moins bons résultats.
Alors évidemment ce type d’indicateur a ses effets pervers et on les connaît : il suffit de baisser les exigences pour les atteindre. C’est tout le débat sur le niveau du bac, par exemple : on est passés de 30 à 65% d’une classe d’âge obtenant le bac entre 1985 et 1995, avec aujourd’hui des taux de réussite qui dépassent 80%... Il y a débat pour savoir si le niveau réel a été préservé ou s’il a été diminué pour atteindre ces chiffres.

Ce système d’évaluation, apparemment très objectif, a donc ses failles... du moins en tant que descripteur du réel. Mais en fait il sert surtout en interne : c’est à partir de ces indicateurs que le ministère mobilise son administration et tente d’entraîner des évolutions sur le terrain.
Au-delà de l’image « on évalue les ministres », assez vendeuse, il n’y a là rien que de très classique : c’est la logique de la Lolf ou de la RGPP (Révision générale des politiques publiques) qui consiste à évaluer l’efficacité de l’action publique. Et c’est évidemment une façon d’essayer de trouver des économies possibles : avec son 1,3 million de personnels, l’Education nationale, principal employeur du pays, est en première ligne quand on veut diminuer le nombre de fonctionnaires.

Emmanuel Davidenkoff

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