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De quoi parler avec les parents à l’école ? (Rencontre OZP, novembre 1998)

novembre 1998

-----LES RENCONTRES DE L’OZP-----

Observatoire des zones prioritaires
www.ozp.fr

n° 10 - novembre 1998

De quoi parler avec les parents à l’école ?

Compte rendu de la réunion publique du 18 novembre1998

A l’occasion de la publication par le CRDP de Marseille d’un "Livret de communication : école maternelle, cycle I » (accompagné d’un livret de l’élève) à destination des parents d’élèves de maternelle se repose la question des formes, des contenus et des objectifs d’une communication des enseignants avec les parents.
La relation école-familles tant souhaitée par notre ministre a fait l’objet de nombreuses initiatives dans les zones d’éducation prioritaires et ailleurs, aux effets très variables.
Si l’on s’accorde pour souhaiter que cette relation se développe, il n’est pas certain que toutes les actions favorisent le renforcement du sens de l’école, en particulier pour ceux qui sont le moins en phase avec les attentes de l’institution. Parents relais, formation de parents, ateliers cogérés dans l’école, activités festives, livret de communication, production de films... dans quelles conditions une communication avec les parents permettra-t-elle de favoriser la mise en synergie des efforts de tous ?

Présentation des livrets de communication

La genèse du travail effectué à Marseille (CEFISEM et circonscription 13) sur ces livrets de communication a été présentée aux membre de l’OZP par les auteurs, Alain Blanchi et Denis Leroy.

Au départ, on a pu constater une grande méconnaissance de la part des parents de ce que font les enfants à l’école maternelle et au collège. Parallèlement, il y a actuellement de fortes préoccupations liées à la notion de violence. Cette violence est un indicateur de mal-être.
Deux questions fondamentales se posent : "Pourquoi l’école ?" ; "Comment l’école ?".

Nous sommes tous conscients et porteurs d’une parole sur "Pourquoi l’école ?". Cette question ne semble pas non plus poser de problème aux parents.
L’institution scolaire garde une forte légitimité implicite et symbolique. Le « pourquoi » implique une obligation de résultat.

Le "comment" affronte des résistances beaucoup plus importantes et il implique une obligation de moyen. L’opacité réside dans cette dernière obligation.
Quand l’école énonce les raisons et l’importance de son existence, elle rencontre des adhésions mais ne lève pas le voile sur ses moyens d’action.
L’obligation de moyen offre des indicateurs. Le réfèrent permanent est le savoir à enseigner.
Un glissement sémantique s’opère souvent au sujet de l’école maternelle, alors désignée sous le
vocable de « garderie ». Cela vient du fait qu’elle est la « gardienne » très jalouse de son contenu, qu’elle ne sait pas énoncer son mode de fonctionnement.

La question de la relation aux parents pour essayer de donner plus de sens à l’école, à ses attentes, ses enjeux se pose très vivement.
Différents projets, tous plus ou moins insatisfaisants, ont vu le jour. Puis a été élaboré sous la direction de Denis Leroy et publié par le CNDP-Migrants en 1994 le répertoire 100 actions Parents-Ecole (écoles et collèges), outil lui-même en partie insatisfaisant car les projets réalisés dynamisaient les acteurs mais finissaient par être démobilisants en raison de leur caractère ingrat : beaucoup de peine pour peu de résultats.
Les différents projets présentés dans ce répertoire étaient des formations de parents (l’école demande à un organisme de formation d’intervenir avec des parents pour rendre l’école moins opaque), des tentatives de réponses à l’envahissement des questions de santé à l’école, des initiatives dites de parents relais ; un travail sur des médias, notamment filmiques (mais là aussi toute l’énergie étant investie dans la production, la diffusion était défaillante voire inexistante). Il existait également sur tous ces projets une grande difficulté à avoir un discours précis sur les actions, leur contenu, leurs objectifs.
L’objet sur lequel on avait ainsi travaillé et la façon de le travailler étaient à remettre en question.

De quoi parle-t-on avec les familles et comment en parle-t-on ?
La question des savoirs a été mise à l’honneur avec la création des livrets d’évaluation, il y a quelques années. La façon dont ces livrets sont utilisés pose de vrais problèmes. Or c’est sur cet objet-là qu’une communication doit exister. C’est là que l’outil Livret de communication a été imaginé. On ne parle pas en termes d’indicateurs ni de critères mais en termes de tâches.
Un choix iconographique a été fait (photos). Le livret a été conçu comme "positivement pervers" : dès qu’un partenaire s’en saisit, il a quelque chose à dire. Cela provoque des échanges et des questionnements.
Le livret navigue entre photos, énonciation familière en caractères très lisibles, et items formels (sur fond bleu, en caractères très petits, destinés aux enseignants et pas aux parents).

