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« Le concept d’éducation prioritaire, au départ porteur de valeurs républicaines fortes, a participé à ancrer des idées préconçues »
Radouan Raoui, agrégé de mathématiques, montre, dans une tribune au « Monde », comment les zones d’éducation prioritaire, nées dans l’esprit de professeurs passionnés, ont progressivement été dévoyées.
[...] L’éducation prioritaire est le résultat d’un long cheminement de pensée débuté durant les années 1960 par des professeurs expérimentés et passionnés de Gennevilliers (Hauts-de-Seine), qui a abouti dans la foulée de l’élection de François Mitterrand, en 1981. Inspirée du système anglo-saxon, elle a été adaptée, car la distinction ethnique, présente en Angleterre ou aux Etats-Unis, n’est pas conforme aux principes républicains français.
[...] Durant les années 1980, l’idée a évolué pour associer présence d’enfants étrangers ou assimilés comme tels et problèmes en tous genres : gestion de classe, niveau des élèves, manque d’engagement des parents. En 1997, seize ans après la création de l’éducation prioritaire, on pouvait lire dans le livret d’accueil des jeunes professeurs stagiaires de l’Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) : « Les jeunes enseignants sont souvent nommés dans des quartiers populaires où la présence des enfants issus de l’immigration est plus visible qu’ailleurs (…). Les différences culturelles entre les enseignants et leurs élèves sont-elles devenues telles que la transmission des connaissances soit remise en cause ? » Le lien entre immigration, différences culturelles et apprentissages était alors déjà établi.
[...] Ainsi, le concept d’éducation prioritaire, au départ porteur de valeurs républicaines fortes, a participé à ancrer des idées préconçues éloignées de l’idéal républicain. Il n’a par ailleurs jamais montré de plus-value dans le temps. Plusieurs pistes à l’étude ont été annoncées très récemment, contribuant à maintenir le dispositif : le recrutement des enseignants par les directeurs d’écoles de REP+ (réseau d’éducation prioritaire renforcé), la contractualisation des établissements avec leurs rectorats, la restriction dans la loi de finances 2021 de la revalorisation salariale aux seuls REP+ de l’éducation prioritaire, pour recentrer et concentrer les efforts budgétaires.
Le dispositif mis en place à Toulouse est plus que prometteur et permet de remettre en question l’existence même de l’éducation prioritaire. Une telle initiative pourrait être reproduite en plusieurs endroits, mais nécessiterait une adaptation pour un territoire aussi vaste que la Seine-Saint-Denis. Toutefois, elle permet de réaffirmer haut et fort l’importance des principes républicains que porte l’école et que l’on retrouve dans le premier article du code de l’éducation : l’intégration de tous à la société et aux valeurs françaises par l’école.
Extrait de lemonde.fr du 11.01.21
Notes du Quotidien des ZEP :
Radouan Raoui est aussi IPR
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