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La mission Exigence des savoirs (MEN) devant les députés : budget, groupes de niveau, redoublement, manuels... (Le Café, TouEduc)

21 décembre 2023

Exigence des savoirs : Tous les programmes seront revus

Les critiques sur la sincérité budgétaire du ministère portent. A l’occasion d’une présentation de la mission “exigence des savoirs” le 20 décembre devant la commission de l’éducation de l’Assemblée, le ministère annonce la publication d’un nouveau “schéma d’emploi” des enseignants aujourd’hui. Cela alors que la loi de finances est encore en débat. Le ministère annonce que les programmes de toutes les disciplines seront revus. Ils seront liés à des évaluations très régulières fournies par le ministère et seront suffisamment précis pour encadrer les pratiques pédagogiques des enseignants. Avec la confirmation de la labellisation des manuels scolaires du primaire, le métier enseignant entre dans une nouvelle étape. Pour le ministère, elle doit rendre l’enseignement plus efficace. Les Républicains applaudissent les réformes Attal. Le Rassemblement national en revendique la paternité. La gauche dénonce une opération de communication.

Annonces budgétaires aujourd’hui

“En faisant ce travail (la rédaction des mesures du “choc des savoirs”), n’avez vous pas l’impression de brasser de l’air et de participer à une opération de communication ?” La question de Francesca Pasquini, députée écologiste, a fait mouche, le 20 décembre. Devant la commission de l’éducation de l’Assemblée, Edouard Geffray, Dgesco, Caroline Pascal, cheffe des inspecteurs généraux, Stanislas Dehaene, président du conseil scientifique de l’éducation nationale et Gilles Halbout, recteur d’Orléans-Tours, présentaient les décisions de la “mission exigence des savoirs”. Cherchez l’absent. Mark Sherringham, président du conseil supérieur des programmes, dont il va longuement être question, est absent, alors même que le CSP comprend des parlementaires… C’est Caroline Pascal qui parle des programmes.

Alors que nous évoquons depuis novembre l’écart entre les promesses de G. Attal et les contraintes budgétaires et que le Snpden Unsa prédit un décalage de 19 000 postes, Edouard Geffray annonce une mise au point. “Je ne partage pas l’évaluation budgétaire faite par une organisation“, dit-il (allusion au snpden unsa). ” Des moyens seront associés à cette mesure. Il y aura un nouveau schéma d’emploi“, dit-il. Il sera présenté ce 21 décembre dans le cadre du CSA. Le ministère reviendrait donc sur les recrutements enseignants alors que la loi de finances 2024 n’est pas encore adoptée et que la loi de programmation budgétaire, qui encadre nettement le budget de l’Education nationale jusqu’en 2027, vient tout juste de l’être.

Classes de niveau, groupes de niveau ou groupes de besoin ?
Edouard Geffray écarte la première hypothèse. “Il ne s’agit pas de faire des classes de niveau car on sait que cela ne marche pas“, dit-l. “En français et en maths on aura des groupes de niveau pour permettre à chacun d’apprendre… Ces groupes seront révisables par période“. Pour le ministère, qui cite l’exemple du Portugal, “il ne s’agit pas de faire en sorte que les élèves en difficulté apprennent moins“. C’est pourtant vers cela que pousse toute l’histoire d’un système éducatif marqué par les plus importantes inégalités sociales de réussite scolaire. Il faudra donc suivre de près les conditions précises de la mise en place de ces groupes. Ce qui renvoie à la question des postes promis par le ministre. Comme le Snpden Unsa, nous avons chiffré le besoin à environ 19 000 enseignants en français et maths. Le budget 2024 prévoit de recruter moins d’enseignants en lettres que les années antérieures et pas plus en maths. Pourtant on voit mal comment le ministère pourrait trouver cet important nombre d’enseignants sans commencer le recrutement dès 2024. Mais peut-être pense t-il utiliser d’autres personnels que les professeurs du 2d degré ?

Le ministère divisé sur les redoublements

Les députés interrogent aussi le ministère sur les redoublements. E Geffray préfère parler de “personnalisation des parcours“. Il ne recule pas devant les truismes. “Il vaut mieux réussir en 6 ans qu’être en difficulté“, assure-t-il. Cela est affirmé en même temps que l’annonce de la transformation du brevet en examen d’entrée au lycée et du caractère très prédictif de la difficulté scolaire en CP pour l’échec au brevet. Stanislas Dehaène, président du conseil scientifique, maintient son opposition à cette mesure. “Le conseil scientifique est assez opposé aux redoublements sur la base de résultats scientifiques“, dit-il. “On peut voir des conséquences pas forcément positives“. Là aussi le recours massif aux redoublements aurait un impact budgétaire évalué à environ 30 000 postes.

