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Plan maternelle (BO du 12 janvier 2023)

12 janvier 2023

Plan maternelle
Un plan d’action pour l’école maternelle : donner à tous les élèves les bases de leur réussite et garantir leur épanouissement

NOR : MENE2300949N
Note de service du 10-1-2023
MENJ - DGESCO A1-1

L’école maternelle, première étape du parcours scolaire des enfants, est une étape déterminante pour l’épanouissement des élèves, la réduction des inégalités, notamment en matière de développement du langage, et la réussite ultérieure des élèves. Elle permet en effet de poser les soubassements nécessaires à l’acquisition des savoirs fondamentaux et d’instituer une expérience de l’école fondée sur la confiance en soi et le développement du goût pour apprendre et vivre ensemble.

Le programme d’enseignement de l’école maternelle, modifié de 2021, rappelle que : « Sa mission est de donner envie d’aller à l’école pour apprendre, pour affirmer et épanouir leur personnalité, pour exercer leur curiosité sur le monde qui les entoure, tout en respectant le rythme de développement de chacun. En montrant à chaque enfant qu’il est capable d’apprendre avec succès dans toutes sortes de situations, l’école maternelle l’engage à avoir confiance dans son propre pouvoir d’agir et de penser, dans sa capacité à apprendre et réussir sa scolarité et au-delà. En lui apprenant à collaborer avec les autres, notamment par le jeu, elle place la socialisation comme l’une des compétences fondamentales à acquérir. » La pratique d’activités physiques et artistiques est également au cœur des missions de l’école maternelle et « contribue au développement moteur, sensoriel, affectif, intellectuel et relationnel des enfants ».

Dans ce cadre, le premier enjeu de l’école maternelle consiste ainsi à créer les conditions de sécurisation de l’enfant dans son environnement scolaire comme dans ses apprentissages. L’attention portée à chacun et à l’éveil de sa personnalité lui permet de trouver dans l’école un lieu d’épanouissement individuel et collectif.

Le second enjeu est, parmi les cinq domaines d’apprentissage, d’installer les premiers apprentissages fondamentaux, autour de deux priorités : le langage et les premières notions de mathématiques.

L’apprentissage du langage doit se traduire notamment par l’acquisition et la diversification du vocabulaire dès le plus jeune âge. De nombreuses recherches confirment le lien entre l’enrichissement et la diversification du vocabulaire et la réussite scolaire, la diversité du champ lexical facilitant considérablement l’apprentissage ultérieur de la lecture et de l’écriture. Il s’agit donc non seulement d’un enjeu de réussite pour tous les élèves, mais également d’un enjeu de réduction des inégalités. Le rôle de l’école maternelle, par l’enrichissement méthodique, structuré et entretenu du champ lexical, puis par les premières associations graphèmes/phonèmes, est ainsi déterminant pour la réussite des élèves.

S’agissant des mathématiques, le cycle 1 permet d’acquérir les premiers outils mathématiques, c’est-à-dire prioritairement de construire et de stabiliser la notion de quantité, indispensable aux réussites arithmétiques ultérieures et de connaître l’ordre des nombres, les chiffres et leur suite. Plus généralement, il s’agit de développer, tout au long du cycle lors de temps d’enseignement structurés mais aussi à chaque moment où la situation le permet, le plaisir et l’envie de résoudre des problèmes adaptés à l’âge et au développement cognitif de chaque élève.

Le plan d’action pour l’école maternelle a pour objectif, dans la durée, de mobiliser différents leviers essentiels : le renforcement des compétences et des savoirs de l’ensemble des acteurs ainsi que la consolidation des partenariats éducatifs avec la sphère familiale et territoriale. Il s’appuie sur le partage de pratiques pédagogiques éprouvées, dont l’efficacité dans la réduction des inégalités est corroborée par la recherche et qui fait l’objet de différents guides dont les professeurs, conseillers pédagogiques et inspecteurs sont invités à s’emparer (https://eduscol.education.fr/3107/guides-fondamentaux-pour-l-enseignement).

C’est ainsi toute la chaîne éducative qui est appelée à se mobiliser, sous le pilotage des recteurs et rectrices, responsables de la mise en œuvre du plan d’action pour l’école maternelle. Il s’agit, dès les premières années de scolarisation, de garantir l’excellence des professionnels qui y exercent afin de favoriser la réussite et le bien-être des élèves.

