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La disparition programmée des REP dans le rapport Carel, un billet de vacances de Claire Lommé, formatrice

14 août 2023

La disparition programmée des REP
Je m’étais gardé un article du Café Pédagogique à lire, depuis un mois. Aujourd’hui je suis retombée dessus, et ça fait mal. Il s’agit du rapport Carel, de la députée Horizons Agnès Carel. Ce rapport propose de conserver l’étiquetage Rep+ mais de faire disparaître l’étiquette Rep. En compensation, ces établissements recevraient une allocation dont le montant serait fixé par les recteurs et les rectrices. Madame Carel envisage une transformation échelonnée sur trois ans.

L’objectif, comme pour tout ce qui touche à l’éducation, c’est la “souplesse”. On peut entendre, par souplesse, “des personnels corvéables à merci pour un coût moindre”. Mais évidemment s’attaquer aux REP c’est avant tout s’attaquer à l’accès à l’éducation et à l’enseignement des populations pauvres : aujourd’hui, l’éducation prioritaire concerne 21% des collégiens et 20% des écoliers. C’est beaucoup, et les REP+ représentent moins de la moitié de l’éducation prioritaire : en 2020 dans le second degré on était sur une répartition 2/3 REP et 1/3 REP+.

Côté ruralité, la rapporteure écrit que “les résultats des élèves ne sont que faiblement corrélés à l’indice d’éloignement de leur établissement“, mais demande un transfert de moyens au bénéfice des secteurs ruraux. Cela dit, même si les élèves des secteurs ruraux réussissent bien et que cette ruralité ne semble pas être un obstacle, certains de réseaux ruraux ont été oubliés et le sont encore. Mais déshabiller des quartiers qui en ont besoin aussi n’est pas la solution.

Concernant les dédoublements, madame Carel parle de “la réussite relative du dédoublement des classes“. Cela sonne comme un désaveu, et pourtant “les écarts de performances entre les élèves scolarisés dans le secteur public hors éducation prioritaire et ceux scolarisés en éducation prioritaire se réduisent mais l’objectif des 100 % de réussite est loin d’être atteint“. Le rapport recommande de garder les dédoublements mais de ne les conserver que pour les fondamentaux au primaire, ce qui semble juste irréaliste en matière d’organisation des écoles.

Pendant qu’on y est, les Rased sont jugés peu efficaces, et le rapport suggère leur remplacement par des orthophonistes privés, ce qui est simplement absurde : trouver un orthophoniste (comme tout un tas d’autres spécialistes, d’ailleurs) est extrêmement difficile, et encore plus dans les quartiers d’éducation prioritaire. Se pose aussi le problème financier que cela induit. Madame Carel mépriserait-elle les populations pauvres ?

Ah, et les vacances ! Tapons sur les vacances des enseignants, ça défoule et c’est populaire ! La rapporteure souhaite “lancer une réflexion sur la durée des vacances scolaires afin de ne pas accentuer les écarts de performances entre secteurs de scolarisation“. Je n’ai pas compris la phrase, je dois être en vacances depuis trop longtemps.

Bon, depuis nous avons changé de ministre. Cela ne changera sans doute rien à l’affaire : ce rapport montre la méconnaissance de l’éducation nationale, du terrain, de l’éducation prioritaire, et ne porte aucune bienveillance vers les populations qui ont besoin d’être choyées. De projet de société inclusif et équitable, il n’est évidemment pas question. L’important c’est l’entre-soi, les chimères et les fantasmes d’une opinion publique dont en fait les personnes politiques savent bien peu de choses, et d’économiser coûte que coûte du côté de l’éducation.

Je vais retourner à mes préparations pour mes élèves ULIS, dans mon collège. Là j’espère encore pouvoir agir pour être utile aux plus fragiles.

Extrait de clairelommeblog.fr d’août 2023

 

Claire Lommé : Qui suis-je ?

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