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Les enseignants et la reconnaissance professionnelle, dossier d’Education et société, 2022/2, n° 48 (en ligne, payant)

5 septembre 2022

Additif du 20.09.22

Quelle reconnaissance attendent les enseignants ? [Avec une typologie des enseignants]
Aussi bien E Macron que P Ndiaye l’ont dit : la revalorisation des enseignants ne sera pas que matérielle mais aussi morale. Mais est-ce vraiment ce qu’attendent les enseignants quand ils parlent d’être "reconnus" ? Pour en être sur, découvrons un article de Pierre Périer publié dans Education et sociétés (n°2022/2). Interrogeant plus de 2000 professeurs il définit une typologie des attentes en matière de reconnaissance des enseignants au croisement de leur relation avec les élèves et l’institution. Une analyse qui ne saurait faire oublier que la revalorisation salariale reste la base de la reconnaissance institutionnelle, elle même étant le socle du sentiment de reconnaissance.

Le pays où les enseignants se sentent les moins reconnus

" Face à la perte d’attractivité du métier d’enseignant et à son image dégradée, en France plus qu’ailleurs en Europe, la question de la reconnaissance a pris une place désormais centrale dans l’analyse des épreuves et revendications professionnelles. La dévalorisation du statut sinon le déclassement social des enseignants, perceptible au travers du niveau de salaire, alimentent le sentiment d’un décalage croissant entre les conditions d’exercice du métier et les gratifications sociales et symboliques reçues en retour. Dans cette conjoncture, la reconnaissance, telle que vécue par les enseignants, s’énonce le plus souvent dans les termes d’un manque ou d’une absence, proches du mépris. Ce sentiment peut s’interpréter comme la conséquence logique de formes de souffrance au travail ou d’investissements trop peu considérés", écrit Pierre Périer dans Education et sociétés (n°2022/2).

Car s’il y a un pays où les enseignants n’ont pas le sentiment d’être reconnus c’est bien la France. Une enquête de l’Ocde en 2019 et l’enquête Talis de 2013 ont démontré la gravité de la crise. Seulement 7% des enseignants français pensent que leur métier est valorisé contre 18% pour la moyenne européenne. Dans Talis la France était à l’avant dernier rang européen.

Une typologie des enseignants

Pierre Périer y est allé voir de plus près, interrogeant plus de 2200 enseignants dans 6 académies. Si tous soulignent le manque de reconnaissance par l’institution, l’étude de Pierre Périer aboutit à définir des profils d’enseignants ayant des attentes différentes.

Ainsi il définit un groupe "d’enseignants accomplis" , regroupant un enseignant sur cinq, composé de professeurs un peu plus âgés que la moyenne, ayant choisi leur établissement et exprimant un fort sentiment de compétence. Ils se sentent soutenus par leur direction et ressentent un fort sentiment de reconnaissance institutionnelle.

Le groupe des "enseignants critiques" rassemble un gros tiers des professeurs, plutôt en milieu de carrière et au collège. Ils s’épanouissent en classe où ils ont un fort sentiment de réussite et de bonnes relations avec les élèves. Mais ils critiquent le manque de reconnaissance de leur investissement par l’institution.

Les enseignants "contrariés" regroupe un gros quart des professeurs. Ce sont plutôt des professeurs des disciplines scientifiques. Ils veulent transmettre leur savoir mais se plaignent du manque de travail des élèves. Ils ne se sentent pas soutenus par l’institution et ne se sentent pas efficaces.

Enfin il y a les "désenchantés" , 14% des professeurs. Ce sont plutôt des hommes jeunes qui n’ont pas choisi leur établissement. Ils sont très insatisfaits de leurs conditions de travail. Ils se plaignent des élèves et de la gestion de la classe et se sentent peu capables de mener leur mission. Ils pointent la responsabilité du système éducatif et ont un rapport dégradé à l’institution.

Retour à la revalorisation

Ce que veut montrer Pierre Périer va au delà du constat de l’éclatement du corps enseignant. "Les différentes expressions du sentiment de reconnaissance des enseignants du secondaire relèvent non de tel ou tel déterminant, mais de combinaisons de facteurs qui lui donnent forme et produisent une individualisation de ce phénomène social multidéterminé", écrit P Périer. Mais il y a deux sources de reconnaissance. D’abord celle qui vient de la classe où l’on trouve le sentiment de compétence de l’enseignant et la qualité de sa relation avec les élèves. Mais cette reconnaissance là ne suffit pas. " L’autre source du sentiment de reconnaissance des enseignants repose sur le regard et jugement portés par l’institution et ses représentants quant à l’investissement des enseignants dans leur métier et la considération qui leur est accordée en salaire ou carrière (sentiment de reconnaissance institutionnelle)". Reconnaitre les enseignants ce n’est pas seulement "restaurer l’autorité" ou imposer le respect. C’est d’abord le rapport à l’institution. Et cela nous ramène à la revalorisation.

François Jarraud

Extrait de cafepedagogique.net du 20.09.22

 

Les enseignants et la reconnaissance professionnelle
Éducation et sociétés 2022/2 (n° 48)
Pages : 202
Éditeur : De Boeck Supérieur

Dossier : Les enseignants et la reconnaissance professionnelle
Page 5 à 14
Présentation du dossier
Les enseignants et la reconnaissance professionnelle : enjeux, construction, expériences
Pascal Guibert, Régis Malet, Pierre Périer

Page 15 à 40
Analyse de conjoncture
La reconnaissance des enseignants. Cadres d’intelligibilité, débats et controverses dans la recherche anglo-américaine
Régis Malet

Page 41 à 59
Sentiment de reconnaissance et rapport au métier des enseignants du secondaire : approche typologique
Pierre Périer

Page 61 à 79
Lutte pour la reconnaissance et relations d’interdépendance chez les enseignants du second degré
Pascal Guibert, Alice Le Coz, Vincent Troger

Page 81 à 96
Les enseignants face à la gestion axée sur les résultats au Québec : ambivalences morales et dénis de reconnaissance
Christian Maroy, Annelise Voisin, Justine Castonguay-Payant, Michel Samy Diatta

Page 97 à 113
La question de la Reconnaissance comme support de revendications syndicales
Entretien avec André D. Robert, Questions de Pascal Guibert, Pierre Périer
Varia

Page 115 à 147
Apprentissage et intelligences du vivant
André Petitat

Page 149 à 164
Le partenariat entre écoles et acteurs externes : un épisode éducatif interrompt le temps scolaire
Lisa Devos

Page 165 à 184
École inclusive, redéfinition du fait collectif et fonctions de l’accessibilité
Serge Ébersold

Compte rendu
Page 185 à 189
Samia Langar, 2021, Islam et école en France. Une enquête de terrain, Lyon, Presses universitaires de Lyon, Préface de Benoît Falaize, 230 pages

[Extrait de cairn.info

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