> II- EDUCATION PRIORITAIRE (Politique. d’) : Types de documents et Pilotage > EDUC. PRIOR. TYPES DE DOCUMENTS > Educ. prior. (Déclarations officielles) > Ce qu’a dit le nouveau ministre sur les ZEP en 2003 et 2007

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Ce qu’a dit le nouveau ministre sur les ZEP en 2003 et 2007

18 mai 2007

Extrait du « Midi Libre » du 21.01.03 : Réorientation et amélioration de l’enseignement prioritaire

Vers une concentration des moyens

là où c’est le plus utile,

là où il y a le plus de difficultés

" Le dispositif est généreux et utile, mais on ne saurait élargir plus encore les territoires d’éducation prioritaire, sauf à considérer que la nation toute entière doit être en ZEP. "

Ce propos a été recueilli sur les lèvres mêmes de Xavier Darcos, ministre délégué à l’Enseignement scolaire venu, hier à Béziers, afin de dresser en quelque sorte un rapport d’étape sur les zones et réseaux d’enseignement prioritaire. Développé au niveau national dans plus de 7 000 écoles primaires, 1 000 collèges d’enseignement général et près de 130 lycées professionnels, ce dispositif concerne désormais un enseignant sur cinq, un million d’écoliers et quelque 20 % des collégiens. Soit, peu ou prou, le double des effectifs recensés il y a vingt ans de cela. Toujours au chapitre des statistiques les plus révélatrices, nous retiendrons qu’entre 1997 et 1998, le nombre de ZEP a quasiment triplé, passant de 369 à plus de 900. Avec, en filigrane, une majoration du coût de l’élève en zone d’éducation prioritaire de l’ordre de 15 %.

A la faveur d’un déjeuner de travail préparé et servi par la section hôtelière du lycée d’enseignement professionnel Jean-Moulin, puis d’une réunion avec l’ensemble des partenaires de la communauté éducative, Xavier Darcos a rappelé la philosophie qui inspirait sa stratégie : " Continuer à concentrer les moyens là où c’est le plus utile, dans les établissements où il y a le plus de difficultés, mais aussi adopter une gestion plus souple, plus réactive permettant d’aborder les problèmes au coup par coup, d’autant qu’ils évoluent très vite et fluctuent d’un établissement à l’autre. "

Il sera aidé en cela par la publication, dès le mois d’avril 2003, de l’évaluation des contrats de réussite, sorte de tableau de bord mettant en perspective les investissements consentis par l’Éducation nationale et les résultats obtenus par chacune des zones d’éducation prioritaire. Résultats dont on pressent qu’ils seront fort contrastés, avec des faiblesses dans les territoires où les collectivités locales n’ont guère soutenu " par leur militantisme et leur engagement financier, les efforts des personnels de l’Éducation nationale, pièce maîtresse du dispositif, dès lors que la réussite ou l’échec de l’école ne se fait pas dans les couloirs des ministères mais dans les classes ". C’est à la lumière de ces éléments que les ZEP seront renouvelées et réorientées vers toujours plus de pertinence et d’efficacité.

Ainsi, sans préjuger de ce que sera le futur "plan d’attaque" de Xavier Darcos afin que l’accès au savoir soit plus équitablement réparti, quelques grandes propositions semblent d’ores et déjà se dégager : favoriser l’éducation globale en multipliant les "écoles ouvertes" pendant les vacances et congés scolaires, parfaire l’enseignement des mathématiques et la maîtrise du langage, rétablir l’autorité des enseignants et la discipline qui perturbent le fonctionnement des établissements mais freinent aussi le recrutement des professeurs, promouvoir les cours d’éducation à la santé, encourager la formation et l’engagement des équipes pédagogiques sur des durées de trois à quatre ans minimum... Sans omettre, sur le plan administratif, une amélioration de la cohérence et de la lisibilité des divers dispositifs, qui pourraient s’enrichir de la mise en réseau des écoles rurales.

