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SNU : le sénat demande au Gouvernement de surseoir à sa généralisation et relève la faible participation des jeunes issus des quartiers (ToutEduc)

16 mars 2023

SNU : au vu de tous les problèmes non résolus, le Sénat demande au Gouvernement de surseoir à sa généralisation

Le scénario d’une généralisation du SNU hors temps scolaire "présente des faiblesses majeures", estime Éric Jeansannetas, sénateur (groupe socialiste, écologiste et républicain) dont le rapport d’information sur le Service national universel a été adopté le 8 mars par la Commission des finances. Il note que "deux scénarios de généralisation du SNU" lui ont été présentés, généraliser le SNU hors du temps scolaire ou sur le temps scolaire, auquel cas de nombreux séjours de cohésion seraient organisés tout au long de l’année. "Le second a la préférence de la secrétaire d’État", commente-t-il. Il ajoute que "le projet de généraliser le SNU sur le temps scolaire (...) est un signe que le rapprochement du SNU et des armées n’est plus à l’ordre du jour".

En ce qui concerne le premier scénario, "il n’existe ni un nombre suffisant de centres d’hébergement, ni un nombre suffisant d’encadrants en France pour accueillir des centaines de milliers de jeunes sur l’espace de quelques semaines". Mais le second "soulève également de nombreuses interrogations". Il estime donc qu’il convient de "surseoir au projet de généralisation du séjour de cohésion", la première phase du SNU. Et il porte un regard très critique sur les expérimentations en cours, il doute de leur "sincérité". "De nombreuses alertes avaient été émises (...) sur l’impossibilité technique de généraliser le service national universel hors temps scolaire, mais l’expérimentation a été reconduite dans des formes similaires en 2022 et en 2023." Il constate aussi que si 9 jeunes sur 10 se déclarent satisfaits du séjour, leur "représentativité sociale" peut être "améliorée". Faible participation de jeunes issus des quartiers prioritaires de la ville, surreprésentation des jeunes "dont l’un des parents travaille dans les corps en uniforme".

Le sénateur s’interroge aussi sur le cadre juridique du SNU. "Dans le scénario d’une généralisation hors du temps scolaire, une réforme de la Constitution serait nécessaire" puisque l’article 34 ne permet "d’imposer des sujétions aux citoyens que pour des enjeux de défense". Se pose aussi la question des jeunes qui refuseraient le SNU "et de ceux qui ne respecteraient pas certaines règles liées à la vie dans les centres". Les problèmes de discipline ne se posent pas dans les mêmes termes avec des jeunes volontaires et des jeunes qui seraient contraints de participer au séjour. Éric Jeansannetas pose aussi la question des jeunes étrangers qui "n’ont aujourd’hui pas le droit de participer au service national universel", ce qui "va à l’encontre de l’objectif de cohésion sociale" que se fixe le SNU.

Dans le scénario d’une généralisation sur le temps scolaire, "une loi serait probablement nécessaire", même si l’obligation de participer au séjour de cohésion se retrouvait alors "mêlée avec l’obligation scolaire", laquelle ne concerne pas les jeunes de plus de 16 ans. Or nombre des élèves de seconde ont plus de 16 ans. Les séjours du SNU ne pourraient être assimilés à des sorties scolaires, celles-ci "ne sont obligatoires que lorsqu’elles s’inscrivent sur le temps scolaire au sens strict, c’est-à-dire qu’elles se déroulent au même moment que les cours". Enfin, la mise en place de deux semaines de séjour de cohésion "reviendrait à retrancher autant d’heures de cours alors que le code de l’éducation prévoit que "l’année scolaire comporte trente-six semaines".

Autre sujet d’interrogation, les encadrants et leurs conditions de travail, avec un nombre d’heures bien supérieur au maximum légal. "Il n’est pas certain que les encadrants soient en mesure d’effectuer, par exemple, 8 séjours de cohésion au cours d’une année." Il faudrait de plus les recruter et les former "longtemps à l’avance", et leur accorder un statut "qui leur permette d’être investis dans l’organisation du séjour de cohésion tout au long de l’année". S’y ajoute la question de la disponibilité des centres d’hébergement. "il n’existe plus aujourd’hui de casernes ou de lieux susceptibles d’accueillir un grand nombre de jeunes." Quant à la construction de nouveaux centres, elle "serait difficilement justifiable alors que le nombre de places d’hébergement actuelles n’est pas suffisant pour accueillir l’ensemble des personnes sans-abris ou qui ont besoin d’un toit en urgence".

Dans l’hypothèse hors temps scolaire, on pourrait avoir recours aux internats scolaires qui comptent officiellement 220 000 places, "mais ce nombre doit être fortement relativisé" et il est vraisemblable "qu’il faille diviser ce nombre par deux, voire davantage, pour obtenir le nombre de places réellement utilisables pour un séjour de cohésion". Or ce sont 210 000 à 280 000 jeunes qu’il faudrait accueillir par période de séjour. Dans l’hypothèse d’une généralisation sur temps scolaire, les centres de vacances pourraient accueillir des séjours, mais là encore, leur nombre est insuffisant et leurs capacités sont insuffisantes. Beaucoup devraient être mis aux normes et leur rénovation a un coût "qui n’est chiffré nulle part".

Le coût du SNU pose d’ailleurs question. En 2021, il a été de 2 723 € par jeune, au lieu des 2 492 prévus, notamment du fait des 7 302 jeunes qui ont validé leur dossier mais qui ont finalement annulé leur présence au séjour de cohésion, "ce qui représente un taux de 22,5 % d’annulation" : "Les coûts du service national universel généralisé à l’ensemble d’une classe d’âge sont impossibles à déterminer précisément, mais ils seraient probablement supérieurs à 2 milliards d’euros", de l’ordre de 2,4 à 3,1 milliards d’euros.

Éric Jeansannetas recommande également de renoncer à la seconde phase du SNU, la MIG (mission d’intérêt général) au profit de sa phase 3, l’engagement volontaire sur plusieurs mois. Il constate que, pour la cohorte de 2022, seuls 10 % des jeunes (3 400) l’ont validée, que 2 300 sont en train de la réaliser, que 12 400 d’entre eux sont "en attente de validation de leur candidature ou de démarrage de leur mission", que 13 400 jeunes n’ont pas déposé de candidature tandis que "700 volontaires se sont désistés du dispositif". D’ailleurs comment trouver autant de missions sur des temps aussi courts et pour des adolescents aussi jeunes ? Le sénateur ajoute que "l’idée d’un engagement ’obligatoire’ est paradoxale".

Le sénateur propose en revanche que cette phase "d’engagement volontaire" soit valorisée "via Parcoursup". Et il demande au Gouvernement de "garantir que le Parlement puisse se prononcer sur le service national universel".

Le rapport ici (PDF)

Extrait de touteduc.fr du 14.03.23

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