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Un collège de ZEP en péril à Orléans (Le Monde)

2004

Extrait du « Monde » du 30.06.04 : un collège de ZEP en péril à Orléans

Peut-on sauver le collège Joliot-Curie, "en état de catastrophe scolaire" ?
Les traces de l’agression ont disparu sur la façade, mais elles restent dans les têtes. Au collège Joliot-Curie, à Orléans, classé en zone d’éducation prioritaire (ZEP), situé en bordure du quartier de l’Argonne, réputé sensible, il s’est déroulé, voilà seize mois, un acte de délinquance hors norme. L’établissement a été attaqué à la voiture-bélier, le 4 mars 2003 vers 3 heures du matin. Un geste de "rancœur contre le système éducatif", avait tenté d’expliquer la principale, Odile Masson, qui a quitté depuis l’établissement.
Un acte de vandalisme, resté non élucidé, mais qui traduit la déshérence de ce collège, qui meurt à petit feu depuis plusieurs années. De 1997 à la rentrée 2003, Joliot-Curie est passé de 520 à 320 élèves. En raison de la baisse de la démographie, mais aussi de la multiplication des dérogations à la carte scolaire, qui atteint ici des chiffres record. A la rentrée 2003, les demandes de dérogation se sont élevées à 88. Finalement, 49 demandes ont été accordées. La population fuit l’établissement, déployant d’ingénieuses "stratégies de contournement", selon le syndicat SGEN-CFDT. "Les enfants partent dans le privé. Il n’y a plus de mixité sociale", dénonce Jean-Pierre Gerbal, un parent d’élèves de la FCPE, qui estime le collège en "état de catastrophe scolaire". 80 % des élèves qui restent appartiennent à des familles défavorisées. En dépit du travail des enseignants, le collège bat des records également en matière d’échec scolaire. "A dix minutes à pied du centre-ville, c’est un ghetto scolaire au vu et au su de tous : responsables politiques et de l’éducation nationale", regrette M. Gerbal.
Le conseil général du Loiret a prévu de réhabiliter l’établissement. Les travaux seront achevés au mieux à la rentrée 2007. Pour mettre un terme à une situation d’"apartheid scolaire", un collectif de parents d’élèves et d’enseignants, dont font partie la FCPE et le SGEN-CFDT, propose une solution radicale, qui a été votée au conseil d’administration : la fermeture du collège, la redistribution des élèves dans les autres établissements de la ville, qui ne font pas le plein, afin qu’ils réapprennent la mixité, et la reconstruction totale du collège, en lien avec la rénovation du quartier, qui est programmée par la mairie.
Impossible, répondent les autorités. "Abandonner un quartier et le service public de l’enseignement, c’est inacceptable", répond Gérard Salin, inspecteur d’académie, qui estime que la place manquerait dans les autres collèges d’Orléans. "Il n’y a aucune volonté d’affronter le réel. Pour les responsables, il n’y a qu’un modèle d’école républicaine. Si cela ne va pas, tant pis", rétorque M. Gerbal. A la rentrée 2004, le nombre des demandes de dérogation devrait baisser, fait encore remarquer l’inspecteur. "J’ai eu 41 demandes. Je n’en ai accepté que 12, des cas socialement douloureux. Nous ne sommes pas des brutes", précise M. Salin. "Mais des parents ont dû se censurer et inscrire leurs enfants dans le privé", reconnaît l’inspecteur, qui ne veut pas dramatiser. "Tout n’est pas négatif dans ce collège, ajoute-t-il. Je fais le pari qu’on peut remonter la pente. On va renouveler les équipes enseignantes." Le collectif est moins optimiste. "Pourquoi les parents changeraient-ils leur attitude de défiance, qui est fondée sur du réel et non sur des préjugés ?... Quel responsable local met ses enfants dans un collège ZEP ?", interroge-t-il.

Régis Guyotat

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