" Les écarts entre les élèves de ZEP et les autres ne se sont pas creusés et les difficultés scolaires n’ont pas été à la même mesure que les difficultés sociales recensées ces dernières années. Les ZEP ont empêché la situation de se dégrader ", a commenté Xavier Darcos. Rassurant, sans doute ! Suffisant, certainement pas pour un ministre, précédemment enseignant, dont les objectifs ne sont autres que ceux de l’école de la Nation : " Offrir, en matière de savoir, les mêmes chances à tous et chacun.

Compenser partout où cela est possible, les injustices de la vie ". Celles qui veulent, par exemple, que les ambitions d’orientation des élèves issus de ZEP soient moins affirmées que celles de leurs camarades, ou que le redoublement de la terminale demeure plus fréquent parmi les lycéens de zone d’éducation prioritaire. Même si, à la sortie, les résultats du baccalauréat (82 % d’admis) ne souffrent d’aucune ségrégation.

Avant de rencontrer une nouvelle fois les élus, Xavier Darcos s’est rendu à l’école des Oliviers ou élèves et enseignants ont illustré les actions mises en œuvre par le réseau d’éducation prioritaire de La Devèze, sur le thème de la citoyenneté.

G L.

------------------

Darcos questionné sur les ZEP

Extrait du journal « La Croix » (21 janvier 2003) : Darcos questionné sur les ZEP

Depuis l’agression au couteau d’une de leur collègue, le 7 janvier, les enseignants d’un lycée professionnel de la Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine) sont en grève. Allez-vous accorder le classement de leur établissement en zone d’éducation prioritaire (ZEP) comme ils le réclament ?

Xavier Darcos : Je comprends l’émotion des professeurs de ce lycée, très choqués par cette agression extrêmement grave. Mais je ne pense pas que cette mesure règlerait les problèmes d’insécurité. On recense en France chaque année plus de 80 000 actes de violence graves. On ne peut, à chaque fois, répondre par le classement en ZEP d’un établissement, isolément. Ce serait alors le pays tout entier qui finirait en éducation prioritaire. Dans le cas de la Garenne-Colombes, il convient de trouver une solution plus efficace pour traiter un problème de violence. C’est ce que nous tentons de faire et, s’il le faut, je me rendrai sur place pour rencontrer les enseignants.

Allez-vous modifier la politique des ZEP ?

Il est de la mission de l’Éducation nationale d’assurer un égal accès de tous au savoir. Depuis vingt ans, grâce à la politique d’éducation prioritaire, les écarts de niveaux des élèves ne se sont pas creusés. L’investissement de tous les personnels qui s’y consacrent a empêché la situation de se dégrader. Nous allons poursuivre cet effort en faveur de zones défavorisées, en particulier dans les quartiers sensibles où l’école demeure souvent le dernier des services publics.

Cela dit, le dispositif des ZEP n’est plus assez réactif face à l’évolution rapide des difficultés que rencontre le monde éducatif. Nous constatons, par exemple, un rajeunissement des auteurs de violences, une augmentation des problèmes de santé mentale chez les collégiens, des phénomènes de sexisme ou de communautarisme... Sur un même territoire, les problèmes sociaux changent rapidement. Nous devons donc passer d’une logique de « zonage » à une logique de réactivité qui nous permette de répondre au coup par coup, de manière différenciée selon les établissements, à des difficultés.

L’extension des ZEP ne s’est-elle pas traduite par un saupoudrage des moyens, alors qu’il faudrait concentrer les efforts sur les établissements en grande difficulté ?

