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Maintenir les écoles ouvertes suppose de soutenir les personnels et les élèves (Journal de bord d’un CPE en REP+, janvier 2022)

31 janvier 2022

JOURNAL DE BORD D’UN CPE EN REP +
Janvier 2022 : Dérèglement climatique scolaire

Si depuis plusieurs années, la communauté scientifique tente d’alerter nos dirigeants sur les conséquences dramatiques d’un réchauffement climatique, il semblerait également que notre système scolaire connaisse un dérèglement accentué, depuis 2 ans, par une gestion calamiteuse de la crise sanitaire. Cette situation a des conséquences sur le bien être de nos élèves mais aussi sur les conditions de travail des professionnels qui ne cessent de se dégrader et qui provoquent de nombreuses souffrances sans que celles-ci soient entendues par un ministre de l’éducation plus soucieux de son image que des personnels qu’il a en charge. Pour Paul Ricoeur, philosophe pourtant souvent cité par le président de la République, la souffrance n’est pas uniquement définie par la douleur physique, ni même par la douleur mentale, mais par l’intégrité de soi. Comme il l’explique, la personne qui souffre ne semble pouvoir retrouver une capacité d’agir que dans la sollicitude d’autrui1. Or nous n’avons que mépris et indifférence en retour. L’écart entre ce que récite à longueur de temps dans les médias les tenants de la doxa présidentielle et la réalité du terrain est devenu insupportable.

Au niveau de la vie scolaire, outre le travail de « tracing » en appui des infirmières, les assistants d’éducation doivent constamment palliés les absences des enseignants et se retrouvent à devoir des gérer des élèves en état de nervosité et de stress avancés. En effet, le quotidien des élèves se trouvent très perturbés, ce qui occasionne pour beaucoup des pertes de repères et de rythmes. Or l’importance du « coutumier », pour reprendre un terme delinéen (Deligny), est un élément important dans la construction de l’enfant. Le fonctionnement ordinaire de l’école crée un quotidien, une « culture du quotidien » devrions-nous dire. Pour un élève le quotidien c’est son emploi du temps, ses rencontres avec les adultes, le travail qui lui est demandé, les consignes qu’il doit suivre, les geste qu’il répète. Or la situation sanitaire et le choix du gouvernement de laisser circuler le virus au sein des établissements scolaires détruit cette « culture du quotidien » en créant de nombreux dysfonctionnement internes et produit du mal être autant pour les personnels que pour les élèves. Les situations de souffrance explosent dans mon collège et ce n’est peut-être pas un hasard que l’éditorial de Libération du 10 janvier expliquait à propos des adolescentes : « Les données que nous publions sur la hausse spectaculaire des tentatives de suicide des adolescentes en 2021 sont extrêmement préoccupantes même si elles restent cohérentes avec ce que l’on sait de la détérioration de la santé mentale des adolescents depuis le début de la pandémie »3.

[...] Maintenir les « écoles ouvertes » comme s’en vante régulièrement le ministre de l’éducation dans l’espace médiatique, ne pouvait s’exonérer d’un « soutien » humain et financier. « Maintenir » signifie « conserver dans le même état ». Maintenir et soutenir semblent aller de pair or nous attendons toujours d’être soutenu par notre ministre. Le maintien des écoles ouvertes ne pouvait s’exonérer d’un recrutement de personnels de santé, de vie scolaire ou d’agents, ainsi que d’enseignants. Cela demande de l’écoute, de la concertation, de l’anticipation, du courage. Maintenir les école ouvertes ne sert à rien si l’on ne se préoccupe pas du vécu de nos élèves.

Extrait de educateurequitable.wordpress.com du 30.01.22

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