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Médiateur scolaire (en éducation prioritaire) : déconstruire la violence du quotidien. Un dossier de France-Culture avec des témoignages audio

22 octobre 2019

Médiateur scolaire : déconstruire la violence du quotidien

Début octobre, un adolescent de 15 ans a été poignardé à mort aux Lilas en Seine-Saint-Denis, en marge d’un cours de sport. Pour tenter d’éviter ces drames, des médiateurs travaillent au quotidien à déconstruire la violence dans des collèges du réseau d’éducation prioritaire.

 Bangaly Bamba, médiateur au collège à Bagnolet, tente de développer les comportements citoyens et de prévenir les conflits

Il y a tout juste deux semaines, Kewi, un adolescent de 15 ans a été tué lors d’une rixe aux Lilas, en Seine-Saint-Denis, en marge d’un cours de sport. Un drame qui survient un an après la mort d’un autre jeune garçon, Aboubakar, 13 ans, lui aussi tué aux Lilas dans une rixe entre bandes. Pour tenter d’éviter ces drames, 72 médiateurs sont déployés dans les collèges du réseau d’éducation prioritaire et les écoles élémentaires qui y sont rattachées. Leur mission : développer les comportements citoyens et prévenir les violences.

Le calme règne en ce début d’après-midi au collège Jean Jaurès de Pantin. Mais ce n’est pas le cas tous les jours dans cet établissement classé REP+, réseau d’éducation prioritaire. On est ici dans un quartier où se concentrent les difficultés sociales, où la violence fait partie du quotidien et s’invite jusque dans les cours de récréation et les salles de classe. Ce lundi d’octobre, dans son petit bureau aux canapés gris répartis autour d’une table ronde, Marie Cotte, la médiatrice, a choisi de travailler avec des élèves de 5e sur la communication non-violente.
Autour de sa table ronde, Marie Cotte, médiatrice au collège à Pantin, fait réfléchir les élèves à la communication non violente
Autour de sa table ronde, Marie Cotte, médiatrice au collège à Pantin, fait réfléchir les élèves à la communication non violente• Crédits : Rosalie Lafarge - Radio France
Une personne de confiance

"Dans ces séances là, on aide les autres et les autres nous aident, cela permet d’avoir moins de conflit avec les camarades", expliquent des élèves. "Si je ne me sens pas bien, je sais que je peux aller la voir et lui faire confiance, elle est plus concentrée sur nous que sur les études, elle fait attention à nous, c’est un peu comme un psy, on peut lui parler de tout ce qu’on a au fond de nous", poursuivent-ils. "_Il y a beaucoup moins de bagarre depuis qu’elle est là, parce qu’_elle a su donner des conseils sur le fait qu’il ne faut pas se taper, mais plutôt discuter", ajoutent encore deux garçons.

- J’ai observé des jeux assez violents.
Marie Cotte, médiatrice

Elle, c’est donc Marie Cotte. Diplômée de médiation sociale, à 46 ans, cette ancienne assistante d’éducation au franc-parler naturel est devenue médiatrice en milieu scolaire. Elle est arrivée au collège Jean Jaurès fin mai. Et son travail a commencé par un mois d’observation. "J’ai observé des jeux assez violents, ils sont assez violents dans leurs interactions. On a l’impression que c’est naturel pour eux. Et pourquoi ils sont violents, ils ne savent pas répondre", explique la médiatrice.
Une place particulière qui libère la parole

Elle a donc choisi d’axer son travail sur la prévention. Et sa place particulière lui a permis de gagner rapidement la confiance des élèves. "Je suis souvent dans la cour, dans les couloirs, je ne suis pas l’institution, et le fait d’être impartiale, neutre, tenue à la confidentialité, de ne pas sanctionner, cela libère la parole", souligne Marie Cotte. Mais la confidentialité a ses limites : quand les problèmes dépassent son cadre déontologique et que l’élève est en danger, elle est tenue de répéter certaines informations.

Selon la médiatrice, son travail porte ses fruits :

Quand j’ai en médiation des élèves qui se sont battus et quand je leur explique quelle est la solution et comment on peut arriver à interagir différemment, ils comprennent. Ils ne deviennent pas forcément les meilleurs amis du monde mais ils arrivent à se respecter en sortant du bureau et ça tient. Je les amène vraiment à la réflexion, en leur demandant comment tu aurais pu agir différemment, quelle est la conséquence de ton acte maintenant, que va-t-il arriver après. Et cela les fait réfléchir. C’est beaucoup un travail de réflexion sur eux-mêmes et la solution finit par venir d’eux-mêmes.

Des établissements ciblés en fonction du climat scolaire

Aujourd’hui en France, entre 40 000 et 60 000 élèves sont concernés par ce dispositif. Des Hauts-de-France à la Guyane, en passant par Rennes, Nantes, ou la région parisienne. Un réseau chapeauté, au niveau national, par l’association France Médiation dont Laurent Giraud est le directeur. "On est _obligatoirement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans des établissements qui sont en REP+ ou en REP_, assure Laurent Giraud. Dans le développement actuel, on est aussi sur des sites qui sont en cité éducative. Les établissements sont choisis en fonction du climat scolaire et sur proposition des structures associatives. Evidemment, l’établissement doit être volontaire, sinon il n’y aura pas de projet".

Le projet de la médiation à l’école est né de la question du climat scolaire, selon Laurent Giraud : "Quand on a commencé des expérimentations en 2012, c’était vraiment le cœur du projet. Mais aujourd’hui, si on veut sortir de cette médiation réparatrice et être sur une médiation plus éducative, je pense que la place qui va être donnée au développement des compétences psychosociales des enfants, leur redonner confiance, savoir être dans un collectif, c’est aussi important. Parce que quand vous allez travailler sur ces compétences chez l’enfant, sur les questions de respect, de citoyenneté, de confiance en soi, de fait vous travaillez sur la question du climat scolaire, des violences et du harcèlement".

Laurent Giraud, directeur du réseau France Médiation

"Si on arrive à faire en sorte que les enfants conscientisent que l’autre peut être une source de richesse, je pense qu’on aura gagné". Laurent Giraud

Quand vous faites comprendre à un enfant qu’il peut faire du mal à un autre enfant rien que par la parole parce que la parole peut tuer, vous travaillez de manière beaucoup plus forte parce qu’il conscientise ces questions là et vous travaillez forcément sur le climat scolaire.
Laurent Giraud, France Médiation

Éviter les conflits en développant les comportements citoyens et la culture du dialogue : voilà donc le premier axe de la médiation en milieu scolaire. Gérer ces conflits quand ils naissent malgré tout, c’est l’autre volet du travail des médiateurs. Et l’intérêt de leur action, de ce côté-là, est qu’elle dépasse les murs du collège. Le médiateur n’intervient pas seulement dans la cour ou les couloirs. Il est aussi présent aux abords de l’établissement.

La médiation dépasse les murs du collège

Nous voici désormais à Bagnolet, devant le collège Travail Langevin. Un grand bâtiment de briques rouges où sont scolarisés un peu plus de 500 élèves et où l’on retrouve le médiateur, Bangaly Bamba, à l’heure de la sortie. "C’est une heure de grande affluence et mon but est d’accompagner les élèves vers le chemin qui les mène à leur domicile", raconte celui qui préfère se faire appeler Bamba. Il essaie de faire évacuer les lieux pour éviter les attroupements qui peuvent "aboutir à des chamailleries ou des bagarres". (...)

Extrait de franceculture.fr du 18.10.19

 

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