La relance de l’éducation prioritaire, en 1997, devait permettre d’alléger la carte des ZEP. Or, c’est l’inverse qui s’est produit. Aujourd’hui, un collégien français sur cinq se trouve concerné et l’on peut s’étonner qu’un département rural comme la Nièvre soit presque intégralement en zone prioritaire ! La vérité est qu’il est très difficile de revenir en arrière, de retirer ce qui est acquis. J’observe d’ailleurs que le précédent ministre de l’éducation ne s’est pas exprimé sur ce sujet sensible. Quoiqu’il en soit, cette extension de la carte des ZEP fait que le dispositif recouvre des réalités très différentes, notamment entre une ZEP rurale et une ZEP de banlieue dans un quartier très difficile.

Actuellement, nous étudions les bilans des « contrats de réussite » que chaque établissement nous fait remonter. Puis nous publierons, en avril, un document qui permettra une meilleur distribution des moyens entre les ZEP. Nous demanderons aux recteurs et aux inspecteurs d’académie de concentrer les moyens sur les zones les plus difficiles. À la rentrée prochaine, la carte des ZEP ne devrait donc pas sensiblement changer mais nous allons renforcer la discrimination positive en donnant plus à ceux qui ont moins.

Faut-il simplifier l’ensemble des dispositifs éducatifs locaux ?

Les classements en ZEP, en REP (réseau d’éducation prioritaire) ou en zones sensibles coexistent avec les contrats éducatifs locaux, les politiques de la ville... Ces dispositifs sont en effet de plus en plus complexes et s’entrecroisent. Sur le terrain, beaucoup de chefs d’établissements s’en plaignent. Nous avons donc proposé à Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, une simplification du pilotage local de l’ensemble de ces dispositifs.

Maintenez-vous les mesures prises par Jack Lang pour attirer les jeunes enseignants dans les ZEP de la région parisienne ?

Oui, c’est une bonne forme d’encouragement. Seulement, ce dispositif dit « PEP 4 » a des effet pervers : au bout de cinq ans, ayant acquis les points de carrière nécessaires, les jeunes enseignants risquent de repartir encore plus vite en province. Nous élaborons actuellement un « contrat de début de carrière » pour les enseignants qui choisissent un établissement difficile. Il permettra de renforcer le dispositif « PEP 4 » de manière à mieux stabiliser les équipes et favoriser l’affectation groupée de professeurs sortant de la même promotion de formation.

Propos recueillis par Bernard Gorce

----------------

Xavier Darcos veut des ZEP réactives

Extrait de « Maire-Info », le 18.05.07 : Le périodique " Maire-infos " aborde les ZEP dans sa rubrique " sécurité « 

Zones d’éducation prioritaires (ZEP) : Xavier Darcos veut un dispositif plus réactif contre la violence scolaire
Le ministre délégué à l’enseignement scolaire Xavier Darcos souhaite lutter contre la violence et l’échec scolaires par un dispositif plus réactif que celui des zones d’éducation prioritaires (ZEP), déclare-t-il dans une interview à La Croix publiée ce mardi.

"Le dispositif des ZEP n’est plus assez réactif face à l’évolution rapide des difficultés que rencontre le monde éducatif", a déclaré M. Darcos.

"Dans le cas de la Garenne-Colombes, il convient de trouver une solution plus efficace pour traiter un problème de violence", a ajouté le ministre qui s’exprimait au sujet d’un lycée professionnel des Hauts-de-Seine où les cours sont suspendus depuis le 7 janvier pour protester contre l’agression au couteau d’une enseignante par une élève.

Les enseignants réclament un classement ZEP de leur établissement, qui permet d’obtenir des moyens supplémentaires en encadrement ou en matériels.

"On recense en France chaque année plus de 80 000 actes de violence graves (dans les établissements scolaires, NDLR). On ne peut, à chaque fois répondre par le classement ZEP d’un établissement isolément. Ce serait alors le pays tout entier qui finirait en éducation prioritaire", a ajouté le ministre.

M. Darcos a néanmoins affirmé, comme il l’a déjà fait vendredi à Béziers, que le gouvernement allait "poursuivre" l’effort "en faveur des zones défavorisées, en particulier dans les quartiers sensibles où l’école demeure souvent le dernier des services publics".