1. Un plan de formation pluriannuel
Conforter le rôle et les pratiques pédagogiques de l’école maternelle implique la mise en œuvre d’un plan de formation dédié aux spécificités de l’école maternelle, dans le cadre à la fois du programme national de formation et des programmes académiques portés par les écoles académiques de la formation continue (EAFC), à destination de l’ensemble des formateurs et professeurs. Les recteurs et les directeurs des EAFC, en lien avec l’Institut des hautes études de l’éducation et de la formation (IH2EF) pour la formation des inspecteurs de l’éducation nationale (IEN), s’assurent que l’ensemble des formations présentées ci-dessous sont effectivement proposées à l’ensemble des acteurs concernés, et qu’elles sont planifiées et anticipées pour permettre aux professeurs d’en bénéficier effectivement et de manière programmée.

Former les cadres, les formateurs et les personnels ressources
Dès l’année 2022-2023, l’ensemble des IEN en charge du dossier maternelle et des conseillères et conseillers pédagogiques départementaux maternelle bénéficient d’un plan de formation dédié aux enjeux du pilotage, des partenariats, du renforcement des compétences professionnelles (didactiques, pédagogiques et de développement des jeunes élèves). Ces contenus de formation ont vocation à être articulés à la formation continue des inspecteurs chargés de circonscription, du réseau des adjoints aux directeurs académiques des services de l’éducation nationale (Dasen) pour le premier degré et des conseillers techniques des recteurs pour le premier degré.

Ces acteurs organisent ensuite les plans de formation des professeurs, des directeurs et des directrices exerçant en école maternelle de manière pluriannuelle.

Former les directeurs et directrices d’école maternelle
Tous les directeurs et directrices nouvellement recrutés sur liste d’aptitude bénéficient lors de la formation statutaire d’adaptation à l’emploi de modules dédiés au pilotage de l’école maternelle et de ses enjeux principaux. Cette formation porte notamment sur le pilotage du projet pédagogique de l’école.

Les directeurs et directrices d’école exerçant en école maternelle bénéficient, dans le cadre de leur formation continue, d’actions spécifiques dédiées aux enjeux propres à cette école : le pilotage pédagogique dans le cadre du programme d’enseignement, les préconisations pédagogiques ministérielles, l’usage et l’analyse des évaluations CP, le partenariat avec les parents, le partenariat avec la collectivité territoriale et la relation aux agents, le partenariat avec les structures de la petite enfance, le développement de l’enfant, etc.

Les directeurs et directrices d’école maternelle mobilisés dans l’animation des concertations pour leur école dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) - « Notre école, faisons-la ensemble » sont par ailleurs accompagnés spécifiquement dans la réalisation des projets de leur école, qui doivent avoir pour objet d’améliorer la réussite des élèves.

Former tous les professeurs de maternelle sur 6 ans en priorisant les contenus
Le plan de formation pour l’école maternelle repose sur un équilibre entre l’expression des besoins des équipes pédagogiques dans le cadre des 18 heures d’animation pédagogique et les priorités des domaines d’apprentissage à l’école maternelle au regard du calendrier de formation sur 6 ans. Ce plan d’action s’appuie notamment sur les plans français et mathématiques, qui comportent une déclinaison propre aux professeurs exerçant en école maternelle et permettent, en tant que de besoin, la constitution de constellations spécifiques aux enjeux du cycle 1 et de la préparation de l’entrée au CP. Les formations didactiques font le lien avec le développement de l’enfant et les conditions de son bien-être.

Les heures de formation comprennent nécessairement un volet de renforcement des connaissances didactiques en mathématiques et en français, et un volet dédié à l’éducation physique et sportive, les autres domaines pouvant également faire l’objet de modules de formation. Elles comprennent également un volet relatif à la progressivité des apprentissages sur tout le cycle et à la continuité avec le cycle 2 en lien avec l’analyse de pratiques pédagogiques en classe.

En complément de ces actions de formation, toutes les modalités de partage et de mutualisation des pratiques professionnelles sont envisagées selon les priorités définies par le recteur et le Dasen au regard des points d’appui et de progressions constatés dans son académie et son département, et selon les possibilités en termes d’organisation des services.

Développer les formations intercatégorielles
La prise en compte des besoins fondamentaux et du développement cognitif des enfants pour construire des apprentissages solides et pérennes en vue de la poursuite de scolarité sera enrichie par le développement de formations conjointes avec les différentes catégories de personnels du ministère, ainsi qu’avec les experts de la petite enfance que sont les éducateurs de jeunes enfants, ainsi qu’avec les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelle (Atsem), sur les modalités de coopération dans la classe et dans l’école.

