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Jeunesse, éducation populaire, Snu : un rapport sévère de la Cour des comptes (le Café, ToutEduc)

22 avril 2020

La politique jeunesse du gouvernement jugée sévèrement par la cour des Comptes
Tout à ses multiples réformes de l’Education nationale, JM Blanquer a –t-il sous administré la Jeunesse ? C’est par un nouveau référé que la Cour des Comptes manifeste son appréciation négative de la politique de la jeunesse qui est sous la responsabilité de JM Blanquer depuis 2017. La Cour invite à revoir le pilotage de cette politique, notamment les relations avec les grandes associations. Elle souligne l’insuffisance des moyens et du pilotage alors que la Direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (Djepva) doit mettre en place le SNU. Finalement elle invite le gouvernement à investir pleinement JM Blanquer des moyens d’une politique jeunesse et notamment du SNU. Les associations d’éducation populaire pourraient faire les frais de cette réorientation.

Perte de pilotage

Malgré plus de 600 millions de budget, la DJEPVA , intégrée depuis 2017 dans le ministère de l’éducation nationale, est insuffisamment pilotée, estime la Cour des Comptes. " La DJEPVA assure, sans rénovation de sa réflexion stratégique, des interventions nombreuses et mal coordonnées", écrit-elle. " La politique d’accès à l’information des jeunes illustre ce défaut. La direction soutient un réseau d’information généraliste de 1 300 structures qui accueillent environ trois millions de jeunes chaque année. Alors que la coordination et le soutien du réseau relèvent des régions depuis 2014, la DJEPVA labellise toujours ces structures, continue de financer les centres régionaux information jeunesse (CRIJ) et le centre national d’information et de documentation jeunesse (CIDJ), qui a aussi une vocation régionale en Île-de-France, ainsi que l’union nationale de l’information jeunesse (UNIJ)". La Cour recommande de fusionner le CIDJ avec l’UNIJ.

Même critique sur le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse (FEJ) : " l’abondance croissante, au fil du temps, du nombre de projets aidés a provoqué une dispersion des crédits tout en faisant perdre, aux actions soutenues, une exemplarité suffisante pour être reproduite. La Cour recommande son financement par des apports privés. Pour la Cour "la poursuite et les conditions de son activité doivent être réexaminées". Quant au Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (Fonjep) , la Cour critique le soutien régulier aux grandes associations "au détriment des petites et récentes associations de terrain".

Les associations d’éducation populaire dans le collimateur

Car la principale cible des remarques de la Cour, ce sont les grandes associations d’éducation populaire, comme par exemple la Ligue de l’enseignement. Pour la Cour, la DJEPVA " qui dispose de moyens financiers limités, ne parvient pas à les mobiliser de façon sélective pour en faire des leviers de pilotage, particulièrement envers les têtes de réseaux de l’éducation populaire qui n’apportent plus, pour certaines d’entre elles, de plus-value significative aux politiques conduites par l’État". Les conventions signées avec ces grandes associations ont un contenu "décevant : objectifs trop généraux et stéréotypés, peu reliés aux priorités de l’État, outils d’évaluation (bilans, indicateurs) frustres. Les moyens distribués s’apparentent souvent à des aides au fonctionnement intangibles surtout lorsqu’elles bénéficient à des structures en grande difficulté financière dont la représentativité nationale de leur propre mouvement associatif est incertaine".

La Cour recommande de " mener une politique active envers les réseaux nationaux de l’éducation populaire grâce à des conventions pluriannuelles d’objectifs plus opérationnelles et mieux évaluées". Autrement dit renforcer le poids de l’Etat sur les orientations de ces associations qui sont pourtant souvent des alliées fidèles de la politique du gouvernement, par exemple pour le SNU.

Confier le SNU à JM Blanquer

Reste justement le SNU, ce grand projet gouvernemental. La Cour ne remet pas en question la finalité ce cette aventure politique. Elle relève le vide de la fonction de délégué interministériel à la jeunesse : " ni le positionnement, ni les moyens du délégué ne donnent de la consistance à cette fonction… la création, il y a cinq ans, d’un délégué interministériel à la jeunesse ne s’est accompagnée ni de la mise en place d’un service voué à la coordination interministérielle, ni de la recherche active d’une coordination entre les administrations. Le lancement de grands programmes nationaux visant l’engagement civique et citoyen des jeunes nécessiterait aujourd’hui une réelle évolution".

La Cour estime que la montée en puissance du SNU (30 000 jeunes et 30 millions en 2020, 800 000 et de 1.5 à 2 milliards en 2026) a besoin ’un recadrage de la fonction de DIJ. " D’une part, la direction n’est pas actuellement dotée des moyens et des compétences effectives pour piloter un projet de cette ampleur. D’autre part, le rôle du délégué interministériel à la jeunesse, dans le déploiement, n’est pas clairement affirmé alors que le SNU devra être coordonné avec d’autres dispositifs comme ceux du ministère des armées (jeunes sous statut militaire). Enfin, la clarification des rôles respectifs des différents acteurs doit être poursuivie : il serait regrettable que le conseiller du Gouvernement (M Latron), qui n’est pas placé auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, exerce des missions qui fassent double emploi avec celles de la DJEPVA et du DIJ". La Cour recommande de " donner explicitement au délégué interministériel à la jeunesse la responsabilité de la coordination interministérielle du SNU et à la DJEPVA les moyens d’en piloter le déploiement."

