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Publication du rapport Azéma-Mathiot : un COMMUNIQUE de l’OZP

8 novembre 2019

Ce rapport se situe dans une commande passée par le ministre de l’Education nationale concernant les politiques territoriales d’éducation. Rappelons que ce ministre a supprimé le bureau de l’éducation prioritaire dans ses services pour lui substituer un bureau des territoires agrégeant les questions relevant de la ruralité, de l’éloignement scolaire, de l’outre-mer et de l’éducation prioritaire.

 1 - Il n’est donc pas surprenant que le rapport situe ses propositions dans ce cadre en prenant le risque de voir se confondre des politiques publiques très différentes et qui appellent toutes des réponses spécifiques. A ne pas vouloir les distinguer, on risque fort d’entretenir la confusion, de rendre illisibles les politiques publiques engagées et de n’atteindre aucun des objectifs visés.

Pour ce qui relève de l’éducation prioritaire, ce rapport s’apparente beaucoup à celui de la Cour des comptes publié à l’automne 2018, notamment dans la volonté de soutenir la politique engagée pour les Rep+. Mais, à la différence du rapport de la Cour des comptes, le rapport Azéma/Mathiot ne rappelle pas l’importance du référentiel de l’éducation prioritaire, outil de référence de l’élaboration de l’ensemble des projets des réseaux, et n’affirme pas la nécessité d’appuyer le travail ainsi engagé pour mieux le poursuivre. A ce titre, ce rapport apparaît hors sol, ne prenant pas en compte les transformations pédagogiques, éducatives et professionnelles engagées dans de nombreux Rep et Rep+.

 2 - Le souci de continuité des politiques publiques est affirmé à plusieurs reprises par les auteurs. Ce souci est tout à fait légitime et aurait dû les conduire, avant toute proposition de modification, à demander que soit respecté l’engagement ministériel de 2014 de procéder en 2019 à une évaluation générale des projets des réseaux Rep+ et Rep ainsi que de l’ensemble de la carte de l’éducation prioritaire. C’est bien une fois ce travail d’évaluation publique achevé que pourrait s’ouvrir le traitement des réajustements nécessaires de la géographie prioritaire en articulation avec les travaux conduits par le ministère de la Ville.
La décision du ministre J.-M. Blanquer de refuser toute évaluation de la politique de l’éducation prioritaire en traitant par le plus grand mépris les actions et projets engagés par de très nombreux acteurs de l’éducation prioritaire ne peut conduire qu’à délégitimer les politiques publiques. Cette décision éclaire d’un jour particulier la proposition de transférer, en les délabellisant, l’ensemble des Rep aux autorités académiques et aux élus régionaux. Mieux prendre en compte les réalités locales avec plus de souplesse est une préoccupation légitime qui peut très bien se décliner sans bouleverser l’existant. Il est à craindre que, sous couvert d’une revendication de conduite plus girondine de l’action publique, il soit question d’autre chose : un effacement progressif des responsabilités de l’Etat en matière de justice sociale à travers cette délabellisation brutale des Rep.

 3 - Il n’est pas inutile de rappeler qu’en 2011 le ministre Luc Chatel et son bras droit J.-M. Blanquer avaient refusé de prendre en compte l’évaluation des Réseaux Ambition Réussite conduite par leurs propres services pour tenter de lancer le dispositif ECLAIR, qui visait à dynamiter la politique de l’Education prioritaire.
En 2019, l’Education prioritaire appelle d’autres réponses que celles présentées par le rapport Azéma/Mathiot. Elle appelle une évaluation publique, nationale, de l’ensemble des projets des réseaux Rep+ et Rep portant sur des questions majeures pour la réussite de cette politique : l’usage du référentiel et le renforcement des apprentissages fondamentaux, le climat scolaire et la continuité éducative tout au long de la scolarité obligatoire, la formation des personnels, le pilotage de cette politique à tous les niveaux, la gestion des ressources humaines, l’utilisation des moyens supplémentaires engagés.

 

Une nouvelle « réforme » de l’éducation prioritaire ?

Le ministre annonce qu’il « se donne du temps » avant de réformer l’éducation prioritaire, dans la suite des propositions du rapport Azema-Mathiot

Trois remarques préalables s’imposent pour un débat utile.

 Une donnée impressionnante circule pour appuyer l’idée d’une réforme profonde de l’éducation prioritaire : 70% des enfants des catégories populaires seraient accueillis en dehors des REP. C’est oublier que les difficultés des écoles et collèges de certains territoires ne sont pas simplement corrélées avec la proportion d’enfants des classes populaires (ce qui sous-entendrait que l’Ecole de la République ne serait pas capable de les accueillir !) mais avec la concentration sur ces territoires de familles en situation de précarité. Cette précarité ne peut heureusement pas être mesurée par les statistiques disponibles an niveau national, mais ces territoires peuvent très bien être identifiés sur le terrain. La distinction entre REP renforcés et REP ordinaires en découlait. Sa pertinence est d.ailleurs confirmée dans le rapport Azema-Mathiot.

 Le second thème est ressassé, celui des résultats « décevants » de l’éducation prioritaire. C’est oublier que la mission se réfère à des données antérieures à la refondation de 2014, refondation qui était justifiée alors par l’absence de mise en œuvre réelle des principes de l’EP, absence responsable de la médiocrité des « résultats ». C’est pourquoi l’OZP a insisté pour que, conformément à ce qui avait été prévu en 2014, une première évaluation ait lieu 5 ans après 2014. C’est pourquoi aussi il a pris l’initiative d’une enquête faisant remonter l’opinion des acteurs de terrain. Le ministre a par exemple balayé, sans aucune évaluation, une mesure essentielle prise en 2014, le développement du dispositif « Plus De Maîtres Que De Classes », pour financer partiellement une mesure beaucoup plus coûteuse, les dédoublements de classes en CP/CE 1 et bientôt en grande section de maternelle. Les remontées de l’enquête de l’OZP montreront que l’engagement des enseignants dans ce dispositif (PDMQDC) favorisait le travail collectif et l’évolution des pratiques professionnelles, alors que les dédoublements renvoient les maîtres à leur solitude.

 Cela introduit un 3ème thème, oublié dans les médias : « l’entrée par la pédagogie ». Alors que la refondation privilégiait cette entrée et misait sur le travail collectif et sur des moyens de formation affectés dans les réseaux pour développer les pratiques les plus performantes dans le cadre d’un référentiel de l’éducation prioritaire, les évaluations en début de CP et en cours d’année instaurent autoritairement une pédagogie pseudo-scientifique conduisant à une « primarisation » de la grande section de maternelle. Le ministre proclame la réussite de son opération alors qu’une lecture honnête de ces résultats montre au mieux l’absence de progrès.

8 novembre 2019
Le bureau de l’OZP

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