Aux échelles académique, départementale et de circonscription, les cadres pédagogiques prennent tous les contacts utiles avec les partenaires locaux, développent les conventions de coopération, facilitent l’accès aux professionnels de la petite enfance et de la collectivité aux formations de l’éducation nationale, construisent avec les partenaires des parcours de formation fondés sur l’expertise de chacun des métiers au service d’une meilleure cohérence de l’action pédagogique à destination des élèves.

2. Affirmer la continuité du parcours de l’enfant et de l’élève
Les enfants qui vivent leur première année de scolarisation à l’école maternelle arrivent d’horizons très variés : structures collectives, gardes à domicile, milieu familial. Le plan d’action pour la maternelle envisage ces premières années de scolarisation dans un continuum sécurisant pour les élèves et leur famille.

Développer le partenariat avec la toute petite enfance
L’organisation du système d’accueil et de scolarisation de la petite enfance en France, séparé en deux temps du développement de l’enfant, 0-3 et 3-6 ans, ne doit pas empêcher le travail en faveur du renforcement de la continuité entre ces deux temps de développement de l’enfant. Cette continuité s’appuie notamment sur une connaissance réciproque des métiers, sur un partage d’expérience, sur une mutualisation d’outils au bénéfice d’un renforcement des compétences professionnelles de tous par une meilleure appréhension des enjeux des deux types d’accueil et de scolarisation. Les inspecteurs et inspectrices de l’éducation nationale faciliteront l’organisation de ces échanges entre professionnels du secteur de la petite enfance et les personnels de l’éducation nationale intervenant dans le premier degré.

Les directeurs et directrices des écoles maternelles sont encouragés à organiser des visites croisées de professeurs des écoles de petite ou toute petite section en établissement d’accueil des jeunes enfants (EAJE) d’une part et d’éducateurs de jeunes enfants au sein de leurs écoles d’autre part. Ces visites croisées seront fondées sur des observables communs, élaborés conjointement entre les professionnels et liés notamment au développement des jeunes enfants.

Dans le prolongement de cette démarche, les directeurs et directrices, sous le pilotage des inspecteurs et inspectrices de circonscription et en lien étroit avec les collectivités territoriales, sont invités à s’appuyer sur les possibilités offertes par le CNR - « Notre école, faisons-la ensemble » pour consolider, promouvoir et innover afin de favoriser des transitions souples, notamment en développant des dispositifs passerelle.

Renforcer le partenariat avec les familles
L’école maternelle joue un rôle essentiel dans la construction de la relation école-famille, dans la mesure où, avec elle, les parents apprennent à devenir parents d’élèves. Ainsi, le plan d’action pour l’école maternelle conforte la coopération des parents d’élèves avec l’équipe pédagogique pour mieux appréhender le parcours scolaire de leur enfant et concourir à sa réussite.

La première réunion de parents demeure l’occasion pour le directeur ou la directrice de l’école de présenter l’ensemble des adultes amenés à travailler dans l’école auprès et avec les élèves : professeurs, agents territoriaux, animateurs, accompagnants des élèves en situation de handicap et des autres personnels intervenant dans l’école. Chacun présente explicitement son rôle et la complémentarité de son action avec celle des autres professionnels dans la journée des jeunes écoliers.

Les directeurs et les directrices d’école prennent attache auprès des partenaires identifiés (protection maternelle et infantile, crèches, etc.) pour organiser la première rencontre avec les parents avant la rentrée scolaire. Selon les possibilités locales, des temps d’adaptation sont mis en œuvre au mois de juin précédant la première scolarisation.

Au-delà des échanges informels quotidiens qui participent de la connaissance de l’école et de la construction de la relation école-famille, les directions d’école organisent, avec les équipes, dans le cadre des obligations règlementaires de service des professeurs des entretiens individuels dès les premières semaines de l’année solaire avec les parents d’élèves de toute petite section (TPS) et de petite section (PS). Ces rendez-vous permettent l’expression des observations croisées de chacun des adultes intervenant auprès de l’élève sur son adaptation à l’environnement, sur ses besoins et sur ses premiers acquis scolaires. Ils sont aussi l’occasion d’expliciter des codes de fonctionnement de l’école. Ils visent à rassurer les parents dans ces premières semaines, qui constituent pour nombre de familles une première séparation.

