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Ce qui se joue dans la classe : Les collégiens, le cadre scolaire et ses règles, article du dossier de la RFP "Les enfants parlent de la classe"

7 avril 2022

Additif du 27.04.22
Les enfants doivent-ils toujours obéir à la maîtresse ? (Revue française de pédagogie)

"Un petit garçon (ou une petite fille) de ton âge va à l’école. Un jour, pendant un travail de classe, un élève se trompe et donne une mauvaise réponse. Alors la maîtresse demande à ce petit garçon (ou à cette petite fille) de donner une claque à l’élève parce qu’il a donné une mauvaise réponse." Ce scénario est proposé à un enfant qui doit alors imaginer ce que va faire le personnage de l’histoire : son alter ego va-t-il donner une claque à un autre élève de sa classe ? Le plus souvent, il répond positivement. L’enquêtrice lui révèle alors que l’enfant a refusé d’obéir à la maîtresse. A-t-il bien fait ? Un second snénario est ensuite proposé à l’élève. Pendant la récréation, un élève frappe son alter ego qui va le dire à la maîtresse qui lui dit d’aller donner une claque à celui qui l’a frappé. A nouveau, l’enfant doit imaginer la suite et de dire ce qui est bien ou mal.

L’expérience a été conduite par Sophie Richardot (U. de Picardie) et Marie-Françoise Vermunt (ancienne IEN) auprès de 109 enfants de grande section de maternelle et de 129 élèves de CM1 ou CM2, issus de divers milieux sociaux. Sans surprise, les réponses varient avec l’âge. "Les plus âgés anticipent significativement plus la désobéissance que les plus jeunes." Si "une petite proportion" des élèves de maternelle "propose de ne pas obtempérer aux injonctions problématiques de la maîtresse, "une très large majorité" d’entre eux estime que "la personne incarnant l’autorité doit être obéie". "Les rares qui envisagent l’éventualité d’une désobéissance" ne remettent pas en cause la consigne de l’enseignante, mais ne veulent pas "nuire à un ami". La tendance à l’obéissance est plus nette encore avec le second scénario, dans la cour de récréation, puisque la consigne "va dans le sens d’un principe de justice réciproque", rendre à l’autre ce qu’il vous a fait. Toutefois, les auteures notent, "même chez les 5-6 ans une tendance à faire évoluer leur réponse vers davantage de généralisation (il ne s’agit plus seulement de préserver des liens d’amitié mais de respecter les autres)".

En revanche, "il n’existe pas d’effet de sexe (...), les filles ne considèrent pas plus que les garçons qu’il est nécessaire de désobéir à l’enseignante". Le niveau scolaire et l’origine sociale jouent par contre un rôle déterminant : "plus les élèves sont ’bons’ scolairement" et proviennent d’un milieu social favorisé, "plus ils sont enclins à s’opposer à l’autorité enseignante". Ce sont habituellement "les élèves les plus éloignés de l’école (qui) sont les plus enclins à constester l’ordre scolaire". Les auteures distinguent, pour expliquer ce résultat paradoxal, "deux types de désobéissance", celle qui consiste à perturber la classe et "une désobéissance que l’on pourrait qualifier d’éthique". Les élèves les plus entraînés à faire preuve d’esprit critique dans leur famille et "bien perçus dans le cadre scolaire", "s’octroient le droit de remettre en cause la parole de l’autorité enseignante".

"Faut-il toujours obéir à la maîtresse ? Soumission à l’autorité et autonomie de jugement chez les élèves de maternelle et d’élémentaire", Revue française de pédagogie n° 213, dossier "Les enfants parlent de la classe", ENS éditions, 18 €.

A noter dans ce même numéro une "note de synthèse" de B. Moignard et S. Rubi sur "les désordres scolaires dans la recherche française", et un article de J. Netter et A A. Boulin sur la perception de la règle du jeu par des collégiens.

Extrait de (touteduc.fr du 27.04.22

 

Ce qui se joue dans la classe : Les collégiens, le cadre scolaire et ses règles
"Les collégiens... décrivent des enseignants qui sont performants quand ils parviennent, par la maîtrise de l’interprétation des signes qu’ils produisent, à enrôler les élèves pour le bénéfice du collectif comme des individus". Dans un article de la Revue française de pédagogie (n°213), Julien Netter (Escol) et Audrey Boulin (Cergy Paris Unversity) analysent les règles du jeu de la classe telles que les collégiens les voient. Une certitude : ces règles existent et les collégiens les partagent même s’ils perçoivent de façon différente les choses. L’enjeu est de taille : les apprentissages. Aux enseignants donc de bien les connaitre. Mais les enseigne t-on ?

Des collégiens face au cadre scolaire

"Comment les collégiens perçoivent-ils ce qui se joue en classe ? Quel regard commun posent-ils sur les situations et quelles différences se font jour entre eux ?" Audrey Boulin et Julien Netter soumettent à des collégiens de 3 écoles différentes des extraits vidéos de cours pour noter leurs réactions. L’idée de départ c’est de chercher si les collégiens partagent les mêmes règles du cadre scolaire et ont des attentes comparables. Et pour le savoir, rien de mieux que d’observer des cours, l’enseignant étant, plus que tout autre personnel du collège , en première ligne dans sa classe.

