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L’affectation nationale des professeurs, un garant d’égalité devenu carcan
L’égalité de traitement entre les fonctionnaires de l’éducation nationale n’est pas toujours respectée. Chaque année, sur 30 000 enseignants du secondaire qui demandent à être mutés, 60 % n’obtiennent pas satisfaction.
[...] Académies inégalitaires
Le problème va au-delà des candidats éconduits : les différences d’attractivité entre académies se sont creusées au fil des décennies, sans que le « mouvement » n’y puisse rien. Aux jeunes enseignants les établissements boudés, les banlieues, l’éducation prioritaire ; aux professeurs chevronnés les établissements de centre-ville, le Sud et la façade atlantique. Nul n’ignore ce que l’algorithme génère comme frictions et, pourtant, chacun fait mine de croire que tous les enseignants – et tous les établissements – se valent.
Ces tensions expliquent en partie la crise des vocations actuelle. Elles ont des répercussions pédagogiques : au sein des réseaux d’éducation prioritaire, le problème n’est peut-être pas tant la surreprésentation des jeunes enseignants, que l’instabilité des équipes et ses conséquences sur les élèves. Alors que la France est championne des inégalités scolaires selon l’enquête internationale PISA, le parallèle entre enseignants « bloqués » et élèves en difficulté ne peut être occulté.
[...] Le « mouvement » révèle ainsi ses limites. Pour combler les manques, l’éducation nationale recrute des contractuels, ces enseignants non titulaires qui n’ont pas passé de concours. Dans l’académie de Versailles, ils sont plus de 4 000 en renfort ; et même 4 500 à Créteil. Les « primes ZEP » et les « bonus à l’ancienneté », autre levier, n’ont apporté qu’une « réponse partielle à un problème structurel », argumente-t-on dans les rangs syndicaux, où l’on défend plutôt l’ouverture de postes ou l’octroi de moyens supplémentaires aux écoles.
Une autre piste moins connue est celle des « postes à profil ». C’est à elle qu’ont pensé les acteurs de l’école en entendant le discours du chef de l’Etat à Marseille. Ces affectations réalisées « hors barème » flèchent des postes en fonction de besoins spécifiques : classes européennes, classes préparatoires, disciplines artistiques… Leur nombre a « légèrement augmenté » en dix ans, écrit la Cour des comptes en 2017, jugeant l’« outil sous-utilisé ». On reconnaît, rue de Grenelle, la volonté de le « développer » sans avancer d’objectif chiffré.
La piste n’est pourtant pas aussi révolutionnaire qu’on peut le croire, et pas seulement parce que le recrutement dans l’enseignement privé, fort de plus de 100 000 enseignants, fonctionne ainsi. Dans le public, une tentative menée sous le quinquennat Sarkozy avait tourné court. Ces postes à profil destinés à des établissements prioritaires entre 2010 et 2012 n’avaient pas trouvé preneur. Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’éducation nationale, en sait quelque chose : il était à l’époque directeur général de l’enseignement scolaire, le numéro deux du ministère.
Extrait de lemonde.fr du 16.09.21
L’école, à Marseille comme ailleurs, nécessite une toute autre ambition
Alors que la communauté éducative marseillaise attendait des annonces ambitieuses pour ses écoles délabrées, le président de la République a annoncé comme mesure phare le « choix » des enseignant·es par les directeurs et directrices d’école. Cette mesure, totalement inappropriée et présentée comme une expérimentation généralisable à terme, est vécue comme une provocation par les personnels des écoles de Marseille.
Même si le ministre s’en défend, difficile de ne pas faire le lien entre cette annonce et la volonté ministérielle de parvenir à terme à instaurer un statut hiérarchique de la direction d’école pourtant largement rejeté par l’ensemble de la profession. L’étude en seconde lecture de la proposition de loi Rilhac au parlement fin septembre, ainsi que les annonces réglementaires sur le statut d’emploi fonctionnel par les représentants du ministre, illustrent d’ailleurs parfaitement cette volonté.
En pointant du doigt les enseignant·es et leur “motivation” et en faisant une telle annonce contraire aux principes du service public et qui bouleverserait le fonctionnement de l’École Publique, le président de la République détourne l’attention des vrais enjeux pour les écoles marseillaises.
Les personnels ne manquent pas de motivation, mais ils ont besoin des moyens pour exercer leur métier dans des conditions matérielles dignes de ce nom pour eux-mêmes et leurs élèves, des créations de postes et du recrutement de personnels enseignants, AESH, Atsem... en nombre suffisant. La direction d’école, elle, a besoin d’une augmentation significative des quotités de décharge, d’une aide administrative statutaire et de l’allègement des tâches.
Les organisations syndicales SNUipp-FSU, SNUDI-FO, CGT Educ’action, SNALC et Sud Education refusent donc clairement cette idée selon laquelle le « choix des enseignant·es » par les directrices et directeurs répondrait aux besoins des écoles. Au contraire, elle ne ferait qu’entraîner une dérégulation des écoles publiques.
Nous exigeons donc l’abandon immédiat du projet d’expérimentation de recrutement des enseignant·es par les directeurs et directrices tout comme nous refusons la proposition de loi Rilhac et le statut d’emploi fonctionnel.
L’école, à Marseille comme ailleurs, nécessite une toute autre ambition et des réponses à ses problèmes construites avec ses personnels.
C’est un des enjeux que nous aurons collectivement à porter lors des mobilisations à venir.
Extrait de cgteduc.fr du 15.09.21
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