En plus de la réunion de rentrée, les parents bénéficient également de rendez-vous individualisés, a minima pour des bilans intermédiaires et de fin d’année de restitution des acquis des élèves. Ces rencontres sont complétées autant que nécessaire selon les situations et les besoins rencontrés.

À l’école maternelle, dès la petite section, évaluer régulièrement les acquis des élèves permet au professeur de réguler son enseignement et de proposer des activités adaptées aux besoins individuels qu’il identifie. Cette évaluation s’effectue principalement par l’observation des élèves par le professeur lors des différentes situations d’apprentissage.

Garantir une transition efficace avec le cycle 2 et l’école élémentaire et plus particulièrement entre la grande section et le cours préparatoire
La stratégie académique pour l’acquisition des savoirs fondamentaux s’appuie sur les travaux du conseil académique des savoirs fondamentaux.

Les inspecteurs et inspectrices chargés de circonscription prévoient un temps de travail dédié lors d’un conseil de directeurs qui se tient le plus tôt possible au cours du premier trimestre de l’année scolaire afin d’analyser les résultats aux évaluations nationales de la circonscription.

Chaque directeur ou directrice reçoit par ailleurs les résultats de son école avec les éléments comparatifs utiles par rapport aux écoles de même profil de la circonscription, du département et le cas échéant du niveau national.

À l’appui de ces éléments, les équipes de circonscription organisent un temps de travail avec la direction ou un réseau de directions d’écoles afin d’analyser les résultats aux évaluations nationales et de déterminer des axes de travail prioritaires constitutifs du projet d’école qui seront travaillés dans le cadre des conseils de maîtres et de cycle, mais aussi dans le cadre de l’offre de formation continue.

La mise en perspective des résultats aux évaluations nationales de début de cours préparatoire (CP) avec les attendus de fin de grande section (GS) d’une part et avec ceux de fin de CP en français et en mathématiques d’autre part est essentielle pour favoriser une transition réussie des élèves de l’école maternelle vers l’école élémentaire par une réponse pédagogique individuelle et collective qui permettra à tous les élèves d’atteindre les objectifs de réussite scolaire.

L’analyse partagée de ces attendus et résultats permet d’établir un continuum dans le suivi des élèves et de mieux connaître leurs besoins, par une meilleure appréhension commune des enseignements dispensés en maternelle et en cycle 2, notamment en ce qui concerne l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et des mathématiques. Elle permet également d’améliorer l’évaluation des acquis des élèves par les professeurs de l’école maternelle, notamment en grande section, et de développer une culture commune de l’évaluation.

À cette fin, les directeurs et directrices des écoles maternelles et élémentaires organisent, au moins une fois par an, des conseils en commun : ils y associent prioritairement les professeurs de grande section et de CP afin de déterminer les priorités pédagogiques qui seront plus particulièrement travaillées conjointement.

Ce travail conjoint d’analyse des progressions attendues des élèves, de leurs acquis et de partage des outils didactiques est nécessaire afin d’améliorer les conditions de réussite de l’entrée des élèves en CP.

Pour le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, et par délégation,
Le directeur général de l’enseignement scolaire,
Édouard Geffray

Extrait de education.gouv.fr du 12.01.23

 

Sylvie Plane : Maternelle : une occasion manquée
L’annonce d’un plan pour l’école maternelle a provoqué des craintes, comme à chaque fois qu’un ministère annonce des mesures à venir, mais il a aussi suscité aussi des espoirs car ce secteur d’enseignement mérite que les décideurs institutionnels s’y intéressent. Cette confiance – certes très prudente – dans les décisions à venir était confortée par l’estime que beaucoup portent au nouveau ministre de l’Éducation, que son expérience en tant que chercheur en sciences humaines – même s’il n’est pas spécialiste du domaine – devait préserver de la croyance qu’avait son prédécesseur dans les vertus qu’aurait l’application à un problème complexe d’une solution toute faite. Et l’école maternelle est précisément un secteur de l’éducation délicat et complexe dont les problèmes ne peuvent se résoudre à coup de décisions monomaniaques.

« On ne s’y prend jamais assez à l’avance pour stresser les parents d’enfants de trois ou quatre ans »

Consacrer une réflexion à la formation des enseignants de maternelle était chose utile : on sait que la formation initiale des enseignants du primaire est soumise à tant de contraintes que l’enseignement en maternelle y est peu traité. Or c’est un niveau d’enseignement qui demande beaucoup de finesse et de capacités d’analyse, et qui relève de connaissances spécifiques.

