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LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES
AU MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE
Rapport public thématique
Cour des comptes, Octobre 2024, 126 p.
Extraits concernant l’éducation prioritaire
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1 - Des disparités territoriales entre académies et en leur sein
[...] L’académie d’Aix-Marseille illustre également ce déséquilibre, entre les deux départements alpins et les Bouches-du-Rhône, et au sein de ce département, entre Marseille, qui concentre des réseaux d’éducation prioritaire, et le reste du département. Des contraintes multiples en résultent, en termes d’affectation des enseignants et de gestion des mobilités.
Les académies de Paris et de Corse présentent, à certains égards, des traits similaires, qui les distinguent assez nettement des autres académies.
Dans le premier comme dans le second degré, la part des enseignants âgés de plus de 50 ans est très supérieure à la moyenne nationale, et parmi les plus importantes du territoire, Antilles comprises28 . L’une des spécificités de l’académie de Corse réside dans le niveau de la dépense d’éducation par élève (public et privé sous contrat), le plus élevé des académies métropolitaines, tous niveaux d’enseignement confondus29, que ne suffit pas à expliquer la présence d’établissements classés en éducation
prioritaire, puisque la proportion des collégiens scolarisés en REP+ est de 4,5 % en Haute-Corse (un collège de 278 élèves), et qu’il n’y en a pas en Corse-du-Sud30. La cause en réside sans doute, d’une part dans la pyramide des âges des enseignants évoquée précédemment, et d’autre part dans le taux d’encadrement des élèves, particulièrement élevé dans les académies de Corse et de Paris.
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Parmi les évolutions récentes des situations de « nonenseignement », celle concernant les personnels de direction, en particulier dans le premier degré et, dans une moindre mesure, celle des personnels exerçant des missions d’inspection, méritent une mention particulière. En effet, alors que les effectifs des enseignants ont baissé de quelque 2 % entre 2017 et 2022, le nombre des enseignants exerçant des missions autres que l’enseignement a, au contraire, augmenté de plus de 11 % sur la même période – secteur public et secteur privé sous contrat confondus, sachant que les enseignants du secteur privé sous contrat occupent en réalité une place marginale dans les effectifs d’enseignants exerçant des missions de non-enseignement.
Deux facteurs principaux expliquent cette évolution : l’augmentation du nombre de classes dans les écoles de l’éducation prioritaire, en raison du dédoublement mis en place en 2017 pour les CP et en 2018 pour les CE1, et les évolutions réglementaires intervenues en 2022, qui ont eu pour conséquence un abaissement des seuils pour
bénéficier de décharges.
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B - Poursuivre l’assouplissement des règles de la mobilité
Il existe des exceptions au mouvement des titulaires présenté supra, progressivement étendues par le MENJ pour permettre de recruter sur profil et sur motivation afin de s’adapter à certains besoins éducatifs : les postes à profil (POP).
Tout d’abord, un mouvement spécifique national est ouvert pour des spécialités du second degré, listées de façon restrictive par un arrêté du ministre (enseignement en sections internationales, artistiques, en classes préparatoires aux grandes écoles, dans certains BTS) : les enseignants sont affectés par la DGRH du ministère après examen par l’inspection générale des dossiers de candidature. Le nombre de ces postes spécifiques a progressé depuis 2012, en particulier dans le champ de l’éducation prioritaire. Stables depuis 2022, les postes spécifiques (1 780, pour 6 270 demandes en moyenne) représentent près de 18 % des postes du mouvement général du second degré.
Ensuite, l’accès aux postes du réseau de l’enseignement français à l’étranger (EFE) (450 postes ouverts chaque année pour les enseignants du premier degré et 600 postes pour les enseignants du second degré, conseillers principaux d’éducation – CPE et psychologues de l’éducation nationale – psyEN) est soumis à un acte de candidature auprès des trois opérateurs de recrutement du réseau112, à une décision de recrutement sur profil et motivation et à une autorisation de détachement accordée par le DASEN (premier degré) ou le recteur (second degré), en fonction des nécessités de
service. La durée de détachement ne peut excéder six ans.
En outre, depuis 2022, est expérimenté un mouvement hors barème sur des postes à profil (POP) requérant une compétence particulière (ex. : maîtrise d’une discipline professionnelle ou d’une langue régionale) ou une aptitude à exercer dans certains contextes : ruraux, isolés (montagne, île), réseau d’éducation prioritaire renforcée, inclusion, établissement avec projet spécifique.
Ce « mouvement POP », ouvert aux enseignants de toute la France qui peuvent chacun exprimer plusieurs vœux, peut constituer un accélérateur de mobilité. Le recteur et le chef d’établissement sont au cœur du processus de recrutement et d’appariement. Les candidats sont classés après examen du dossier de candidature et, le cas échéant, entretien. Les IA-DASEN, informés des vœux et du classement des enseignants de leurs périmètres, n’ont pas la possibilité de bloquer le départ d’un enseignant classé premier sur un poste à profil. Une fois affecté, l’enseignant a l’obligation de rester trois ans sur le poste. À l’issue de ces trois années, cet enseignant reste affecté dans l’académie obtenue.
Chaque académie soumet annuellement une liste de postes à profil à la DGRH, qui en vérifie la cohérence. Depuis 2022, le nombre de ces postes est quasi-stable dans le premier degré (567 POP en 2024) avec un nombre de candidats en baisse (1 670 candidats, soit - 18 % depuis 2022) ; dans le second degré, le nombre de postes à profil a été multiplié par deux (402 POP en 2024) et le nombre de candidats a progressé de 30 % (710 candidats en 2024). Certaines académies proposent un nombre croissant de postes à profil (ex. : 64 à Lyon dans le second degré en 2024), d’autres en publient un
nombre très restreint (ex. : Corse) en fonction de leur intérêt et de leur dialogue social, les organisations syndicales étant réticentes aux mobilités hors barème. Selon la DGRH, seule la moitié des postes à profil est pourvue chaque année, pour trois raisons principales : le manque de visibilité du dispositif, le manque d’habitude des enseignants de présenter une candidature, le manque d’attractivité de certains postes et académies.
Les postes à profil constituent une expérimentation intéressante en tant qu’alternative au mouvement sur barème, système rigide et impersonnel vecteur de frustration et d’incompréhension. Ils apportent de la souplesse à ce système et permettent de différencier les parcours et de mieux valoriser les compétences et l’engagement des agents. L’évaluation de cette expérimentation pourrait servir de base à une réflexion sur la pérennisation et la promotion de ce dispositif, sur son éventuel élargissement, voire sur des modalités renouvelées d’affectation, avec prise en compte des compétences et de la motivation, permettant d’améliorer l’adéquation des profils aux postes113 [...]