Au final, les recommandations de la Cour vont au-delà de la gestion de JM BLanquer. La Cour souligne que le grand projet du gouvernement, le SNU, lui échappe. Elle invite à donner au ministre la gestion du SNU et à celui-ci de casser la politique suivie depuis des années.
F Jarraud

Le référé

Extrait de cafepedagogique.net du 21.04.20

 

SNU, accueils de mineurs, information jeunesse, Fonjep, CPO : le réquisitoire et les interrogations de la Cour des comptes

La DJEPVA était l’une des deux composantes du ministère de la Jeunesse & des Sports. Son rattachement à l’Education nationale "est une opportunité à saisir pour l’État (...) de construire une forte cohérence entre l’enseignement scolaire et l’éducation dite informelle", estime la Cour des comptes qui vient de publier un référé, daté du 24 janvier, sur son action. Elle rappelle que la direction de la Jeunesse, de l’Education populaire et de la vie associative dispose d’une centaine d’agents, qu’elle "s’ appuie sur des services déconcentrés en recomposition, regroupant environ un millier de personnes", et que ses crédits s’élèvent à 660 M€.

La Cour consacre une bonne part de son analyse au SNU, le service national universel pour lequel est prévu "un déploiement complet en 2026", ce qui "est ambitieux au regard de l’importance des problèmes à résoudre". Ceux-ci sont d’ordre juridique "(caractère obligatoire du dispositif, statut du jeune, régime de responsabilité, nature des sites d’accueil), institutionnel (structure de pilotage, rôles respectifs des divers ministères et autorités déconcentrées) et organisationnel (articulation avec le calendrier scolaire, formation des intervenants, recensement et disponibilité des lieux d’accueil, emboitement avec l’engagement volontaire au titre du service civique, saturation des offres pour les missions d’intérêt général)".

Le référé ne donne aucune piste de réponse à ces questions, mais y ajoute celle du coût, 1,5 Md€ à 2 Md€ par an, et s’inquiète de la nomination d’un conseiller du Gouvernement (Patrice Latron, voir ToutEduc ici), chargé de déployer le dispositif et dont les missions pourraient faire double emploi avec celles du DIJ (délégué interministériel à la jeunesse), également responsable de la DJEPVA, laquelle "n’est pas actuellement dotée des moyens et des compétences effectives pour piloter un projet de cette ampleur", alors qu’elle a "bien assumé son rôle de tutelle de l’agence publique chargée de la mise en œuvre opérationnelle" du service civique.

Cette remarque vient conclure une série d’observations qui vont dans le même sens. C’est ainsi que "le contrôle de la sécurité des mineurs en accueils collectifs (avec ou sans hébergement) est trop restreint", avec une visite en moyenne tous les 12 ans. "Il en est de même pour le contrôle des organismes de formation. 176 contrôles ont eu lieu en 2017, moins encore en 2018, soit 144."

La DJEPVA continue de labelliser les structures d’information jeunesse qui relèvent des régions, de financer les CRIJ (centres régionaux information jeunesse), l’UNIJ (union nationale de l’information jeunesse) et le CIDJ. La Cour recommande un "rapprochement de l’UNIJ avec le CIDJ", d’autant que ce dernier "connaît des difficultés financières récurrentes et graves". Elle appelle d’ailleurs à "une recomposition de ce secteur".

Quant au FEJ, le fonds d’expérimentation pour la jeunesse, mis en place en 2009, il "ne dispose plus que de moyens résiduels (...) et ne parvient pas à mobiliser des financements privés et européens" : "La poursuite et les conditions de son activité doivent être réexaminées."

Autre sujet de préoccupation pour la Cour, la gestion du FONJEP (fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire) dont "le soutien régulier à des postes nationaux au sein des grands réseaux associatifs" se fait "au détriment des petites et récentes associations de terrain" tandis que les CPO (conventions pluriannuelles d’objectifs) signées avec des associations nationales "sont de plus en plus nombreuses" et que "les moyens distribués s’apparentent souvent à des aides au fonctionnement intangibles (...). Qu’il s’agisse des modalités d’aide aux structures nationales ou du saupoudrage en direction des petites associations, le soutien de l’État perd une grande partie de sa capacité à être véritablement structurant."

Au total, "la politique de la jeunesse est demeurée un ensemble de politiques sectorielles peu coordonnées". La réorganisation en cours des services déconcentrés, qui "dépendront, à partir de juin 2020, des services départementaux de l’éducation nationale, tout en restant sous l’autorité fonctionnelle préfectorale" sera-t-elle l’occasion de clarifier "les conditions des rattachements hiérarchiques et fonctionnels entre les autorités préfectorales et rectorales" ? La Cour semble en douter.

Le référé, à noter que la réponse du ministère de l’Education nationale n’y est pas jointe, sans doute parce qu’adressée hors délai.

Extrait de touteduc.fr du 20.04.20

 

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