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Un rapport de l’Igesr sur les cités éducatives : divergence de cultures administratives, gouvernance, calendrier, pérennisation... (ToutEduc)

28 septembre 2021

Les différences de cultures administratives constituent parfois un obstacle pour les cités éducatives (IGESR)
“Une avancée à marche forcée, des échéances courtes, dans un contexte où les obstacles se multiplient“, commente l’IGESR dans le rapport de la mission d’appui et d’accompagnement sur les cités éducatives, publié vendredi 24 septembre.

La mission, qui dit ne pas avoir un rôle d’évaluation de politique publique mais d’accompagnement “critique“ des cités éducatives, rappelle que celles-ci sont dotées d’un budget de 100 millions d’euros pour 3 ans. 80 cités éducatives ont été labellisées en 2019, 121 le sont actuellement et 200 prévues au total. Elle souhaite indiquer les pratiques positives qu’elle a rencontrées, détailler les points de vigilance et d’amélioration tant au niveau national que territorial en proposant des recommandations.

Selon ce rapport, le vade-mecum initial des cités éducatives définissait la cité éducative comme un “programme national d’appui aux dynamiques locales de coopération éducative dans les quartiers à faible mixité sociale“, alors que “le programme des cités éducatives se défend d’être un nouveau dispositif. Son ambition est autre. Il vise à s’appuyer sur les dispositifs et moyens existants pour déployer une stratégie locale ambitieuse, un engagement continu, ainsi qu’une coordination étroite des acteurs éducatifs, en vue de lutter contre les logiques de ségrégation et de décrochage dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV)." Il ajoute que dans le processus encore en construction, la gouvernance, si elle est bien comprise en général par les acteurs locaux, constitue un des éléments clés de la mise en œuvre et de l’efficacité des cités éducatives, et salue une démarche, originale dans sa conception transversale entre deux ministères et entre les acteurs locaux, qui “apparaît bien acceptée“.

Une des caractéristiques des cités éducatives est l’approche interministérielle sans structure opérationnelle identifiée autre qu’une “coordination nationale“ assurée par l’ANCT et la DGESCO. Deux ministres, et une secrétaire d’État (éducation prioritaire), “donc potentiellement trois cabinets ministériels peuvent être directement ou indirectement concernés et intervenir sur le sujet“. L’IGESR évoque “une disproportion de moyens opérationnels entre ces deux acteurs centraux de la coordination nationale : un chargé de mission à temps plein et deux personnes partiellement en charge des cités éducatives à la DGESCO, trois personnes à temps plein, un directeur à temps partiel, un contrat en renfort et des stagiaires à l’ANCT.“

Elle a ainsi pu vérifier, “dans l’ensemble de ses échanges et lors de ses visites, que les différences de cultures administratives n’étaient pas toujours dépassées, constituant parfois un obstacle au bon déroulement de la démarche des cités éducatives“. Elle constate en outre un engagement plus efficace de la démarche des cités éducatives dans les départements dotés d’une préfète ou d’un préfet chargé de l’égalité des chances : “c’est à l’évidence au sein des services déconcentrés de l’Education nationale que l’on rencontre les plus grandes difficultés à s’engager dans cette démarche nouvelle. Une posture de vigilance voire de méfiance a pu parfois être observée par la mission, notamment de la part de l’encadrement intermédiaire (inspecteurs et chefs d’établissement). Ce comportement est révélateur d’une culture systémique qui devra nécessairement évoluer pour la réussite de la démarche notamment quant à la co-construction d’un projet éducatif."

La mission estime que “les cités éducatives se caractérisent notamment par une nécessaire harmonisation des approches ministérielles qui ne sont pas exemptes de certaines visions divergentes“, et suggère, “au-delà de l’indispensable portage politique fort et permanent, qu’une délégation interministérielle soit créée pour porter et accompagner dans les territoires les spécificités de la démarche.“ (recommandation n°12).

Le rapport détaille ensuite “l’innovation majeure de la démarche des cités éducatives au service de cette mobilisation coordonnée des partenaires éducatifs dans les QPV“, à savoir un dispositif de gouvernance qui réunit au niveau politique, le préfet, le recteur et le maire (a minima, sans leader identifié), et au niveau opérationnel, un représentant du préfet, un principal de collège et un cadre de haut niveau pour la collectivité territoriale.

La mission insiste alors sur la place centrale des deux fonctions opérationnelles : “celle du principal de collège, chef de file de la cité éducative, d’une part, et celle du chef de projet opérationnel de la cité éducative“, un “mode de gouvernance partagée qui exclut par principe une organisation hiérarchique (qui) est le moteur de la démarche des cités éducatives et une de ses trois finalités (coopération des parties prenantes ; mise en cohérence des politiques publiques et élaboration d’une stratégie éducative ambitieuse).“

Ainsi “pour éviter l’écueil d’un énième dispositif de la politique de la ville et de l’éducation prioritaire, comme le craignent de nombreux interlocuteurs qu’elle a rencontrés", la mission recommande que “la cité éducative, conformément au concept qui en est à l’origine, devrait être le réceptacle permettant la mise en cohérence d’une partie des actions de dispositifs nombreux et pas toujours coordonnés“ (recommandation n° 13).

Par ailleurs, l’IGESR explique que “le rythme et le calendrier de la démarche nationale des cités éducatives apparaissent difficilement tenables et les interlocuteurs de la mission évoquent une avancée à marche forcée, des échéances courtes dans un contexte où les obstacles se multiplient (élections municipales, crise sanitaire, etc.). Dans certaines cités éducatives, la culture du résultat semble primer sur la recherche de projets d’actions qui requièrent du temps de maturation et d’appropriation. A l’opposé, dans d’autres cités éducatives, l’énergie mise à une conceptualisation complexe de la gouvernance se fait parfois au détriment de la capacité opérationnelle des acteurs. (..) La gouvernance originale des cités éducatives est parfois contrariée par des velléités de leadership entre les services des préfectures (‘celui qui paye décide‘) et les services académiques qui considèrent l’éducation comme ‘leur‘ domaine. La collectivité territoriale peut également être tentée de privilégier ses choix politiques locaux au détriment d’une démarche nationale partagée."

La mission estime d’ailleurs que “la question de la pérennisation et notamment du financement, au-delà de 2022, est posée et mérite une réponse tout comme la dotation de moyens humains adaptés pour tenir la charge d’une coordination nationale de 200 cités éducatives “, car selon elle “la démarche en cours, si elle apparaît bien engagée, requiert une consolidation notamment par un accompagnement rapproché et personnalisé qui portera notamment sur la gouvernance partagée dont la mise en place apparaît parfois difficile dans certains territoires“.

“Au-delà des légitimes inquiétudes quant aux divergences entre les cultures ministérielles et des pratiques administratives, conclut l’inspection générale, cette démarche montre d’ores et déjà que les échanges réguliers entre les acteurs, au niveau national comme territorial, ouvrent des voies nouvelles qui méritent d’être confortées, accompagnées et soutenues ; (…) le régime d’échanges et de concertation instituée au niveau territorial par les cités éducatives aura démontré son utilité lorsque ce programme se sera durablement inscrit dans les habitudes et les pratiques de travail dans les territoires.“ Elle recommande de "lancer au niveau national une réflexion sur l’avenir des cités éducatives et sur les conditions de leur pérennisation".

Le rapport ici (89 p.)

Extrait de touteduc.fr du 27.09.21

Télécharger le rapport

Établi par
François SCARBONCHI
Inspecteur général de l’administration

Laurent MAYET
Inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche

Jean-Marie PANAZOL
Inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche

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