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Mixité sociale : le Café commente le document de la Depp en comparant les IPS des collèges dans le privé et en éducation prioritaire

5 avril 2023

Mixité en berne dans les collèges privés et d’éducation prioritaire

Le 30 mars dernier, la Depp – Direction de l’Évaluation, de la Prospective et de la Performance – publiait « L’indice de position sociale : un outil statistique pour décrire les inégalités sociales entre établissements ». Cette note s’est intéressée à l’étude des profils sociologiques des collèges, publics et privés sous contrat et à la corrélation possible de l’IPS à la réussite au DNB – Diplôme National du Brevet. Le constat est clair, les établissement les plus ségrégués socialement sont les établissements privés sous contrat – dont l’IPS est très élevé et ceux de REP dont l’IPS est le moins élevé. Les résultats aux DNB s’en ressentent considérablement.

« L’IPS fait partie des facteurs, parmi d’autres, qui influent sur les résultats des collèges au DNB et sur lesquels le collège n’a pas ou peu de prise » indique l’organisme de statistique du ministère de l’Éducation nationale. « Il illustre le fait que tous les collèges ne sont donc pas confrontés aux mêmes difficultés, aux mêmes enjeux pour faire réussir leurs élèves … Par ailleurs, les performances au diplôme national du brevet (DNB) et les IPS sont très corrèles ».

Les IPS, indicateur du profil socioéconomique des élèves

« Quel est le niveau social moyen d’un collège ? Quel est le degré d’hétérogénéité sociale des élèves qu’il accueille ? Comment comparer ce collège à un autre, du point de vue de leur situation sociale ? L’indice de position sociale (IPS) est un outil construit pour répondre à ce type de questions » explique la Depp qui rappelle que le l’IPS « d’une PCS (Profession et Catégorie Sociale) donnée est ainsi le résumé quantitatif d’un certain nombre d’attributs socio-économiques et culturels favorables à la réussite scolaire, que l’on retrouve en moyenne pour cette PCS. L’IPS permet ainsi d’attribuer un « score » aux PCS en fonction de multiples dimensions favorables à l’apprentissage ». Ainsi, pour « apprécier le niveau social d’une établissement », il faut regarder du côté de l’IPS moyen de celui-ci mais aussi du côté de l’écart-type qui permet d’apprécier la différence entre l’IPS le plus élevé et le plus bas de l’établissement, donnant ainsi à voir si mixité il y a.

De fortes disparités géographiques

Une image contenant carte Description générée automatiquementL’IPS moyen des collégiens est de 105 indique la Depp qui propose une cartographie des collèges selon leur IPS. Ainsi, les départements affichant les collèges dont les IPS figurent parmi les plus bas se trouvent majoritairement en Outre-Mer et dans le nord-est de la France métropolitaine, l’IPS moyen y est inférieur à 95. « Mayotte, la Guyane et la Réunion, ont un IPS moyen inférieur à 88 ». A l’opposé, 12 départements affichent des IPS supérieurs à 110 : Paris (126), le sud-ouest de l’Ile de France, dans les Alpes et dans les départements des grandes métropoles (Toulouse, Nantes, Rennes, Bordeaux, Lyon). Par exemple, plus de 106 points séparent le collège à l’IPS le plus faible de celui dont l’IPS est le plus élevé. Le collège Gran Man Difou à Maripasou affiche ainsi 51,3 d’IPS quand le collège Franco-Allemand de Buc (dans l’académie de Versailles) affiche 157,6.

Des disparités en fonction du statut (public/privé) et du label Éducation Prioritaire (EP)

Dans le privé, l’IPS moyen d’un collégien est de 121, soit 20 points de plus que celui d’un élève scolarisé dans le secteur public qui affiche une moyenne de 101. Des disparités sont aussi soulignées en fonction de l’appartenance à un réseau d’éducation prioritaire (REP) ou à un réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+). « En effet, l’IPS moyen des élèves scolarisés dans des collèges en éducation prioritaire (EP) est de 74 en REP+ et de 85 en REP, tandis que celui des élèves du secteur public hors EP est de 106 ».

Dans 90% des collèges REP+, l’IPS moyen est inférieur à 83 alors que « 90 % des collèges du secteur public hors EP ont un IPS supérieur à 91 et 90 % des collèges du secteur privé ont un IPS supérieur à 101 ». « Si la quasi-totalité des collèges en REP+ et les trois quarts des collèges en REP ont un IPS inferieur à 90, cela ne concerne que 8 % des collèges publics hors EP et moins de 1 % des collèges privés sous contrat » ajoute le service de statistique ministériel.

Des collèges fortement ségrégés : en éducation prioritaire et dans le privé.

Pour donner à voir l’hétérogénéité sociale d’un établissement, il convient de s’appuyer sur l’écart-type de l’IPS de ses élèves. « Plus il est élevé, plus le profil social des élèves est diversifié ». « Les collèges en REP+, avec une forte concentration d’élèves de milieu défavorisé, sont les collèges les moins hétérogènes socialement » note la Depp. « À l’opposé les collèges publics hors EP scolarisent des élèves de milieux sociaux plus diversifiés. En effet, les trois quarts des collèges de REP+ ont un écart-type d’IPS inferieur à 26, tandis que les trois quarts des collèges publics hors EP ont un écart-type d’IPS supérieur à 30… Dans le secteur privé, les collèges scolarisent en moyenne des élèves dont le profil social est favorisé et peu diversifié. Ainsi, les trois quarts des collèges privés ont un indice d’hétérogénéité inferieur à 29 ». Ainsi, le collège privé Jeannine Manuel de Marcq-en Baroeul affiche un IPS de 154,8 et un écart type de 4,8 points. Le collège Elsa Triolet de Marseille affiche quant à lui un IPS de 69,6 avec un écart type de 11 points. Dans ces établissements, les élèves ont des profils socioéconomiques très homogènes. Les premiers vivent dans des milieux aisés, voire très aisés. Les seconds dans des milieux défavorisés, voire très défavorisés.

Des résultats aux DNB corrélés à l’IPS moyen de l’établissement

« Les résultats au DNB sont en moyenne meilleurs dans les collèges les plus favorisés socialement » indique l’organisme de statistique. « Le taux de réussite au DNB est ainsi de 97 % dans les collèges dont l’IPS moyen des candidats en série générale est supérieur à 130, soit 18 points de pourcentage de plus que dans les collèges les moins favorisés socialement, c’est-à-dire ceux dont l’IPS est inferieur à 80. De même, la note aux épreuves écrites du DNB est en moyenne plus élevée de 5 points (sur 20) pour les collèges les plus favorisés socialement, par rapport aux moins favorisés ». Pour reprendre les exemples des collèges Jeannine Manuel et Elsa Triolet, le premier (collège privé) affiche un taux de réussite au DNB de 100 %, avec une moyenne de 13,6 à l’écrit. Le second, 77% de taux de réussite et une moyenne de 6,2.

Un plan ambitieux pour lutter contre la ségrégation scolaire et sociale nécessite donc de jouer sur des deux leviers : obliger l’enseignement privé à participer à plus de mixité, renforcer et « désenclaver » l’éducation prioritaire. Pour rappel, le ministre de l’Éducation national annonce depuis plusieurs mois un plan pour la mixité sociale auquel les établissements de l’enseignement catholique sous contrat seraient associés. Et du côté de l’éducation prioritaire, le ministre doit aussi faire des annonces… qui tardent elles aussi.

Lilia Ben Hamouda

Extrait de cafepedagogique.net du 04.04.23

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