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Roland Goigoux : L’enseignement en éducation prioritaire n’est pas de moindre qualité
"L’enseignement de la lecture et de l’écriture au cours préparatoire n’est pas de moins bonne qualité en éducation prioritaire", écrit Roland Goigoux dans un article publié par la revue de l’IREA (n°2). En se basant sur ses observations auprès de plus de 2000 élèves, R Goigoux met en doute les affirmations d’autres chercheurs qui montrent un enseignement moins exigeant en éducation prioritaire. Pour lui les pratiques pédagogiques sont identiques en éducation prioritaire et dans les autres classes.
Plusieurs études ont mis en avant des pratiques pédagogiques moins efficaces dans les classes de l’éducation prioritaire en CP pour l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. R Goigoux cite par exemple un rapport du Cnesco de 2016 et aussi des travaux du réseau Reiseda (JY Rochex, S Bonnery).
A ces travaux il oppose une enquête quantitative portant sur 2394 élèves (1746 hors éducation prioritaire (EP) et 646 en EP) et les pratiques de 131 enseignants , dont 39 en EP, tous étant des maitres expérimentés.
Selon les calculs de R Goigoux, le temps d’enseignement en CP pour le lire-écrire est identique en EP et hors EP (environ 7h20). "Ce résultat global aurait pu cacher de profondes disparités dans la nature ou la répartition des tâches proposées aux élèves comme le laisse entendre le CNESCO lorsqu’il aborde la question des pratiques pédagogiques. La comparaison, type de tâche par type de tâche, montre qu’il n’en est rien. Seules les durées allouées à 3 types de tâches se distinguent significativement : les élèves de l’EP passent moins de temps que leurs camarades hors EP à lire à haute voix et à réaliser des tâches écrites en lien avec la compréhension des textes, mais ils en passent plus à étudier la syntaxe. Ces écarts sont de surcroît minimes : sept minutes hebdomadaires tout au plus", écrit R Goigoux. L’engagement des élèves dans les tâches est identique et le climat de classe également. Pour R Goigoux, "l’offre d’enseignement n’est donc pas différente en éducation prioritaire". Pour lui, les phénomènes décrits par le réseau Reseida (sur ajustement au niveau par exemple) existent mais ne sont pas aussi massifs que cela est dit. A noter quand même que l’étude de R Goigoux ne prote que sur des enseignants expérimentés.
R Goigoux montre qu’il n’y a pas plus de différence dans la planification de l’étude des correspondances entre lettres et sons, ni dans les manuels utilisés. "Nous n’avons trouvé aucune différence significative, dans l’enseignement de la lecture et de l’écriture, entre les pratiques des enseignants oeuvrant en CP dans l’Éducation prioritaire ou en dehors".
En ce qui concerne les résultats, ses calculs montrent que l’écart entre EP et hors EP, qui est important à l’entrée en CP, se réduit en fin de CP. "Le cours préparatoire joue un rôle compensatoire même si la différence de performance entre les deux groupes reste importante". Les écarts sont plus faibles en maitrise du code qu’en compréhension. Dans ce domaine, "l’influence des contextes éducatifs familiaux des élèves n’est pas contrebalancée par la pédagogie dans ce champ de compétences très sensible aux pratiques langagières et culturelles familiales". En CE1 la situation change : les écarts se creusent entre élèves de l’Ep et hors EP.
Pour R Goigoux, "en lecture-écriture, au cours préparatoire, on ne peut pas laisser dire que « les élèves scolarisés en éducation prioritaire ne bénéficient pas d’une qualité d’enseignement identique à celle des élèves scolarisés en établissements du secteur ordinaire ».
F Jarraud
Roland Goigoux, Pratiques pédagogiques et conditions de travail, Education prioritaire et accueil des élèves fragiles, Revue de l’IREA n°2.
A noter dans ce numéro un intéressant entretien avec Alain Bourgarel, une personnalité à l’origine de l’éducation prioritaire
Extrait de cafepedagogique.net du 16.03.21