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Evaluations nationales en CP-CE1 : Roland Goigoux interviewé par le Nouvel Obs et Politis

27 mai 2019

Jean-Michel Blanquer et les statistiques : la grande tambouille

« L’Obs » a enquêté sur les statistiques mises en avant par le ministre de l’Education nationale pour valider ses politiques. Résultat : un manque patent de sincérité.

La tribune mise en ligne sur Mediapart il y a dix jours a déjà eu son petit succès. Son titre est marquant : « Prendre les professeurs des écoles et les journalistes pour des crétins ? ». Son auteur aussi. Roland Goigoux n’est pas n’importe qui. C’est sûrement l’universitaire le plus lu par les instits. Et le meilleur spécialiste français des pratiques enseignantes en primaire. Sa grande étude « Lire et écrire », réalisée entre 2013 et 2015 auprès de 131 classes, est régulièrement citée par la communauté scientifique, toutes chapelles confondues, et ses manuels de compréhension de textes – Lectorino et Narramus – font l’unanimité chez les maîtres et maîtresses.

Depuis deux ans, Goigoux ne disait mot, ou presque. Et puis le chercheur a décidé de quitter son Aventin. L’interview qu’il donne en exclusivité à « l’Obs » précise les critiques émises dans sa longue tribune. Pour lui, le ministre de l’Education, comme tout politique, défend des partis pris idéologiques. C’est son droit. A ceci près que ces partis pris, dans le cas de Jean-Michel Blanquer, ne sont pas assumés : le ministre se cache derrière le paravent de la science et des statistiques pour asséner sa vérité et se soustraire au débat d’idées.

Extrait de nouvelobs.com du 23.05.19

 

Roland Goigoux : « Blanquer usurpe la caution de la science »
Le ministère utilise les résultats des évaluations de CP pour sa propre communication, alerte le spécialiste de l’enseignement de la lecture Roland Goigoux. Dérive scientiste ?

C’est une analyse décapante sur l’utilisation des évaluations de CP par le ministère de l’Éducation. D’abord publiée par le syndicat enseignant du premier degré Snuipp sous le titre « Évals CP : les infox du ministère », le 10 mai (1), elle est signée Roland Goigoux, spécialiste de l’enseignement de la lecture, formateur à l’École supérieure du professorat et de l’éducation et auteur en 2016 du rapport de recherche « Lire et écrire ». Elle lance un véritable pavé dans la mare : Jean-Michel Blanquer aurait utilisé les résultats des évaluations de CP pour justifier ses orientations politiques. « Les premiers résultats sont là », a écrit le ministre de l’Éducation aux enseignants : « Si, en début de CP, 23 % des élèves n’identifiaient que la moitié des lettres et des sons qui leur étaient soumis, ils ne sont plus que 3,3 % au mois de janvier ». Roland Goigoux pointe l’utilisation qui est faite de la science par un ministre qui non seulement n’informe pas les enseignants des changements dans les méthodes censées leur servir, mais utilise ces méthodes pour sa propre communication.

Vous mettez en cause l’utilisation par le ministre de l’Éducation des résultats des évaluations de CP-CE1 en titrant : « Faire mentir les chiffres, en pédagogie aussi ». Sur quoi porte la tromperie ?

Roland Goigoux : Je ne dénonce pas des mensonges du ministère sur des chiffres : les données de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) sur lesquelles il communique sont correctes. Il n’y a donc pas, de ma part, de procès en falsification ou en bidonnage. Ce que je trouve problématique, c’est l’usage qui est fait par le ministère d’un certain nombre d’outils d’évaluation. Il a pris les résultats au début et au milieu du CP pour déclarer : les élèves ont progressé grâce aux politiques mises en œuvre. Au lieu d’assumer des choix politiques, Jean-Michel Blanquer va chercher la caution de la science pour justifier ses décisions. Cette caution scientifique me paraît usurpée : il ne prélève dans les données scientifiques que ce qui l’arrange. C’est plutôt de l’abus de pouvoir.

Qu’est-ce exactement que ce « guide orange » envoyé aux enseignants de CP ?

Les enseignants de CP ont reçu un livre sur l’enseignement de la lecture et de l’écriture connu sous le nom de « guide orange ». Publié en mai 2018, ce guide utilise des résultats consensuels et ajoute une partie extrêmement prescriptive, qui va jusqu’à la description de leçons « modèles ». Jusqu’à présent, les maîtres disposaient de programmes avec des objectifs et d’une relative autonomie pour les atteindre. Les prescriptions du ministère les font revenir au dirigisme d’avant les années 1970, quand les écoles normales étaient chargées de transmettre « la norme ». J’avais sonné l’alerte à la publication de ce guide, mais on ignorait encore si la hiérarchie de l’Éducation nationale allait le porter ou laisser les enseignants en user à leur guise. On a eu la preuve, toute l’année, des multiples injonctions que les corps d’inspection ont fait peser. Le guide orange était le guide à utiliser absolument…

La démarche est très autoritaire, bien que toutes les recherches internationales montrent que les prescriptions descendantes échouent systématiquement à améliorer les apprentissages des élèves tout en démobilisant les enseignants. Avec cet autre problème que le guide orange met en œuvre des techniques d’apprentissage de la lecture assez extrêmes, que je nomme « syllabisme radical ». Ne voulant pas apparaître comme un idéologue, le ministre a déclaré que c’était la science qui les inspirait.

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Extrait de politis.fr du 19.05.19

 

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