Parmi les problèmes nouveaux auxquels les établissements doivent faire face, le ministre recense "un rajeunissement des auteurs de violences, une augmentation des problèmes de santé mentale chez les collégiens, des phénomènes de sexisme ou de communautarisme".

La relance de l’éducation prioritaire en 1997 devait permettre d’alléger la carte des ZEP. Et c’est l’inverse qui s’est produit, selon M. Darcos qui s’est étonné au passage qu’un "département rural comme la Nièvre soit en grande partie en zone prioritaire".

-----------------------

Xavier Darcos dans la ZEP de Béziers

Extrait d’une dépêche de l’AFP, le 21.01.03 : Darcos parle des ZEP

Fracture scolaire : Xavier Darcos veut "assouplir" l’éducation prioritaire Le ministre délégué à l’enseignement scolaire, Xavier Darcos, veut "assouplir" le dispositif ZEP-REP (zones d’éducation prioritaire ou réseau d’éducation prioritaire), qui permet d’accorder plus de moyens financiers aux établissements scolaires situés dans certains quartiers défavorisés.
La politique qui "consiste à donner plus aux jeunes qui ont moins sera poursuivie" pour lutter contre la "fracture scolaire", mais elle devra s’intégrer "dans une gestion beaucoup plus souple de l’ensemble des établissements," a déclaré, vendredi 17 janvier, M. Darcos. "La notion de zone n’est pas le seul outil qui permette de gérer chaque établissement de façon différenciée," a-t-il ajouté.
Après avoir souligné qu’un élève scolarisé en ZEP coûte entre 10 et 15 % de plus qu’un élève scolarisé hors-ZEP, M. Darcos a annoncé le lancement d’un bilan des "contrats de réussite" mis en place en 1997 dans ces zones, afin de savoir si "les résultats sont à la hauteur des investissements".

"Les évaluations montrent qu’à l’entrée en sixième, les élèves de ZEP réussissent moins bien que les autres mais il faut tenir compte du fait que la déperdition des savoirs pendant les vacances est plus importante" dans ces quartiers qu’ailleurs, a souligné M. Darcos. Le ministre a toutefois salué le travail accompli dans ces quartiers par les équipes éducatives, puisque les écarts de réussite entre les élèves de ZEP et les élèves hors ZEP "ne se sont pas creusés".

Le ministre voudrait par ailleurs différencier l’aide pour mieux s’adapter aux besoins spécifiques des ZEP situées en régions rurales ou urbaines, et étendre le dispositif "PEP4", lancé en 2002, qui permet d’attirer financièrement et de fidéliser les équipes enseignantes dans ces établissements, souvent durs ou violents.

-------------------

Xavier Darcos rend hommage aux profs de ZEP

Extrait du « café pédagogique » du 22 janvier 2003 : Xavier Darcos rend hommage aux profs de ZEP

"Ce que l’on peut dire, c’est que les écarts de réussite entre les élèves de ZEP et les élèves hors ZEP ne se sont pas comblés. Nous devons donc impérativement prendre en compte ce constat dans la rédaction des futurs projets de zone ainsi que des contrats de réussite. Mais ce qu’il faut dire aussi, c’est que ces écarts ne se sont pas creusés et que l’investissement de tous les personnels qui travaillent sur le territoire de l’éducation prioritaire a empêché la situation de se dégrader là où les populations connaissaient des difficultés souvent accrues. Est-il besoin de souligner que l’école demeure souvent le dernier des services publics dans les quartiers les plus sensibles".

Les ZEP concernent actuellement un professeur sur cinq, un million d’écoliers, 600.000 collégiens, et plusieurs dizaines de milliers de lycéens dans plus de 250 établissements. Le ministre a annoncé son intention de relancer le pilotage académique de l’éducation prioritaire afin de rendre le dispositif plus dynamique.

