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B* Lier artisanat d’art et mathématiques avec la construction d’un vitrail au collège REP Ronsard de Tremblay-en-France (93)

22 janvier

Souder les liens entre élèves et professeurs grâce à un projet de construction de vitrail

Un double objectif : rallier les décrocheurs tout en sensibilisant les élèves à l’art ancestral du vitrail

Le vitrail de l’établissement Ronsard trône en face du foyer des élèves ; pour arriver jusque-là, il en a fallu des heures de travail, de la patience, de l’habileté mais aussi des calculs mathématiques !
Car c’était bien là l’objectif de départ de Madame Nawel Onesti-Nafti, une enseignante de mathématiques chevronnée, qui a dû faire face à une situation d’enseignement assez commune : le décrochage des élèves dans sa discipline. Comment remobiliser ces élèves pour qui les mathématiques n’ont plus aucun sens ? Comment les faire accéder au plaisir que procure la réussite dans une discipline ?

Madame Onesti-Nafti a alors trouvé une piste : les mettre de façon concrète au travail, les faire "manipuler" au sens propre comme au sens figuré, les mathématiques. Le vitrail a été pour elle , tout de suite, une évidence : "J’ai choisi de mettre en place le projet vitrail avec mes élèves pour plusieurs raisons profondes et personnelles. Tout d’abord, ma passion pour l’art et les métiers artisanaux a toujours été un moteur dans ma carrière d’enseignant. Parmi ces métiers, le travail du vitrail a toujours occupé une place particulière dans mon cœur. C’est un artisanat à la fois ancien et riche en histoire, qui allie la créativité artistique à la maîtrise technique. ». L’enseignante précise aussi que ce projet s’inscrit aussi dans le projet de son établissement : Collège image, où l’art de l’image est un point commun de plusieurs projets à Ronsard.

Cependant, au-delà de sa propre passion, elle explique avoir été « profondément touchée » par la tragédie de l’incendie de Notre-Dame de Paris. Cet événement l’a ainsi poussée à réfléchir, non seulement sur le patrimoine culturel qui était en danger, mais aussi sur la pérennité de métiers artisanaux qui sont en voie de disparition.

Face à cette prise de conscience, elle a « ressenti le besoin de partager ces réflexions » avec ses élèves. Il lui a semblé « crucial » de les sensibiliser à l’importance des métiers d’autrefois, souvent méconnus mais porteurs d’une richesse culturelle inestimable. En les initiant au projet vitrail, elle a souhaité « ouvrir leurs yeux » sur des compétences artisanales qui ont façonné notre histoire et qui méritent d’être préservées pour les générations futures. En encourageant ses élèves à s’immerger dans l’art du vitrail, elle a également souhaité stimuler leur créativité, développer leur sens artistique et les sensibiliser à la valeur du patrimoine culturel. Ce projet représentait ainsi bien plus qu’une simple activité scolaire ; c’était une opportunité d’éducation artistique et culturelle qui transcende les limites de la salle de classe.

Une réalisation minutieuse qui conjugue les mathématiques à la création artistique

