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Des circulaires qui ne sont pas en prise avec le terrain (entretien de ToutEduc avec Catherine Nave-Bekhti, Sgen-Cfdt)

13 janvier 2023

"Des circulaires qui ne sont pas en prise avec le terrain" (Catherine Nave-Bekhti, SGEN-CFDT)

Pour Catherine Nave-Bekhti, interrogée par ToutEduc, les quatre "notes de service" publiées hier 12 janvier au Bullettin officiel "ne sont pas en prise avec les enjeux du terrain". La secrétaire générale du SGEN-CFDT se demande quels effets elles vont produire. S’agissant de la maternelle, le risque est qu’elle soit "emportée" dans une logique de propédeutique de l’élémentaire, que sa spécificité ne soit pas suffisamment prise en compte.

Catherine Nave-Bekhti : Au-delà de la maternelle, plus généralement, la remarque du DGESCO sur les rétroactions des tests de début de CP sur la maternelle conforte l’idée que le système éducatif est régi par l’aval, que ce sont les besoins du niveau supérieur qui influent sur le niveau inférieur, le lycée sur le collège, le collège sur l’école élémentaire, le CP sur la grande section, au lieu qu’on parte des besoins des élèves à chaque niveau. "Ce n’est jamais de bonne pollitique."

ToutEduc :Ces circulaires ont-elles été soumises aux organisations syndicales, avez-vous eu votre mot à dire ?

Catherine Nave-Bekhti : Elles nous ont été transmises pour information, pas pour concertation. Et elles posent question. Il ne suffit pas de publier une circulaire pour qu’elle ait un effet. Elle peut déboucher sur un contrôle tatillon de sa mise en oeuvre, ce que nous refusons et qui irait à l’encontre de la volonté exprimée "d’accompagner" les enseignants. Mais rien n’est dit des formations sur site, qui permettraient une réelle prise en compte du travail effectivement réalisé, et des difficultés rencontrées, qui ne sont pas partout les mêmes.

ToutEduc : N’y a-t-il pas des formations "en constellation" ?

Catherine Nave-Bekhti : Si, et nous avons certains très bons retours de nos collègues, qui apprécient surtout de pouvoir discuter entre pairs. Mais ailleurs se pose notamment le problème de leur remplacement le temps des formations, alors que l’on manque d’enseignants. On a toujours l’impression qu’on nous demande de faire mieux avec moins... Et dans ces circulaires, où est l’expression de la confiance faite aux enseignants ?

ToutEduc : Ces circulaires peuvent-elles modifier le travail des enseignants ?

Catherine Nave-Bekhti : Sur plusieurs sujets, non. Le calcul quotidien, c’est fait, de même que le calcul mental. Ecrire, oui, mais la rédaction demande un temps de préparation, d’élaboration préalable, une nécessité qui semble niée. Et ces injonctions, les mêmes pour tous, ne vont pas aider à la différenciation, à la prise en compte des difficultés spécifiques à chaque élève, à l’inclusion des élèves à besoins particuliers, dys, troubles de l’attention... Elles risquent de mettre en difficulté les élèves et les enseignants.

ToutEduc : Comment analysez vous la diminution d’une heure de l’horaire d’enseignement des sciences et technologie en 6ème, aux dépens de la technologie ?

Catherine Nave-Bekhti : Nous ne sommes pas nécessairement opposés à l’idée d’une heure de soutien ou d’approfondissement, même si nos collègues de l’académie d’Amiens nous font part des difficultés rencontrées, ne serait-ce qu’en termes d’horaires, de déplacements, de concertation. Il y a déjà des professeurs des écoles qui interviennent dans les collèges. Nous nous sommes d’ailleurs aperçu que leur rémunération pour ces heures supplémentaires était moindre que celle des professeurs de collège. Mais supprimer ainsi une heure de technologie en affirmant que cet enseignement sera renforcé pour le cycle 4 sans dire comment, sans donner aucune garantie à ce sujet, c’est plonger les enseignants de cette discipline dans l’inquiétude.

ToutEduc : Quel sentiment vous inspire, globalement, ces circulaires ?

Catherine Nave-Bekhti : Elles reflètent des choix qui ne sont pas assumés jusqu’au bout. On a parfois l’impression que le ministère voudrait exercer son droit d’inventaire sur les années Blanquer, mais que ce n’est pas fait réellement. Il soutient la logique des cycles, comme on le voit avec ces deux circulaires consacrées l’une au cycle 1, l’autre au cycle 3, mais il s’accroche aux "repères annuels". Il hésite entre "savoirs fondamentaux" et "compétences clés" du socle commun...

ToutEduc : A quoi vont-elles servir ?

Catherine Nave-Bekhti : Elles risquent de créer un trouble dans les relations avec les familles qui, pour prendre un exemple simple, ont une certaine représentation de la dictée. Or il existe bien d’autres formes de la dictée comme la "twictée". La dictée classique met en difficulté certains enfants sans leur apprendre l’orthographe pour autant, et mine leur confiance en soi. La pédagogie a beaucoup avancé sur tous ces sujets, on en est très loin avec ces circulaires.

Propos recueillis par P. Bouchard, relus par C. Nave-Bekhti

Extrait de touteduc.fr du 13.01.23

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