L’objectif en termes d’exploitation du produit est qu’il soit utilisé dans des conditions normales (temps de rencontres ordinaires avec les parents, individuels ou collectifs) et également sous forme d’affichage.
La diffusion du travail existe en plusieurs temps : un premier lancement restreint a été effectué. Un obstacle initial était d’être avalisé par l’observatoire des produits du CNDP avant de pouvoir être diffusé au plan national.
L’Inspection académique a aidé le produit en envoyant le livret de communication aux IEN afin qu’ils prennent contact avec les mairies et celles-ci ont été contactées de leur côté afin qu’elles aident à la diffusion.

Les réactions face au livret de communication sont très favorables. Comme certains membres de l’OZP le remarquent, il est même étonnant que personne n’ait pensé plus tôt à créer un tel outil. D’autres expériences ont existé dans des écoles maternelles par l’organisation de journées ou de semaines d’expositions didactiques pour les familles mais cette forme de livret paraît tout à fait innovante.

Le but est de provoquer un questionnement.

Il ne s’agit pas d’un livret scolaire. Son objectif n’est pas de dessiner l’évolution des progrès d’un élève. C’est un document qui doit permettre d’activer les pratiques quotidiennes des uns et des autres à partir de situations.
Les images ne permettent pas de comprendre ; elles convoquent, elles invitent, elles sollicitent les questions.
Le livret est un objet qu’il faut pirater pour se l’approprier. Il est très important de voir des photos avec
les enfants de l’école-même. On parle plus facilement quand le milieu que l’on connaît est représenté.
Il faut néanmoins un équilibre entre l’élève générique (le cadre est l’Éducation Nationale) et l’enfant
en particulier

Le contenu de la communication

La tradition du métier n’est pas une tradition de parole, en dehors de la classe. On a donc besoin de supports et d’aides diverses pour établir la communication, en particulier sur les objets de savoir.
Souvent, on conçoit des activités avec certaines intentions puis de l’activité même surgit un autre sens. La définition a priori d’enjeux n’est pas suffisante et il faut une capacité d’évaluation et de bilan du travail effectué. La communication est importante tant sur les objectifs a priori que sur le contenu réel.
Le fait de parler avec les parents d’autre chose que des savoirs est essentiel.
Aussi bien pour les élèves que pour les familles, la question des savoirs peut être facteur de socialisation. Parler d’entrée des choses primordiales permet de donner du sens à la relation qui pourra ensuite être plus large.

La communication avec les familles demande une définition claire des missions. L’école est surinvestie parce qu’elle n’est pas définie. Elle est au croisement d’interprétations où les parents, les enseignants, les élèves sont tour à tour angélisés ou diabolisés. Quelles sont les variables que l’école gère ? Définir ce que l’on est capable de piloter permettra d’éviter la dérive de l’attente des gens. L’école doit se situer par rapport aux autres composantes du corps social. Tout ce qui explicite son rôle peut dédramatiser l’attente dont elle est l’objet.

Difficulté de la relation aux parents

La rencontre avec les familles est devenue plus difficile à de nombreux égards. Les parents ont à régler plus de choses avec l’école dans les zones difficiles. Les équipes enseignantes dans ces zones ont tellement de difficultés de tous ordres avec les parents et les enfants qu’elles ont une réaction défensive. Cette réaction ne vise pas les enfants en maternelle, mais les parents.
Le livret favorise à l’évidence le dialogue entre les parents et les enfants. Le dialogue entre parents et enseignants est, lui, beaucoup plus difficile à établir.
Certains vont jusqu’à penser qu’un tel support pourrait, à rencontre de son objectif, satisfaire beaucoup de parents, et se substituer à des rencontres avec l’enseignant.

Il existe un discours courant sur la responsabilité des parents dans l’échec scolaire. Les enseignants se méfient des parents et dans le même temps attendent de nouvelles relations famille-école.
Est-ce davantage à l’institution qu’aux enseignants d’établir cette relation ?
Les associations de parents d’élèves représentent les classes moyennes et les parents de classes populaires en sont complètement absents. Il existe un décalage entre l’école et l’accompagnement scolaire, l’un compensant l’autre.
Dans le problème de la relation avec les parents, c’est la question de l’égalité face à l’école qui est en jeu.
Le problème actuel est que la massification et l’unification du système d’enseignement ont amené les uns et les autres à rivaliser avec des stratégies propres au milieu social dont ils relevaient, dans les mêmes places. Le travail de communication conduit à permettre à chacun d’utiliser les stratégies que les plus favorisés utilisent, à tort ou à raison (anticiper pour les parents sur le travail qui va être fait à l’école).
Les choses ont changé : l’échec scolaire actuellement semble être un échec social.
La pression est donc très forte. Même les activités de loisir chez les classes favorisées contribuent à créer des comportements qui favorisent la réussite scolaire. Il n’est pas sûr que des interventions strictement scolaires permettent de modifier cette réalité.

La société va plus vite que les réponses que nous pouvons donner.
Un outil tel que le livret de communication est une réponse tardive et réactive. Mais une telle réaction essaie de donner du sens à l’action de chacun. La mise en place de l’outil en maternelle cherche à anticiper et à agir à moyen terme.

Ci-dessous une version PDF à la mise en page identique à l’original papier

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