-------------------

Xavier Darcos reparle de la violence

dans les établissements

Extrait de « Libération » du 27.01.03 : "Accepter les élèves ou changer de métier"

Les cours ne seront pas assurés, ce matin, dans deux établissements d’Ile-de-France : le lycée Romain-Rolland de Goussainville (Val-d’Oise) et le lycée de la Tournelle à La Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine). Dans les deux cas, l’interruption des cours a été provoquée par des incidents violents : le 7 janvier, une enseignante de la Garenne-Colombes a été agressée par une de ses élèves qui lui a planté un couteau dans la cuisse. A Goussainville, c’est un surveillant du lycée qui a été frappé et menacé par le racketteur qu’il avait pris en flagrant délit. Les professeurs des deux lycées s’estiment autorisés à se prévaloir du "droit de retrait".

Introduit par la loi du 23 décembre 1982, il permet aux salariés de ne pas travailler dès lors qu’ils ont un motif raisonnable de penser que la situation dans laquelle il se trouve présente un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé. Contrairement à la grève, le retrait ne donne pas lieu à des retenues de salaires. Le ministère conteste l’utilisation de ce droit qui s’applique généralement quand le salarié est en contact avec des immeubles, des machines ou des produits dangereux. "Nous ne sommes pas grévistes, nous voulons travailler, mais nous sommes physiquement menacés par d’anciens élèves exclus. On ne peut plus faire cours", explique un professeur du lycée Romain-Rolland. Des représentants du recteur sont attendus ce matin à Goussainvillle. Quant aux professeurs de La Garenne-Colombes, ils doivent être reçus demain Rue de Grenelle.

Le ministre délégué à l’Enseignement scolaire, Xavier Darcos, était la semaine dernière en visite à Londres où il s’est fait présenter les pistes britanniques de lutte contre la violence, prévention de l’absentéisme, incivilités. Il revient ici sur les enseignements de ce séjour, en relation avec l’actualité française.

Les derniers chiffres de la violence montrent un recul par rapport à 2001. On assiste pourtant à une multiplication des arrêts de travail. Que se passe-t-il ?

Il y a une hypersensibilité des personnels. Les décisions que nous avons prises ont des effets ¬ les chiffres le montrent ¬, les gens se sentent soutenus. Mais il y a un effet pervers : les professeurs supportent de moins en moins ces situations. Là-dessus, il y a une sorte d’émulation dans la contestation. Je comprends leur émotion. Mais je ne vais pas fermer tous les établissements pendant des mois ou tous les mettre en ZEP.
Et le "droit de retrait", dont se réclament les professeurs pour arrêter le travail ?

Il est convoqué à titre exorbitant. Entre un ouvrier sur un échafaudage branlant par grand vent et un professeur dans un établissement sensible, la notion de danger grave et imminent, qui fonde le droit de retrait, est tout de même différente. On ne peut garantir à personne de n’être exposé à aucun risque, dès lors qu’il pratique un métier public.

N’avez-vous pas attisé ces revendications en déclarant la guerre ouverte à la violence, l’insécurité, les incivilités ?

Non. D’autant que nous montrons depuis plusieurs mois que les situations peuvent se régler. Et nous sommes, systématiquement, du côté des personnels, y compris contre les commissions d’appel devant lesquelles les élèves contestent parfois les décisions des équipes éducatives. J’ai toujours donné raison aux équipes, je suis de leur côté. Mais ce n’est pas une raison pour devenir intolérant à tout. Être enseignant, c’est accepter d’affronter les élèves tels qu’ils sont, ou alors il faut changer de métier.

Ou changer le métier, c’est-à-dire la façon de travailler ? A Londres, vous avez observé une situation bien différente...

