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L’enquête Talis : climat scolaire et ségrégation dans les collèges en France (Depp et le Café)

20 juin 2019

Talis : L’indiscipline, le mal qui ronge les collèges français
Chaque année, les élèves des collèges défavorisés français perdent une semaine de cours par rapport à leurs camarades favorisés. C’est l’indiscipline qui explique cet écart. En France plus d’un tiers des enseignants des collèges signale des problèmes de discipline, un taux supérieur à la moyenne de l’OCDE (28%). Et qui se concentre sur les collèges défavorisés. C’est un des principaux enseignements de l’enquête Talis menée auprès de 3000 enseignants et 200 principaux de collège par l’OCDE. Talis pointe la ségrégation sociale dans les collèges et les conditions d’affectation des enseignants en France. Les enseignants eux se déclarent de moins en moins compétents pour faire face.

Une croissance du harcèlement

En apparence tout va bien. 94% des enseignants français déclarent avoir de bonnes relations avec leurs élèves, un pourcentage conforme à la moyenne des 48 pays de Talis. Les enseignants français sont aussi dans la même moyenne d’âge que leurs collègues des 48 autres pays (43 ans).

Mais 27% des principaux signalent des actes d’intimidation ou de harcèlement dans leur établissement, soit le double de la moyenne OCDE. Ce pourcentage a nettement augmenté depuis 2013. Ce qui fait dire à l’OCDE que "ce problème nécessite une étroite surveillance et des mesures". Il faut sans doute aussi prendre en compte une prise de conscience plus importante depuis 2013 et les nombreuses campagnes contre le harcèlement.

10 minutes de perdues à chaque cours

Du côté des enseignants, 71% déclarent devoir fréquemment calmer des élèves contre 65% pour la moyenne OCDE. En moyenne, les professeurs passent 17% du temps des cours à gérer la discipline de la classe, ce qui est au dessus de la moyenne de l’OCDE (13%). Ce temps moyen a augmenté de 1% depuis 2013 ce qui représente, selon l’OCDE, 3 jours de classe de perdu . Il reste environ 75% de temps pour l’enseignement, à comparer avec 80% en Finlande, 79% au Japon ou 86% en Russie. Seulement 5 pays passent plus de temps à rétablir l’ordre en classe que la France parmi la quarantaine de pays qui ont répondu à cette question. Par exemple le Brésil et la Turquie.

Des profs qui n’en peuvent plus ?

Tout se passe comme si les enseignants français baissaient les bras sur ce terrain : 87% déclarent faire respecter les règles de la classe en 2018 contre 98% en 2013. Le sentiment d’être compétent en ce domaine a fortement chuté. Seulement 73% des enseignants français s’en sentent capables. Ils étaient 94% en 2013. 85% des enseignants en moyenne s’en sentent capables dans l’Ocde.

Talis pointe la faible mixité sociale des collèges et la formation

Comment expliquer cette situation difficile et qui se dégrade ? Talis donne des pistes. D’abord les enseignants français ont des classes beaucoup plus hétérogènes que les autres pays. Selon Talis, 42% des professeurs déclarent avoir un tiers des élèves issu de milieu défavorisé, contre 20% en moyenne dans l’OCDE. 32% ont un élève sur dix issu de l’immigration contre 17% dans l’OCDE. L’OCDE pointe nettement un effet ségrégatif dans le système scolaire français qui regroupe les élèves favorisés sur certains collèges.

L’autre effet ségrégatif est au niveau des enseignants. Si 73% des enseignants se sentent capables de contrôler le comportement des élèves, c’est 76% pour les plus expérimentés et seulement 58% pour les débutants. Or la particularité de la France c’est aussi de regrouper les enseignants débutants sur les collèges où le pourcentage d’élèves défavorisés est le plus fort.

Enfin Talis pointe les insuffisances de la formation des enseignants français dans la gestion de la classe. Si juste après les Japonais, ils se déclarent les moins aptes à rétablir l’ordre, c’est aussi qu’ils sont les moins formés à gérer une classe des 48 pays participants. Les enseignants français sont aussi parmi ceux qui demandent le plus de formation en ce domaine (6ème rang).

Une semaine de classe en moins pour les enfants défavorisés

Le résultat se lit dans l’écart du temps d’instruction des élèves. En moyenne les élèves français ont perdu 3 jours de classe du fait de leur indiscipline croissante depuis 2013. Mais l’écart entre les collèges favorisés et défavorisés est plus important. Chaque heure de cours on perd trois minutes de cours de plus dans les collèges défavorisés par rapport aux favorisés simplement pour établir l’ordre dans la classe. Cela fait 7.5 jours de classe en moins par an pour les collèges défavorisés. Des journées de classe manquantes auxquels s’ajouteront, on le sait, les remplacements non pourvus.

Pisa avait déjà montré le lien entre réussite scolaire climat positif dans la classe. Pour l’OCDE il s’agit d’un climat discipliné où les élèves peuvent se concentrer en classe et où les enseignants peuvent proposer un enseignement calme et ordonné. Pour l’OCDE "suivre des classes où l’ordre règne bénéficie à tous les élèves mais davantage aux plus vulnérables". Mais le climat scolaire a aussi à voir avec la façon dont la société organise son école.
François Jarraud

Extrait de cafepedagogique.net du 19.06.19

 

Un climat d’établissement positif
Le climat de l’établissement et de la classe rapporté par les enseignants français reste
proche de celui documenté en 2013. Plus de neuf enseignants sur dix considèrent que les relations entre les élèves et les enseignants sont plutôt bonnes dans leur collège. Ils sont également très nombreux à indiquer qu’il existe une culture de collaboration dans leur établissement (73 %) et que l’équipe s’entraide (85 %). Ces constats sont également partagés par les chefs d’établissement interrogés sur les mêmes pratiques collaboratives prévalant au sein des collèges (81 % et 88 %,respectivement). Notons néanmoins que les enseignants français passent quarante minutes de moins chaque semaine que leurs pairs européens à travailler et à dialoguer avec leurs collègues. Sept enseignants sur dix déclarent que leurs élèves s’efforcent de faire régner un climat agréable d’apprentissage. En revanche, relativement à leurs collègues européens (à l’exception de la Belgique, de l’Espagne et du Portugal), ils sont plus nombreux à signaler des difficultés au niveau de la gestion de classe (bruit, élèves perturbateurs et élèves agités en début de séance), mais l’on ne distingue pas de tendance à la hausse depuis 2013.
Les enseignants en éducation prioritaire décrivent des profils de classe moins propices aux apprentissages, à l’inverse des enseignants du secteur privé : à titre d’exemple, 26 % des enseignants du secteur privé considèrent perdre beaucoup de temps en classe à cause d’élèves perturbateurs, contre 58 % de leurs collègues en éducation prioritaire. Ces écarts ne sont guère surprenants, car les établissements privés et ceux de l’éducation prioritaire accueillent des profils d’élèves différents. Des écarts de même ampleur sont à noter entre les groupes d’enseignants définis
par leur score d’auto-efficacité : 23 % des enseignants dont le score d’auto-efficacité est le plus fort considèrent que beaucoup de bruit perturbe leur classe, contre 44 % pour ceux dont le score d’auto-efficacité est le plus faible.

Extrait de cache.media.education.gouv.fr

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