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Les « écoles du futur » de Marseille, fragile outil face aux inégalités scolaires
L’expérimentation menée dans la ville des Bouches-du-Rhône doit être généralisée sur le plan national. Mais elle est loin d’avoir encore fait ses preuves.
Analyse. A peine commencée, déjà généralisée. Emmanuel Macron a surpris la communauté éducative en annonçant, le 2 juin, lors d’un déplacement avec son nouveau ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, l’extension nationale de l’expérimentation « école du futur » conduite depuis quelques mois à Marseille. La décision de généraliser l’expérience intervient alors que les 59 écoles qui y participent sont, pour la plupart, encore dans une phase d’élaboration, avant une mise en œuvre effective à partir de la rentrée, et qu’il est difficile d’en mesurer l’impact sur la réussite des élèves. Preuve, s’il en est, que le tempo éducatif ne correspond pas au tempo politique.
L’expérimentation est présentée par le chef de l’Etat comme une manière d’accorder « plus d’autonomie » aux équipes pédagogiques plutôt que comme un programme de lutte contre les inégalités, alors que le système éducatif français peine à les réduire. L’initiative marseillaise dresse néanmoins des lignes de force – et de faiblesse – du « changement de méthode » promis par Emmanuel Macron pour son second quinquennat.
Dans une institution telle que l’éducation nationale, souvent qualifiée de verticale et centralisatrice, renverser les perspectives et partir des besoins exprimés par le terrain sonne, il est vrai, déjà comme une rupture. Les écoles volontaires ont eu toute liberté pour proposer le projet de leur choix autour de quelques thèmes prédéfinis : les langues, le sport, la culture, l’environnement… Elles se sont, le plus souvent, inspirées d’idées déjà dans les tiroirs, mais qui n’ont pas pris vie, faute de financement.
[...] Comment dès lors conjuguer ces moyens alloués sur la base du volontariat et la politique d’éducation prioritaire ? Comment garantir de donner plus à ceux qui ont moins pour rétablir une équité de traitement, alors que le système scolaire français ne comble pas les inégalités de naissance ? A Marseille, 80 % des projets « école du futur » relèvent de l’éducation prioritaire. Depuis plus de quarante ans, cette politique a été conçue pour donner des moyens aux établissements qui concentrent les élèves les plus défavorisés, selon une carte, certes imparfaite, mais établie nationalement. « La lutte contre les inégalités part d’initiatives de terrain au plus près des élèves, mais doit relever d’un Etat central qui fixe le cadre et oriente les moyens », défend Marc Douaire, le président de l’Observatoire des zones prioritaires.
Extrait de lemonde.fr du 26.06.22
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