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Mixité sociale : A Nantes, trois collèges qui ferment, un qui ouvre, une nouvelle répartition des élèves (entretien de ToutEduc avec le département)

30 avril

Mixité sociale : A Nantes, trois collèges qui ferment, un qui ouvre, une nouvelle répartition des élèves

La question de la mixité sociale est posée à nouveaux frais par les polémiques qui ont suivi l’annonce du Choc des savoirs. Elle l’est aussi à Nantes où le Département prépare pour la rentrée "un bouleversement" de la carte scolaire. Vincent Danis, vice-président en charge de l’Education en Loire-atlantique répond à nos questions.

ToutEduc : Comment avez-vous été amené à ce grand chamboule-tout : trois collèges qui ferment, un collège qui ouvre, deux autres collèges concernés par les mouvements d’élèves, sans compter les écoles qui en dépendent...

Vincent Danis : Nous n’avions pas, au départ, un projet aussi important. En 2018, le Département a mis en place un "Observatoire" de la mixité sociale, le problème était manifeste dans l’ouest de l’agglomération de Nantes : entre deux collèges, Rosa Parks [REP+] et Gaston Serpette, distants de quelques centaines de mètres, l’écart des IPS moyens était de 60 points, au détriment de Rosa Parks, victime d’un phénomène d’évitement et qui ne compte que 320 élèves quand son voisin en compte 700.

Quand je suis élu en 2021, nous pensons organiser une "montée alternée" entre les deux établissements, les 6ème-5ème dans l’un, les 4ème-3ème dans l’autre. Mais Rosa Parks n’avait pas de cantine, les élèves vont déjeuner dans le lycée voisin, la plupart d’ailleurs préfèrent rentrer chez eux. Nous ne pouvions imposer ce régime aux familles de Gaston Serpette où il y avait une cantine dédiée. Nous avons donc décidé de construire une salle de restaurant scolaire attenante au bâtiment de Rosa Parks. Nous ignorions alors qu’une canalisation rendait ce bout de terrain inconstructible. Par ailleurs la Région a cédé au Département un lycée désaffecté qui, moyennant des travaux, va permettre de créer un nouveau collège, un bâtiment "basse consommation" qui doit accueillir 750 élèves et dont il était déjà prévu qu’il reçoive ceux de Jules Verne et Gabriel Guist’Hau. Il fallait en profiter pour repenser la carte scolaire dans tout le secteur, fermer Rosa Parks et redistribuer ses élèves en même temps que ceux de Gust’Hau et de Jules Verne...

ToutEduc : Fermer un collège oblige à répondre aux inquiétudes des familles, mais aussi des personnels.

Vincent Danis : Effectivement, d’autant que les enseignants de Rosa Parks n’avaient absolument pas vu venir le coup, et qu’ils allaient perdre les bénéfices de l’inscription en éducation prioritaire. Nous avons été assez mal reçus dans la salle des profs, d’autant que ni le recteur, ni le DASEN n’étaient là, ils ne sont venus que le lendemain et ont parlé d’une "décision unilatérale" de notre part. Nos courriers aux ministres qui se sont succédé rue de Grenelle sont restés sans réponse, nous n’avions donc pas le soutien de l’Education nationale, même si l’académie s’était engagée à mettre des moyens pour limiter le nombre d’élèves par classe et à assurer la continuité des options.

Pour rassurer les familles des enfants qui pensaient faire leur rentrée en 6ème à Rosa Parks, nous aurions voulu aller dans les écoles primaires où ils sont scolarisés, mais qui nous sont restées fermées. Nous avons organisé des petits déjeuners dehors, devant l’école, nous leur avons garanti que la tarification des repas à la cantine serait solidaire, de un euro à 5,30, les enfants ont visité leur futur collège qui n’a pas encore de nom, il faudra qu’ils lui en trouvent un, ils ont pu exprimer leurs craintes via la radio du CVC (le Conseil de la vie collégienne inter collèges)....

ToutEduc : Rosa Parks n’est pas le seul collège qui ferme...

Vincent Danis : Non. Avec l’ouverture du nouveau collège, nous avons redessiné la carte scolaire en tenant compte des transports en commun, avec le tram, aucun élève n’aura plus de 20 minutes de transport. Une partie des élèves de Rosa Parks y sera accueillie, d’autres rejoindront Victor Hugo et Gaston Serpette.

ToutEduc : N’avez-vous pas peur d’une fuite des élèves "favorisés" vers le privé, qui est très fort à Nantes puisqu’il scolarise 50 % des élèves et que, comme le public, il est touché par la baisse démographique et dispose donc de places vacantes.

Vincent Danis : Cela fait partie des prédictions qui nous ont été adressées. Mais n’est-ce pas aussi un épouvantail pour nous empêcher de faire quoi que ce soit ? Nous aurons un premier élément de réponse à la rentrée. Le Département et la Ville financeront un comité scientifique, des chercheurs de l’Université de Nantes vont suivre sur quatre ans l’évolution des élèves, du point de vue de leur scolarité, mais aussi sous un angle plus personnel, leurs relations sociales, les amitiés qui se nouent... Et l’Observatoire qui fait un point tous les deux ans sur la situation nous permettra de mesurer les gains en termes de mixité sociale, ce qui est l’objectif premier. Je suis confiant. Pour Jules Verne et Guist’Hau, leur fermeture était programmée de longue date, les personnels y étaient préparés, tout comme les familles. Pour Rosa Parks, l’annonce a été brutale. Je m’interroge. Etait-ce une bonne chose ? Pour les parents ? Pour les enseignants ? Qu’aurait donné une longue concertation ? Autant de questions qui resteront sans réponses...

Propos recueillis par P Bouchard, relus par V. Danis

Extrait de touteduc.fr du 25.04.24

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