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François Dubet fait des propositions "brutales" sur le recrutement et la formation des enseignants, notamment dans les établissements difficiles. Le commentaire d’un prof en ESPE

17 février 2016

Additif du 03.03.16 :
Le recrutement des enseignants en question. Corrélat au pavé dans la mare de François Dubet

[...] Cependant, une donnée n’est pas introduite dans l’entretien : le poids de l’opinion publique. En effet, il suffit d’observer sinon les unes au moins les pleines pages de certains quotidiens parisiens pour constater le degré de tension que fait atteindre une classe sans enseignant. D’où la volonté du Ministère en période de vaches maigres – le besoin d’enseignants dans certaines académies est réel – et de crise des vocations de ratisser large par le biais de concours d’évidence à difficulté variable en fonction de la géographie du recrutement.

Pris entre le marteau et l’enclume, le Ministère opte par défaut pour la politique du moins pire ou, si l’on préfère, pour celle qui fait le moins de dégâts en terme d’image politique : faire qu’à la rentrée chaque classe ait un enseignant en face d’elle.Cependant, une donnée n’est pas introduite dans l’entretien : le poids de l’opinion publique. En effet, il suffit d’observer sinon les unes au moins les pleines pages de certains quotidiens parisiens pour constater le degré de tension que fait atteindre une classe sans enseignant. D’où la volonté du Ministère en période de vaches maigres – le besoin d’enseignants dans certaines académies est réel – et de crise des vocations de ratisser large par le biais de concours d’évidence à difficulté variable en fonction de la géographie du recrutement.

Extrait de ecoledeslettres.fr du Le recrutement des enseignants en question

 

Comment en est-on arrivé à recruter des profs avec 4 de moyenne au concours ? Les réponses de François Dubet, sociologue de l’éducation, qui propose un recrutement à bac+1 puis une formation jusqu’à bac+5.

[...] Aujourd’hui, quand les enseignants parlent d’eux-mêmes collectivement, c’est pour dire  : « Nous souffrons, nous ne sommes pas reconnus, nous sommes méprisés, nous avons un métier de chien, c’est extrêmement difficile, nous sommes soumis à la violence »... L’image qui s’est répandue, c’est que tous exercent dans des collèges de ZEP violents, ce qui est rarement le cas.

[...] On a commis une erreur. On est passé de l’idée, juste, qu’il faut que les enseignants aient un niveau bac+5 à l’idée, fausse, qu’il faut donc les recruter à bac+5. Ce sont deux choses qu’on a eu le tort de confondre.

J’ajoute que si l’on recrutait à bac+1 ou bac+2, on aurait des chances de recruter de bons élèves d’origine populaire. Parce que des bons élèves d’origine populaire, on en trouve à bac+1, mais ils ont presque disparu à bac+4. Ils n’ont pas survécu dans le système : il faut tenir  ; quatre ans d’études, c’est long.

[...] Je vois mes propres étudiants qui passent le Capes. Ils sont là, ils passent la licence, ils arrivent en maîtrise et se demandent ce qu’ils pourraient bien faire. Et souvent ils choisissent instit’, parce qu’ils ne quitteront pas la région. Ils regardent aussi le Capes, mais c’est très compliqué  : il y a le risque d’atterrir dans un établissement de ZEP où personne ne veut aller...

[...] Vous dites que le salaire n’est pas déterminant dans les problèmes de recrutement. Ne peut-on pas cependant imaginer que les professeurs travaillant dans les établissements difficiles soient beaucoup mieux payés que les autres  ?

Je suis totalement favorable à cette piste. Mais ce n’est pas si simple. D’une part, si vous faites cela, vous avez 300 000 types dans la rue demain, au nom de l’unité de la fonction publique, l’unité de la République, l’égalité des traitements sur le territoire, etc. On touche là à une vache sacrée.

D’autre part, cela supposerait un changement fondamental du mode d’affectation. Aujourd’hui, il se déroule « à l’aveugle »  : on considère que tous les enseignants se valent  ; l’administration, qui contrôle le recrutement, affecte les enseignants en fonction des postes disponibles. En général, les jeunes vont là où personne ne veut aller.

Ils y vont, ils obtiennent des points, certains se pacsent parce que cela fait des points supplémentaires, puis ils vont rejoindre des endroits plus paisibles. C’est désastreux pour les élèves de ces établissements difficiles  : ils sont victimes à la fois du turn over des profs et ce sont les enseignants les moins expérimentés qui font le boulot le plus difficile.

Si vous voulez changer cette situation, ce qui me semble nécessaire, il faut changer complètement de système. Il faut adopter celui qui est en vigueur dans la plupart des autres pays  : vous avez un titre professionnel (par exemple, professeur d’espagnol) mais c’est l’établissement qui vous recrute. Et certains établissements peuvent avoir des moyens supplémentaires afin de pouvoir vous recruter à de meilleurs conditions financières.

Pour dire les choses de manière brutale   : il faudrait généraliser le système d’affectation en vigueur dans les écoles privées. Mais aucun syndicat n’acceptera un tel changement, à part peut-être le Sgen [Syndicat général de l’Education nationale, ndlr]. Il faudrait pourtant le faire. Nous sommes dans la pire des conjonctures  : on a massifié l’université, il y a du chômage, et on ne parvient pas à recruter les enseignants. Peut-on continuer ainsi  ?

Extrait de rue89.nouvelobs.com du : François Dubet : "recruter les profs à bac+5 ;, c’est une erreur"

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