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Pour une école de la résistance, par Alain Bentolila, Edit. Odile Jacob, février 2022, 94 p. (ToutEduc)

1er mars 2022

“L’école de la République a oublié que sa mission essentielle était de faire de ses élèves des résistants intellectuels“ (Alain Bentolila)
Alors que “l’école de la République a oublié que sa mission essentielle était de faire de ses élèves des résistants intellectuels“, et que “les responsables de l’éducation ont renoncé au devoir sacré de la formation des esprits pour surfer sur l’air du temps“, Alain Bentolila propose dans son dernier ouvrage de la “métamorphoser“, afin d’en faire “un rempart contre la crédulité et la violence“.

Pour éviter d’engendrer des “enfants perdus de l’école publique“, “faibles d’esprit“, le linguiste fait 15 propositions détaillées dont on retiendra sans ambages celui concernant la formation des maîtres, d’une “médiocrité pitoyable“ alors que ces derniers ont pour rôle de transmettre notre patrimoine de valeurs culturelles, scientifiques et morales aux jeunes esprits, mais dont “on conteste aujourd’hui la légitimité de (l)a mission“.

Il estime que pour les professeurs cette entreprise “mérite une valorisation sociale et financière significative, mais cela leur impose en retour un engagement personnel sans faille dans une formation culturelle, scientifique et pédagogique d’excellence“. En effet, “tout ce que dit le maître, précise l’auteur, est devenu réfutable non pas parce qu’on en aurait soigneusement analysé et critiqué le contenu, mais parce que ce héros, devenu commun, est aujourd’hui suspecté de manipuler les esprits et les goûts des élèves pour défendre des valeurs d’un autre temps et imposer arbitrairement des ‘croyances‘ contestables.“

Et comme sont “négligés à la fois la maîtrise des contenus disciplinaires indispensables et l’art de mettre en œuvre des démarches professionnelles efficaces“, avec de “graves insuffisances de la formation initiale et continue (qui) posent aujourd’hui de plus en plus cruellement la question du professionnalisme des enseignants et dévaluent l’image du maître d’école“, Alain Bentolila souhaite supprimer “de toute urgence“ les instituts universitaires de formation afin de les remplacer par des écoles supérieures de formation au métier de l’enseignement.

Parmi les préconisations, il y a l’idée, pour “en finir avec un enseignement uniforme, sourd aux besoins spécifiques des élèves et ignorant les particularités cognitives de chacun“, d’identifier les difficultés de chaque élève et de lui proposer un programme ciblé de perfectionnement avec un système de suivi et de différenciation tout au long du cursus.

L’auteur explique qu’au sein de l’école, “jour après jour, l’effort, la volonté et le goût d’apprendre trouveront leur juste récompense non pas en termes de possessions nouvelles mais en termes de pouvoir intellectuel accru“, car “notre seul vrai rempart contre la barbarie, c’est la raison des élèves“. Pour cela, il développe un argumentaire autour de thèmes tels que la culture de la rigueur, la laïcité et la spiritualité ou bien l’endurance associée au plaisir là où “les peu-lecteurs, incapables de lire et de comprendre un texte de plusieurs pages, dépassent vraisemblablement les 25 %“.

La maîtrise du langage est l’autre grand thème de cet ouvrage, “alors qu’à l’âge de 6 ans les élèves devraient disposer dans leur tête de 1800 à 2000 mots oraux qu’ils ont progressivement mémorisés depuis qu’ils sont venus au monde, 20 % n’en maîtrisent guère plus de 300.“ Est par exemple souhaité que “dès le début du cycle 3, on montre aux élèves que l’on ne comprend pas de la même façon un conte merveilleux et un énoncé de mathématiques“. De l’école, ajoute-t-il, “nul ne sortira qui ne sache comprendre avec vigilance et se faire comprendre avec précision.“

Cinq axes sont détaillés en vue de l’améliorer (enrichir le vocabulaire des élèves, comprendre explicitement un texte lu par la maîtresse, faire découvrir aux élèves comment les mots s’organisent dans une phrase..), le lecteur en apprentissage devant trouver un juste équilibre entre code et sens. Ainsi, il n’y aurait “pas d’apprentissage de la lecture sans un solide entraînement au déchiffrage, mais l’habileté de déchiffrage ne vaut que si et seulement si l’élève possède un vocabulaire précis et riche et une organisation des phrases cohérentes“.

“Nous produisons à peu près la même quantité d’illettrés qu’il y a 40 ans“, estime d’ailleurs Alain Bentolila qui pousse son analyse autour de l’importance de la compréhension. Il considère qu’ “un élève doit comprendre ce que lire veut dire avant d’apprendre à lire et pendant qu’il apprend à lire, et saisir ainsi le juste équilibre entre ses légitimes ambitions d’interprétation personnelle et la prise en compte respectueuse des conventions du texte“.

Soulignant qu’ “une école maternelle de qualité constitue la réponse à un problème auquel un nombre très important d’élèves se trouvent confrontés aujourd’hui“, le linguiste plaide pour “placer l’exigence et la rigueur à égalité avec le plaisir et l’épanouissement dans une école maternelle refondée.“

Alain Bentolila, Pour une école de la résistance, Odile Jacob, , 194p., 11,90€.

Extrait de touteduc.fr du 25.02.22

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