La note de service se propose de répondre au déficit de formation initiale au moyen d’un plan de formation continue sur six ans. Trois points cruciaux sont évoqués dans cette note : le lien de l’école maternelle avec les autres instances s’occupant des jeunes enfants, la formation que reçoivent les élèves et la formation des enseignants.

L’importance du lien entre l’école maternelle et les autres instances éducatives était soulignée dans les programmes 2015 qui insistaient sur la nécessaire transition entre les différents lieux d’accueil du jeune enfant. La note de service en tient compte et prévoit des rencontres des enseignants avec les parents. Il y sera notamment question d’évaluation, de bilan. On ne s’y prend jamais assez à l’avance pour stresser les parents d’enfants de trois ou quatre ans. Il est prévu également des formations communes entre les enseignants et les différents personnels de la petite enfance et des visites réciproques des lieux d’éducation. Pourquoi pas ? Cela dit, il s’agit juste de la connaissance des instances concernées et de leur mode de travail et non pas de continuité dans la prise en charge des enfants eux-mêmes. Notons qu’il n’est fait aucune allusion aux ludothèques. Mais il est vrai que le jeu n’a pas sa place dans l’école maternelle telle que la note de service l’évoque : l’important c’est de préparer les élèves au CP.

 » Tous les savoirs que la recherche en éducation, en linguistique, en psychologie a développés sont passées à la trappe »

Dans cette note de service, la formation que doivent recevoir les élèves de maternelle, et qui dessine les contenus de la formation didactique que recevront les enseignants, porte sur deux points, l’un improprement appelé « langage », l’autre appelé « notions de mathématiques ». Une évocation de l’EPS apparait également au détour d’un paragraphe portant sur les heures de formation. Le « langage » est réduit à l’apprentissage du vocabulaire et à celui des associations graphèmes-phonèmes dans la perspective de préparer aux épreuves d’entrée de CP : on va pouvoir recycler dans la formation des enseignants le petit livre vert (vocabulaire) et le petit livre orange (lecture) publiés sous Blanquer. En revanche, il n’est pas question de littérature de jeunesse, d’entrée dans l’écriture, d’entrée dans la compréhension des récits, de développement des compétences de communication… Tous les savoirs que la recherche en éducation, en linguistique, en psychologie a développés sur la manière dont le langage du jeune enfant se développe, sur l’importance du jeu et des apprentissages informels, tout cela est passé à la trappe. Alors que de nombreux travaux de recherche se sont intéressés à la diversité des pratiques employées par les enseignants de maternelle, notamment en matière d’étayage, de recours à l’exemple, de définition des tâches et ont montré leurs intérêts et leurs limites, la note de service considère, à l’instar du ministère précédent, qu’il existe UNE bonne pratique, et que la formation des enseignants doit s’employer à faire adopter.

Un protocole d’entreprise

La note de service développe des aspects administratifs et en le faisant elle est dans son rôle. Mais en lisant ce texte, on a l’impression qu’il s’agit d’un protocole d’entreprise avec des responsables de secteurs qui devraient encadrer des responsables de succursales de façon à ce que tous les agents exécutent bien les mêmes gestes au même moment. Ajoutons que le texte est ponctué régulièrement par un mantra qui rappelle le « Conseil National de la Refondation » auquel sont censé participer les directeurs et directrices d’école, dans des concertations à leur échelon. Ce texte est aussi l’occasion de découvrir une nouveauté, le « Conseil académique des savoirs fondamentaux », dont la création m’avait échappé.

Au moment où la Corée constatant les dégâts causés par la précocité de la pression scolaire revoit son dispositif scolaire, il est paradoxal que le nouveau ministre poursuive dans cette voie et ne profite pas de la possibilité d’ouvrir un nouveau chantier pour se débarrasser de l’encombrant héritage que lui a laissé son prédécesseur.

Sylvie Plane
Professeure émérite de sciences du langage Université Paris-Sorbonne
Ancienne vice-présidente du Conseil supérieur des programmes

Extrait de cafepedagogique.net du 12.01.23

 

Pour d’autres commentaires, voir Savoirs fondamentaux en cycle 3, Mathématiques de l’école au lycée : 3 circulaires au BO du 12 janvier 2022. Réactions syndicales et autres

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