Cependant, la construction d’un vitrail est un processus complexe qui implique plusieurs étapes méticuleuses, allant de la conception initiale à l’installation finale. Avant de commencer la construction physique, une conception détaillée est nécessaire.
Les élèves ont fait le choix de créer un dessin qui représente l’architecture du collège. Ils se sont munis d’outils de mesures pour mesurer des structures accessibles du bâtiment. Ils ont ensuite travaillé sur le plan du collège en utilisant la proportionnalité et l’échelle. Chaque élève ou groupe d’élèves a pu produire une structure qui correspondait à l’espace et aux grandeurs du vitrail. Tout au long de ce processus de conception, des calculs mathématiques ont été utilisés afin de garantir non seulement des proportions correctes mais également une intégration harmonieuse avec l’environnement.
Afin de rendre un travail commun, une forme pour chaque dessin a été sélectionnée afin de fabriquer un puzzle ; l’ensemble du puzzle final représentant ainsi le vitrail collectif. Une fois la solution finale validée par l’ensemble des élèves, un grand papier calque a permis de déterminer la disposition des pièces de verre, en précisant les couleurs et les motifs respectifs.
Les élèves ont eu la chance d’être initiés et accompagnés par madame Suzie Molina qui exerce le métier de maître-verrier, qu’on appelle aussi le métier de « vitrailliste ». Cette artiste a une vision contemporaine du vitrail : elle réalise des sculptures, des objets d’art et des objets décoratifs comprenant des inclusions végétales et minérales. Cette approche moderne lui a sans doute permis de rendre cet art encore plus accessible aux élèves. Elle a également permis à ces derniers de participer au choix, capital, des matériaux. Outre le verre, d’autres éléments tels que le plomb, le cuivre ou le zinc ont été utilisés pour maintenir les pièces de verre ensemble. La qualité du verre, sa couleur, sa texture ainsi que son épaisseur ont été des critères à considérer de façon appropriée. Les caractéristiques techniques et physiques de chaque matériau étaient expliquées et présentées aux élèves afin de faire un choix judicieux.
Une fois la conception finalisée, un modèle grandeur nature a été créé. Ce modèle sert de guide pour la coupe du verre et la construction ultérieure. Il était réalisé sur du papier calque, et chaque morceau de verre était numéroté et marqué selon le modèle. Puis est venu le moment de la découpe ; afin d’éviter des erreurs « coûteuses » en matériau, les élèves s’entraînaient sur du verre blanc avant de découper leur partie dans du verre coloré ; ils ont dû évaluer les prix de la réalisation de leur ouvrage, manipulant de nouveau des calculs mathématiques. Le travail de découpe impliquait des gestes précis, où ils devaient être attentifs au positionnement perpendiculaire du corps pendant la découpe. Ce travail minutieux a été suivi par un travail sur les soudures ; les morceaux de verre ont été ensuite assemblés en utilisant des profils de cuivre qui maintenaient chaque pièce de verre en place et créaient la structure globale du vitrail. La soudure a été utilisée pour fixer les intersections des profils, assurant ainsi la stabilité de l’ensemble. Au cours de cette étape, les élèves ont travaillé autour de la notion de périmètre tout en calculant pour optimiser la longueur finale du fil de cuivre nécessaire à la soudure. Une fois toutes les pièces de verre assemblées, le vitrail a été soumis à un processus de soudure. La soudure comble les espaces entre les profils de cuivre, renforçant ainsi la structure. La finition implique souvent le polissage de la soudure et le nettoyage du vitrail pour assurer une apparence propre et soignée.

Un retour très positif du côté des élèves

Comme le rapporte Frédéric Lombard dans son article sur la page du site de la ville de Tremblay-en-France, les élèves ont été enthousiasmés par ce projet : " J’ai adoré dessiner, découper, et j’ai fait des maths sans m’en rendre compte ! ", affirme l’un des élèves de la classe. Maria, une des élèves à l’aise dans la discipline, y a également trouvé du plaisir : " J’ai découvert la beauté des vitraux, et qu’il fallait être précis ", témoigne-t-elle. L’ensemble des élèves, quelque soit leur niveau dans la discipline, ont pu s’impliquer et profiter de ce projet.

Un projet fructueux à tous points de vue

L’exemple de cette expérience pédagogique riche de sens pour les élèves, comme pour la professeure, prouve une fois de plus que les projets peuvent être des leviers intéressants à activer lorsque le décrochage guette certains élèves. Le temps et l’énergie consacrés à monter ce type de dispositif dans nos réseaux d’éducation prioritaires peuvent paraître colossaux mais ils ne sont jamais vains car ils finissent par créer des liens indéfectibles entre les élèves et le professeur.

Extrait de carep.ac-creteil.fr du 18.01.24

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