Tous les programmes seront revus

Le quatrième point fort de la commission porte sur la révision des programmes. “Notre objectif c’est parvenir à mieux savoir ce qu’on enseigne pour mieux enseigner“, dit C. Pascal. Avec S Dehaene, elle décrit des programmes qui vont encadrer très précisément le travail des enseignants. “Les nouveaux programmes vont conduire à réintroduire des repères annuels à l’école et au collège“, dit C. Pascal. “On note précisément quelles sont les priorités des acquis des élèves à l’issue de l’année“. Les programmes de français , maths et langues ne seront pas les seuls à être revus comme cela a été annoncé par G Attal. “Il y aura des repère annuels dans toutes les disciplines“, précise C Pascal. “C’est l’ensemble des programmes qui sera revu“. “Les programmes préciseront à une échelle plus fine ce qui doit être fait et des évaluations nationales permettront à tout moment de savoir ce que savent les élèves“, ajoute S. Dehaene.

Labellisation des manuels et des pratiques pédagogiques

Pour S Dehaene cet encadrement est renforcé par la labellisation des manuels. “En primaire un tiers des enseignants n’ont pas de manuels“, explique-t-il. “Cela peut être une décision de l’enseignant mais des enquêtes montrent que cela conduit à l’utilisation de méthodes qui ne sont pas les plus efficaces. Il s’agit d’apporter une aide en attirant l’attention sur le fait qu’il y a des manuels qui respectent mieux les données scientifiques“. S Dehaene donne en exemple l’apprentissage de la lecture. C’est pourtant un domaine où les travaux de R Goigoux ont montré que le manuel importe peu.

Avec les nouveaux programmes et les manuels labellisés, le Conseil supérieur entend imposer ses méthodes pédagogiques aux enseignants. “Les méthodes pédagogiques sont un paramètre clé pour réduire les inégalités sociales”, dit-il. Et cela facilitera la formation des enseignants : “elle deviendra plus facile. Quand on s’accorde sur les manuels et les méthodes qui fonctionnent on saura alors à quoi former“. C’est toute une définition du métier enseignant…

Il est aussi question des “prépa-lycées“, que Caroline Pascal appelle des “prépa – secondes“. L’année sera divisée en semestres, et non en trimestres, avec un premier semestres visant à “corriger l’acquisition des fondamentaux” et un second avec la découverte des métiers, la visite de plateaux techniques. Ces classes de prépa lycées semblent surtout destinées à préparer les élèves à l’apprentissage. En éliminant une partie des élèves faibles de l’enseignement scolaire elles permettront aussi de redresser le niveau dans Pisa…

La grande alliance de la droite et les macronistes

L’accueil du “choc des savoirs” par les députés reflète la nouvelle majorité politique en formation. Laurent Croizier, député Modem et ancien professeur des écoles, fustige “le pédagogisme” qui a “brisé l’ascenseur social“. Fabrice Le Vigoureux, Renaissance, souligne que le ministre retient les recommandations sur la lecture d’Annie Genevard, députée Les Républicains. Celle-ci se réjouit que “beaucoup de mesures donnent raison aux propositions des Républicains“. Quand à R. Chudeau, Rassemblement national, il rappelle que la fin du collège unique et la transformation du brevet en examen d’entrée au lycée sont tirés du programme de son parti.

Seule la gauche critique le “choc des savoirs”. Francesca Pasquini, écologiste, parle de mesures hypocrites et se demande si tout cela n’est pas que de la communication. Jérome Legavre (LFI) rappelle que les postes nécessaires ne sont pas budgétés et que “tous les élèves n’auront pas la même instruction” au collège. Enfin, Fatiha Keloua Hachi rappelle que “les mesures vont à rebours des faits établis par la recherche” comme l’a montré le Cnesco. “Les groupes de niveau ne permettent pas d’améliorer le niveau des élèves“, dit-elle. “Aucune des mesures annoncées ne s’attaque à la problématique de fond des inégalités sociales“. Car c’est quand même cela l’enseignement, maintes fois répété de Pisa…

François Jarraud

Gabriel Attal rattrapé par son budget

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Les annonces Exigences des savoirs

Choc des savoirs : voleurs d’espoirs

Pour la liberté du choix des méthodes d’apprentissage de la lecture

Extrait de cafepedagogique.net du 21.12.23

 

A l’assemblée nationale, les principaux responsables de la mission “Exigence des savoirs“ sur une ligne de crête

“On ne va pas imposer NEO à tous les écoliers de France ou de Navarre“ déclare le recteur de l’académie d’Orléans-Tours lors de l’audition des responsables de la mission “Exigence des savoirs“ par la Commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale mercredi 20 décembre.

Le manuel de lecture a pourtant été évoqué a plusieurs reprises par Gabriel Attal, notamment dans son discours du 5 décembre énumérant les propositions retenues dans son programme “choc des savoirs“ destiné à relever le niveau des élèves français (voir ToutEduc ici).

