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Le point de vue de Christian Forestier, ancien recteur, sur la carte scolaire

septembre 2006

Extrait de « Libération » du 06.09.06 : « On ne peut tout de même pas tout casser »

Christian Forestier du Haut Conseil de l’éducation Ancien recteur des académies de Créteil et de Versailles, aujourd’hui membre du Haut Conseil de l’éducation, Christian Forestier explique en quoi l’abandon de la carte scolaire réduirait à néant les efforts de mixité sociale.

Comment répondre aux parents qui contournent la carte scolaire pour fuir des établissements réputés difficiles ?

D’abord, on l’oublie trop, la question ne se pose pas dans les petites villes et les zones rurales. Elle n’interpelle que les gens vivant dans les grandes agglomérations, avec des périphéries cumulant les problèmes. En 1983, Alain Savary, alors ministre de l’Education nationale, avait fait une expérimentation : les habitants du département de la Côte-d’Or avaient eu le choix du collège pour leurs enfants entrant en 6e. J’étais recteur à Dijon. J’ai eu un peu plus de 10 % de demandes de dérogation, surtout dans les zones urbaines et en périphérie. Le débat, très virulent, concerne la région parisienne, Lyon, Marseille... Mais, vu de Clermont-Ferrand ou de Romorantin, il paraît bien exotique.

On peut estimer à un peu plus de 10 % les collèges avec de grosses difficultés, la moitié en région parisienne, l’autre moitié dans les grandes villes. Ces établissements doivent nous amener à réfléchir. Mais leur existence ne justifie pas une remise en cause du principe de la sectorisation. Le système ne ferait alors que se rigidifier : s’il y a libre choix, on déboucherait sur l’apparition d’une carte scolaire encore plus segmentée. Il n’y aurait aucune chance pour que l’on aille vers plus de mixité. Je n’arrive pas à comprendre comment on peut faire le lien. Par contre, je vois bien les avantages que les initiés peuvent en tirer. Ils savent déjà fort bien s’y retrouver. Ils n’auront plus alors à se cacher.

Que proposez-vous ?

Pour les établissements difficiles, il faut aller vers plus de discrimination dans l’attribution des moyens. L’origine sociale des élèves doit peser plus dans les dotations. Mais j’avoue une certaine perplexité. L’augmentation de leurs moyens est une condition nécessaire mais pas suffisante. Certains pourraient être fermés et leurs effectifs redistribués. Il y a une réflexion à mener. La France, ce n’est pas Les Mureaux : au nom d’un problème localisé, on ne peut tout de même pas tout casser.

La carte scolaire n’a-t-elle pas fait la preuve qu’elle était incapable d’assurer une mixité sociale ?

Elle ne peut pas tout faire. Pour régler le problème de Clichy-sous-Bois, faut-il permettre à la bourgeoisie des centres-ville d’accentuer ses privilèges et de choisir encore plus ses établissements ? Pour régler un problème que je ne conteste pas, faut-il remettre en cause un principe républicain fort, la mixité sociale ? Après l’abandon du service militaire, l’école est désormais le dernier endroit où l’on peut espérer avoir un peu de mixité.

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