Oui. La notion de communauté scolaire prend un tout autre sens qu’en France. Les personnes qui travaillent dans les établissements scolaires sont tour à tour enseignant, assistante sociale, orientateur, travailleur social, intermédiaire vis-à-vis des familles ou du quartier... Cette polyvalence crée d’emblée un état d’esprit différent ; j’ai senti des relations plus naturellement respectueuses qu’en France, moins marquées par la hiérarchisation des rapports. De même, évidemment, que la présence continue de tous les adultes, enseignants compris ¬ ces derniers passent 32 heures et demi par semaine dans leur établissement. Tout cela est à l’évidence efficace pour améliorer le comportement des élèves. Quand je parle de rouvrir le dossier du métier d’enseignant, je pense à ce genre de questions. Mais il faut continuer à privilégier la chose scolaire sur la chose sociale, ce qui ne me semble pas toujours être le cas, aujourd’hui, dans les écoles publiques anglaises.

Elles vont aussi plus loin dans le répressif...
Ce n’est pas sûr ; le système de sanctions est différent. En tout cas, elles ne reculent pas devant les symboles. Je ne sais pas si on pourrait avoir en France, comme je l’ai vu à Londres, un policier en uniforme dans un collège, avec son bureau, ses menottes, sa matraque et sa bombe lacrymogène.

Vous aimeriez pouvoir ?

Ce n’est certainement pas à moi d’en décider, mais aux équipes éducatives, dans les établissements, en liaison avec leurs quartiers. Je constate simplement qu’il n’est pas absurde d’avoir un policier à demeure, auquel les élèves s’habituent, plutôt que d’en voir débarquer brutalement dix, qui ne connaissent pas l’établissement, dans une situation de crise. Le policier que j’ai vu dans cette école londonienne se vit plus comme un intermédiaire que comme une sorte de surveillant général.

Emmanuel Davidenkoff.

-------------------

En 2007

"Zone d’éducation prioritaire, cruel euphémisme"

Extrait du blog de Xavier Darcos, le 19.05.07 : Culture et école, encore

Le 14 février 2007

La question du rapprochement culture / éducation semble entrée dans la campagne, lancée à juste titre par Nicolas Sarkozy. Commençons par nous demander si l’école remplit sa fonction "culturante". Certes, les enseignants sont évidemment du côté de la culture, quoi qu’on mette sous ce mot. Ils se réclament d’abord du devoir d’instruire. Mais, à leurs yeux, cette adhésion préalable ne vaut pas forcément déférence envers les savoirs scolaires, tels qu’ils sont définis aujourd’hui, hérités de choix très anciens et de procédures opaques. Être ambitieux pour la connaissance n’implique pas forcément de renoncer à passer au crible les disciplines actuellement enseignées. On entre alors dans des divagations interrogatives illimitées et ravageuses. La question peut se poser de savoir qui a choisi les disciplines. À quand remonte leur actuelle hiérarchie ? Comment s’est décidé leur découpage ? Comment se sont organisées leurs importances respectives, notamment en terme d’horaires et de coefficients ? Qui même a conçu et organisé la cohérence d’ensemble du savoir scolaire ou académique ?

L’enquête devient sans fin ni direction, ce qui fait les choux-gras des inféconds chercheurs en sciences de l’éducation. On doit ensuite se demander pourquoi l’appropriation du savoir, dès l’école, devrait privilégier la concurrence individuelle et la compétition, au détriment des formes de travail en équipes et de coopération entre les élèves ; pourquoi même le professeur devrait détenir un niveau universitaire élevé, qu’il n’a guère l’occasion de mobiliser au quotidien ; pourquoi enfin ne pas se contenter d’une formation professionnelle, initiale et continue ; ou même la réduire à des stages répétés dans les établissements « sensibles » ou dans les zones dites « prioritaires » (cruels euphémismes), pour qu’ils s’accoutument à la doctrine minimale et à l’école des pauvres. Autant dire qu’il faut tout lâcher, pour aboutir à l’inverse de ce que nous croyons être la mission de l’école.

