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Dans un « internat de réussite éducative » en Haute-Saône

7 septembre 2006

Extrait du site du ministère de la Cohésion sociale, le 06.09.06 : En Haute-Saône, un internat de collège particulier

Le collège Pasteur de Jussey (Haute-Saône) dispose d’un internat qui accueille aussi, depuis la rentrée 2005, des enfants en difficulté dans le cadre du dispositif de réussite éducative. Quel bilan dresser après cette première année d’exercice ? Rencontre avec Gilles Lonchampt, le principal.

Qui sont les enfants accueillis à l’internat du collège Pasteur ?

Gilles Lonchampt : Les internes sont de niveaux scolaires et de milieux sociaux très différents. Cet internat de collège est le seul dans le département de Haute-Saône et il ne doit en aucun cas être réservé aux cas difficiles. Mon credo est de favoriser au maximum la mixité sociale à l’internat. Cette mixité est garante du « bien vivre ensemble ». L’établissement peut accueillir 25 internes, dont une douzaine, en situation un peu difficile, sont intégrés dans le dispositif de réussite éducative.

Qui fait la demande d’intégration dans ce dispositif « d’internat de réussite éducative » ?

G.L : La demande peut émaner des parents, des services sociaux, ou d’autres chefs d’établissement en recherche de solutions pour certains de leurs élèves rencontrant des situations difficiles. Quant il s’agit des parents, les motivations sont toujours un peu les mêmes : « notre enfant ne veut plus rien faire à l’école. On ne sait plus qu’en faire. L’internat ne serait-il pas une bonne solution pour lui ? ». Il s’agit souvent de familles mono-parentales, ou recomposées dans lesquelles certains enfants ont du mal à trouver leur place. Nous avons également des demandes émanant des enfants eux-mêmes, qui se rendent compte qu’ils doivent trouver de meilleures conditions pour étudier.

Quelles relations entretenez-vous avec les parents ?

G.L : Nous avons formé une équipe composée du chef d’établissement et de son adjoint, de la conseillère principale d’éducation, de l’infirmière et d’une psychologue clinicienne (vacataire) qui intervient dans le cadre du dispositif de réussite éducative. Cette équipe reçoit chaque famille, dont la demande a été acceptée. Nous recevons donc les parents accompagnés de leur enfant pour un entretien, relativement long, qui nous permet de mieux cerner les motivations et d’expliquer aux parents ce que nous pouvons faire ; détailler les activités ; leur faire prendre connaissance du règlement intérieur etc... Puis nous voyons l’enfant seul. Pour lui, devenir interne peut-être ressenti comme une punition. Puis nous établissons un contrat avec les parents et durant l’année, je rencontre les parents une fois par mois. De plus, ils reçoivent un bilan mensuel de la situation de leur enfant. Nous impliquons les parents autant que possible notamment pour certaines activités suivies pas leur enfant. Ainsi, dans le cadre du parrainage d’un collège de Roumanie, nous avons accueilli des collégiens roumains et demandé à tous les parents d’internes de recevoir un petit roumain pendant le week-end. Il est essentiel d’impliquer les parents. Il ne faut pas oublier que l’éducation des enfants incombe d’abord aux parents. Il y a cependant des situations où ils n’ont plus la même possibilité d’exercer leur rôle. Il faut donc trouver des solutions pour assurer cette éducation ensemble.

De quels moyens disposez-vous pour mener à bien les missions de cet internat de réussite éducative ?

G.L :Avec la dotation globale horaire qui m’est accordée, j’essaie de consacrer des moyens importants au dispositif : trois enseignants -de Sciences et Vie de la Terre, technologie et musique- ont des décharges pour s’occuper plus particulièrement des jeunes de l’internat. Ils mettent sur pied des projets qui permettront aux enfants en difficulté de se valoriser. Car ces enfants ont souvent des troubles de l’estime de soi qui les empêchent d’avoir une bonne scolarité. C’est grâce au dispositif de Réussite Educative que nous avons pu embaucher une vacataire qui est psychologue clinicienne. Elle joue un rôle de médiatrice entre les enfants et nous. Au cours d’un atelier « bande dessinée » (le mercredi après-midi et le jeudi soir), elle instaure le dialogue avec les enfants. Elle peut dresser un portrait de chacun. Elle repère ainsi les enfants qui ont besoin d’une assistance plus lourde : médicale, psychologique ou pédagogique. Son rôle n’est pas soigner, mais de nous alerter. Les réponses sont souvent plurielles. L’infirmière de l’établissement a elle aussi son rôle à jouer. Chaque soir, elle consacre un quart d’heure à écouter les jeunes internes.

Quel plus apporte l’internat, par rapport à un dispositif de soutien scolaire traditionnel ?

G.L : L’égalité des chances ne se décrète pas ; elle se créée. Cet internat représente une chance dans ce sens, car nous avons à notre disposition un temps suffisant (en soirée et le mercredi après-midi) à consacrer aux enfants en grandes difficultés. Nous arrivons à mieux déceler les fondements d’une difficulté particulière. Nous pouvons ensuite orienter l’enfant vers la personne ou la structure qui pourra l’aider. En ce sens, le dispositif de réussite éducative apporte un plus : il permet de mettre en mouvement et de coordonner les actions et le savoir-faire de différentes structures existantes, qui ne travaillaient pas forcément ensemble jusqu’alors.

Le bilan, au terme d’une année d’exercice ?

G.L : Le bilan est très positif. En fin d’année pour les 3è, nous avons pu proposer une orientation scolaire à chaque enfant, même à ceux qui étaient en très grande difficulté : la seconde générale pour certains, le lycée professionnel pour d’autres. Nous avons également une grande satisfaction morale : des parents sont venus nous remercier avec beaucoup de sincérité. Ils avaient constaté que le comportement de leur enfant avait changé. Il était plus calme, moins agressif, mieux dans sa peau. Les week-ends se passaient bien mieux. Ils avaient pu renouer un dialogue. Pour cette nouvelle année, nous avons reçu une cinquantaine de demandes.

Que se passe-t-il ensuite, pour ceux qui vont poursuivre leur scolarité en lycée ?

G.L : Pour l’instant, rien n’est prévu pour l’accompagnement de ces jeunes après le collège. Mon souci n’est pas leur scolarité. Ils s’en sortiront certainement au niveau scolaire. Mais il faut qu’ils arrivent à tenir en se retrouvant livrés à eux-mêmes dans un internat de lycée où l’ambiance n’est pas du tout celle du collège où ils ont été accompagnés, où ils ont bénéficié de la solidarité des autres, où ils se sont livrés à des activités valorisante. C’est là que ces jeunes risquent de s’orienter vers des comportements déviants, voire agressif. Il me semble très important de réfléchir à l’après « Réussite éducative ».

Propos recueillis par Jacqueline Montali

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