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« Quelle image donne-t-on des enseignants ? » Entre profs volontaires et réticents, c’est tendu
Après dix jours de déconfinement, seuls 55% des enseignants ont repris le chemin de la classe. Certains y vont, d’autres sont dans l’incapacité de le faire. Pas sûr que l’unité du corps enseignant en sorte indemne.
[...] Les tensions sont d’autant plus vives que, derrière ces positionnements divergeants, se glissent parfois des visions différentes du métier. « Ça ne fait souvent que confirmer ce que l’on pensait les uns des autres, dit Laurence, directrice d’une école dans le Val-de-Marne. « La profession est clivée, on ne le découvre pas. » Coralie, la prof parisienne de grande section, volontaire pendant le confinement, s’interroge :
« Quelle image donne-t-on des enseignants alors que les soignants sont au taquet depuis trois mois ? On est fonctionnaire, agent d’Etat, on a un salaire qui tombe à chaque fin de mois ; pour moi, sauf contrindication médicale, j’estime qu’il y a une obligation morale à y aller ».
La blogueuse Anouk F, qui pour sa part a choisi la « peste » de l’école sous Covid plutôt que le « choléra » de l’école à distance, se fait philosophe.
« Cette situation de toute façon est clivante dans toute la société. On se juge. On regarde qui a son masque, qui ne l’a pas remis. C’est la comédie humaine et le corps enseignant n’y échappe pas ».
Faut-il pour autant s’inquiéter ? « Ça laissera peut-être des traces, mais ça ne nous empêchera pas de travailler ensemble », dit Véronique. La directrice croit qu’il sera possible « d’accompagner les plus effrayés et les plus récalcitrants dans un mouvement doux » grâce à la progressivité de la reprise. Sylvain, celui par qui nous avons commencé, ne pense pas différemment, bien qu’il aborde les choses par l’autre bout de la lorgnette :
« Dans l’Education nationale, on est un peu pessimiste, mais, en définitive, il se passe toujours des choses… »