La question des manuels a ainsi été l’un des sujets centraux cette audition, pour laquelle Gilles Halbout a évoqué deux initiatives prises lors de son passage à Mayotte et désormais étendues à tout le pays, une volonté d’équiper des classes trop peu dotées et une efficacité flash sur les résultats des élèves : en 2 ans l’île serait passée d’une moitié des élèves arrivant à lire en CE1, à maintenant deux tiers.

Ce besoin d’ “efficacité“ a d’ailleurs été plusieurs fois cité par Stanislas Dehaene, président du conseil scientifique de l’éducation nationale (CSEN), qui a pourtant semblé prendre ses distances avec plusieurs des choix opérés par le politique : “le manuel est trop récent pour qu’on ait du recul du point de vue statistique“, a-t-il estimé, mettant même en exergue par ailleurs la liberté pédagogique des enseignants, tout en les enjoignant à suivre les données de la recherche scientifique et donc d’utiliser les méthodes qui sont à recommander. D’où l’idée de labelliser les manuels, d’autant qu’une enquête montrerait une corrélation entre l’utilisation de certains manuels et la réussite des élèves, le tout faisant partie d’un “écosystème“ entre programmes “qui vont préciser avec une échelle plus fine que celle de l’année ce qui doit être fait“, et basé sur les évaluations nationales et "des petits tests pour vérifier ce que font les élèves“.

En revanche, il a estimé que le mission n’avait eu que trop peu de temps pour réaliser son expertise, que le redoublement fait grandement débat au sein du CSEN, dont une partie des membres serait “assez opposée“ du fait que “les conséquences pour les élèves qui le subissent ne sont pas forcément positives du tout“. Il a également souligné l’importance de la répartition du temps scolaire, non abordée par la mission, considérant “que les maires qui continuent d’ouvrir l’école contre vents et marées sur 5 jours doivent être soutenus“.

Le questionnaire adressé aux enseignants pour les sonder sur un certain nombre de mesures, n’est “pas biaisé“ selon les mots d’Édouard Geffray, directeur général de l’enseignement scolaire, il montrerait ainsi qu’un “très grand nombre de professeurs pensent la même chose“ sur plusieurs sujets (mais pas sur d’autres), de quoi en faire “une base parmi d’autres“. Surtout, les mesures qui sont proposées “par nature se discutent“, se défend-il, et “aucun de ces leviers n’a vocation à être mécanique et définitif“ précise-t-il. Par exemple, le redoublement vise “par cercles concentriques à rendre possible la personnalisation des parcours“, il s’agit de “lisser son parcours“ c’est à dire d’assurer pour les élèves “une progressivité des apprentissages beaucoup plus forte qu’aujourd’hui“. De même pour les groupes de niveau (qui selon Stanislas Dehaene auraient mieux fait d’être nommés “groupes de besoin“), il ne s’agit pas que les élèves en difficulté apprennent moins, mais d’un “changement des conditions d’apprentissage“, à savoir de “mieux apprendre la même chose“.

Pour y arriver, il convient donc de réviser les programmes, ce qu’a évoqué la cheffe de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR). Les programmes doivent être “écrits non plus par rapport à ce que les professeurs doivent faire mais ce que les élèves doivent savoir“, plaide Caroline Pascal, qui souhaite renverser la logique et la philosophie d’écriture consistant à “se faire plaisir avec tout ce que les professeurs aimeraient enseigner“. Ceux-ci devront être rédigés très rapidement mais “c’est presque un point positif“, veut-elle croire, promettant alors simplicité, clareté et efficacité.

Elle fait d’ailleurs valoir qu’à force de réécriture depuis 2008, l’absence de priorité devenait plus en plus nette, des éléments étaient sans cesse ajoutés, tandis qu’aujourd’hui le but serait de clarifier et de rendre les programmes moins lourds, en réintroduisant des repères annuels en école et collège avec une “clause de revoyure“ des notions en fin de cycles.

Cette modification bénéficiera à la formation des enseignants qui l’objet d’ “énormes besoins dans le pays“, pour Stanilas Dehaene qui considère a titre personnel “qu’elle deviendra de plus en plus facile à mesure qu’on s’accordera sur des programmes bien ciblés, raccourcis en s’appuyant sur manuels et méthodes qui fonctionnent, ainsi on saura mieux à quoi former“.

“Il faut faire attention à la personne de chaque élève“. A noter le souhait porté par Stanislas Dehaene concernant les élèves porteurs de handicap pour qui “il est souvent recommandé de redoubler alors qu’intellectuellement ils pourraient passer en disposant de dispositifs adaptés“. Quant aux enfants avec dyspraxie qui sont assez nombreux, “ils risquent d’être bloqués dans leur scolarité si on insiste sur le stylo en français“, c’est pourquoi il demande d’être plus “flexible dans ce domaine“ (notamment en permettant l’utilisation de claviers numériques lorsque cela est possible).

La vidéo ici

Extrait de touteduc.fr du 20.12.23

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