Ce qui en ressort est très intéressant pour comprendre comment se constitue l’ordre scolaire. " Nous montrerons que les collégiens, face à cette situation « ordinaire » qu’est la classe, partagent des normes communes, un arrière-plan de connaissances, de présupposés et d’attentes", expliquent les auteurs. En soumettant aux collégiens des extraits de cours d’un professeur qui ne se laisse pas déborder et d’une enseignante qui a du mal à gérer la classe, ils font ressortir ce que les élèves partagent sur les règles non écrites de la classe.

La culture scolaire commune des collégiens

" Les collégiens s’accordent sur ce qui fait classe, sur les objectifs, sur leur rôle et sur celui de l’enseignant. Parfois, pourtant, leurs analyses des micro-situations donnent également à voir des interprétations divergentes où pointe l’influence de leur socialisation et de leurs expériences scolaires antérieures", affirment les auteurs. La perception des élèves peut différer en fonction de leur vécu antérieur. Mais il y a bien accord sur ce qui fait le cadre scolaire.

Plus important encore, les auteurs montrent qu’il y a accord sur les finalités de la classe. Il s’agit bien d’aller à l’école pour travailler. Et tous s’accordent sur la nécessité de maintenir le cadre scolaire, même ceux qui cherchent sans cesse la faille.

Qu’est ce qu’un "bon enseignant" ?

Et le professeur quel doit être son comportement ? " Pour jouer son « rôle » sur la scène de la classe et maintenir le cadre scolaire, l’enseignant doit, selon les enquêtés, respecter une série de règles assez souples puisqu’adaptées aux circonstances pratiques de la classe mais qui n’en sont pas moins « très strictes »... Il doit alors maîtriser un art du jeu de la classe au quotidien, « un système de manières de faire », et ces règles apparaissent comme des « règles de l’art » du jeu scolaire. Un de leurs aspects essentiels consiste dans l’articulation entre collectif et individus. Les collégiens rappellent inlassablement la nécessité pour l’enseignant de faire vivre un collectif, la classe, qui ne se résume pas à une somme d’individus".

Un exemple est donné par la non utilisation du tableau par l’enseignante. C’est interprété par les élèves comme un empêchement à travailler et finalement une invitation au désordre. Jouent aussi le corps de l’enseignant ou encore sa manière de controler le temps.

Ainsi se dessine le portrait du "bon enseignant" , tel que les collégiens le voient. " Le « bon enseignant » qui se dégage des entretiens est celui qui connaît les règles du jeu scolaire et qui, pour jouer, maîtrise les interprétations intervenant dans la classe à trois niveaux au moins. Il réussit en premier lieu à interpréter correctement les réactions de ses élèves, il dégage en outre une interprétation générale de la situation et il parvient enfin à contrôler la façon dont ses propres gestes seront interprétés par les élèves. Ses gestes ne sont donc pas réalisés à l’aune de leur nécessité mais en fonction de l’anticipation de leurs effets".

Un savoir qui doit être mobilisé au quart de seconde, notamment parce qu’il est question d’anticiper. Qui s’acquiert avec l’expérience. Mais qui peine à être enseigné.

François Jarraud

Julien Netter, Audrey Boulin, La règle du jeu. des collégiens entre normes partagées et interprétations divergentes, Revue française de pédagogie, n°213.

Extrait de cafepedagogique.net du 06.04.22

 

Le métier d’élève : voir le mot-clé Pédag. CPS : Autonomie, Bien-être, Empathie, Rapport au savoir... (gr 4)/

 

SOMMAIRE du Dossier les enfants parlent de la classe, RFP, n° 213, oct-nov-déc. 2021

Dossier
Julien Netter & Maíra Mamede – Les enfants parlent de la classe (intégral)

Véronique Kannengiesser – Un dispositif à médiation avec des élèves de CM2 pour comprendre par un effet d’après-coup des processus à l’œuvre lors de l’entrée en petite section

Sophie Richardot & Marie-Françoise Vermunt – Faut-il toujours obéir à la maîtresse ? Soumission à l’autorité et autonomie de jugement chez les élèves de maternelle et d’élémentaire

Julien Netter & Audrey Boulin – La règle du jeu. Des collégiens entre normes partagées et interprétations divergentes

Varia
Agnès Deprit & Catherine Van Nieuwenhoven – Un impulseur au cœur de la planification des futurs enseignants

Christian Silvy & Gilles Marrot – Le site local : mobilisation de points d’ancrage du professeur en mathématiques et en EPS

Note de synthèse
Benjamin Moignard & Stéphanie Rubi – Lectures sociologiques des désordres scolaires dans la recherche française. 30 ans de construction de l’objet. 1985-2015. Deuxième partie. Un nouvel âge des désordres scolaires : analyse des politiques éducatives et transformations de l’objet

In memoriam
Samuel Renier & Patrice Vermeren – Laurence Cornu (1952-2021)

Janine Rogalski & Aline Robert –Gérard Vergnaud (1933-2021)

Notes critiques
Chambard Olivia – Business Model. L’Université, nouveau laboratoire de l’idéologie entrepreneuriale (Aliénor Balaudé)

Détrez Christine & Bastide Karine – Nos mères. Huguette, Christiane et tant d’autres, une histoire de l’émancipation féminine (Françoise F. Laot)

Jahnke Holger, Kramer Caroline & Meusberger Peter (dir.) – Geographies of Schooling (Rémi Rouault)

La revue a reçu

Extrait de journal.openedition.org

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