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Extrait de « Libération » du 05.10.06 : Les collèges « ambition réussite » échauffent les salles des profs
En Seine-Saint-Denis, le dispositif pour les établissements défavorisés critiqué par le Snes.
Les collèges « ambition réussite », l’une des réformes phares du ministre de l’Education nationale, se mettent en place dans une belle cacophonie en Seine-Saint-Denis, département qui détient le record des établissements difficiles. D’un côté, le Snes, majoritaire chez les enseignants du second degré, dénonce le chaos ambiant et les professeurs supplémentaires promis mais qui n’arrivent pas. D’un autre côté, le rectorat de Créteil, dont dépend le « 9-3 », crie au mensonge et évoque l’inexorable « montée en puissance » du dispositif.
Les collèges « ambition réussite » sont les ex-ZEP (zones d’éducation prioritaire) les plus défavorisés. Selon la réforme, ils devaient recevoir le renfort, à la rentrée, de quatre « professeurs référents », des enseignants expérimentés censés épauler les équipes en place. Chaque collège a défini les profils souhaités : généralement un prof de français et un de maths, et selon les cas, d’anglais, histoire-géo... Des assistants pédagogiques, étudiants affectés à la surveillance, ont aussi été promis.
D’après le Snes-Créteil, il manque encore 14 professeurs référents dans l’académie, qui abrite 21 collèges « ambition réussite » dont 16 en Seine-Saint-Denis. L’académie, qui aurait eu du mal à recruter, aurait fait pression sur des profs en place dans les établissements. Faux, réplique le rectorat : les candidats n’ont pas manqué et sur 84, 82 ont déjà été nommés.
Au-delà de la bataille des chiffres, deux conceptions s’affrontent. Les enseignants du Snes sont résolument hostiles à cette réforme. Ils dénoncent l’apparition de « superprofs » venus régenter les autres, la fin de l’éducation prioritaire avec la disparition annoncée de certains collègues ZEP et la mise en place d’une « école au rabais ». « Il faut arrêter de tout ramener à une baisse des effectifs », plaide le recteur Bernard Saint Girons, « il faut plutôt enseigner autrement pour ces élèves qui ont davantage de difficultés ».
Mauvais oeil.
« La salle des profs est très tendue, explique Natacha Piaget, du collège Claude-Debussy à Aulnay-sous-Bois, on a reçu une professeur référent qui est enseignante de français. Mais elle a dit d’emblée qu’elle ne voulait pas enseigner. Elle est pourtant jeune... Or, en tant que prof référente, elle va toucher des points d’avancement. On récompense donc des gens qui n’enseignent pas ? Du coup, elle traîne dans la salle des profs et on la voit d’un mauvais oeil. De plus, on avait demandé deux profs référents en français. Mais on en a reçu un en arts plastiques. Il fait neuf heures d’enseignement et le reste, des projets art et culture. »
Décharge
Les enseignants du Snes des collèges « ambition réussite » de Seine-Saint-Denis, qui donnaient une conférence de presse la semaine dernière à Paris, ont ainsi tous mis en cause le statut de ces « référents », venus donner des leçons aux autres. « Il faudrait plutôt plus de travail collectif et des heures de décharge pour nous concerter », a précisé l’un d’eux. Ils ont aussi critiqué le fait que ces « superprofs » sont souvent sans expérience et peu au fait de leur mission.
« Tout cela, ce sont des faux procès », réplique Bernard Saint Girons, « les référents du second degré ont en moyenne neuf ans d’ancienneté ». Loin des querelles idéologiques, le recteur assure que tout se jugera dans la pratique. Et cite des exemples déjà encourageants. Au collège Iqbal-Masih, à Saint-Denis, un prof référent d’histoire a lancé un projet sur la citoyenneté où les élèves travaillent sur le règlement intérieur. A Elsa-Triolet, à Champigny, tous les enfants de 6e qui en ont besoin ont deux heures de soutien en maths et en français grâce aux profs référents.
Véronique Soulé
Extrait de « Libération » du 05.10.06 : Du soutien en maths et français
Annoncée le 13 décembre 2005, la réforme de l’éducation prioritaire a créé 249 réseaux « ambition réussite ». Chaque réseau compte un collège classé EP1, associé aux écoles alentours qui l’alimentent en élèves. Au total, 1 000 enseignants « référents » et 3 000 assistants pédagogiques sont mis à disposition de ces réseaux.
Leur mission est d’assurer du soutien, notamment en maths et en français, de proposer des projets, de renforcer le lien avec les parents, des associations et des intervenants, de travailler avec le primaire. Ces profs référents ont été financés sans moyens supplémentaires, mais en prenant une demie heure en cinquième et en quatrième.
Les collèges ZEP, qui ne sont pas « ambition réussite », sont classés EP 2 et EP 3, ces derniers devant réintégrer le circuit normal.