C’est au carrefour de ces inusables casse-tête que se place le discours sur la pédagogie, synthèse d’une capacité disciplinaire et d’un art de faire partager le savoir. Mais ne nous leurrons pas : le primat de la nécessaire transmission des connaissances n’est discuté que par les seconds couteaux ou par les commentateurs professionnels des officines exclusivement « pédagogistes ». La seule question qui vaille, une fois qu’on a ergoté et tournicoté autour de faux problèmes, est celle-ci : pourquoi l’armada éducative produit-elle tant d’ignorants, d’illettrés, et de jeunes dégoûtés du savoir ou infantilisés ? À quoi sert l’assemblée foisonnante et bavarde des experts, des évaluateurs, des réformateurs, des prêcheurs ou des inquisiteurs ? Car l’élève ne semble pas être mieux traité que naguère, malgré l’armée des prédicateurs : il meurt en bonne santé.

-------------------

La diminution des effectifs

n’a pas été faite là où il faut

Extrait de « La Lettre de Défense des enfants - international », le 10.05.07 : Le rapport de Xavier Darcos remis à Nicolas Sarkozy concernant les projets sur l’école

DOC 24

Extrait de « La Lettre du Monde de l’Education », le 19.03.07 : L’entourage de Nicolas Sarkozy veut la suppression du « décret de Robien »

Dans un rapport sur « la situation morale et matérielle des professeurs », remis le 10 mars à Nicolas Sarkozy, Xavier Darcos, ancien ministre délégué à l’enseignement scolaire, propose l’ouverture d’une négociation globale sur la fonction enseignante. (...)

Deux courts extraits :

(...)

L’école ne se refondera pas par la nostalgie et le retour aux blouses grises. Au contraire, il faut que les établissements respirent à leur rythme, disposent d’une plus grande autonomie, se sentent responsables et incités à l’initiative. La gestion centralisée et l’injection massive de moyens venus d’en haut ne produisent pas les résultats escomptés, comme on l’a vu pour les ZEP. C’est aux établissements de choisir leurs moyens, notamment pédagogiques, d’atteindre aux objectifs nationaux. Dotés d’un contingent horaire complémentaire spécial, ils doivent organiser librement leur politique éducative et notamment rétribuer des séquences pour les élèves en situation difficile. Dans le cadre d’une vaste déconcentration budgétaire, des contrats en ce sens, proposés par les équipes éducatives de chaque établissement, pourront être passés avec les académies ou avec les collectivités locales, voire avec des entreprises et des associations si les enseignants le croient utile.

De même, les établissements devraient être incités à se mettre en réseau et à se regrouper pour mutualiser leurs moyens : options, enseignants contractuels, heures supplémentaires, actions à caractère social ou culturel, etc. Là encore, le pragmatisme doit l’emporter sur les idées générales et sur l’idéologie. Les hommes et les femmes du terrain savent mieux que quiconque comment agir dans les conditions particulières qu’ils rencontrent. Or il faut savoir que, sur une « dotation globale de fonctionnement » (DGF) attribuée à un établissement, la marge de manœuvre, une fois dotés les enseignements obligatoires, est de 1 %, autant dure presque nulle. L’autonomie, dans ces conditions, reste assez virtuelle.

(...)

« Les économistes estiment en effet que cet égalitarisme salarial a eu des "effets pervers" sur le moral des enseignants. À leurs yeux, la réduction des tailles de classe a certes été justifiée par l’arrivée de nouveaux publics dans le secondaire. Mais ils constatent, en citant les travaux de l’économiste Thomas Piketty, que les réductions d’effectifs généralisées n’ont pas été efficaces. "La diminution des effectifs n’a pas été faite là où il faut", c’est-à-dire dans les écoles et les établissements accueillant des publics défavorisés. »
(...)

Le rapport, par ailleurs, cite à plusieurs reprises les « primes ZEP »

Lire le rapport

-----------------

Lire également l’article « Le rapport Darcos et le programme Sarkozy dans « L’Expresso » du 14 mai 2007.

Répondre à cet article