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L’école maternelle face à ses enjeux. Créer les conditions de l’égalité, sous la dir. de Christine Passerieux, Les éditions de l’atelier, sept. 2021 (entretien avec Le Café)

9 septembre 2021

Christine Passerieux : L’école maternelle face à ses enjeux
"La réflexion des auteur.e.s contribue à clarifier les enjeux et à déterminer des modalités à la hauteur des défis" de l’école maternelle. Alors que l’école maternelle devient obligatoire et en même temps absorbe de nouveaux programmes, un nouvel ouvrage, " L’école maternelle face à ses enjeux", juge important d’éclairer ses objectifs et ses méthodes. Viviane Bouysse, Véronique Boiron, Joël Briand, Anne Clerc-Georgy, Patrick Lamouroux, Maryse Rebière et Christine Passerieux unissent leurs forces pour aider les professeurs des maternelles à ne pas perdre de vue les finalités de cette école et notamment la réduction des inégalités. Christine Passerieux, qui l’a dirigé, présente cet ouvrage.

L’école maternelle fait l’actualité de la rentrée avec la réécriture de ses programmes et l’instruction obligatoire à 3 ans. Cette actualité motive t-elle la publication de ce livre ?

L’idée d’écrire ce livre est venue des interventions de JM Blanquer sur la maternelle et du besoin de faire quelque chose. J’ai proposé de faire ce livre pour sortir de l’abattement lié aux nouveaux programmes et faire des propositions. Nous voulons montrer qu’il n’y a pas de fatalité à la montée des inégalités sociales à l’école et redonner un espace de respiration à des enseignants malmenés.

Pour les auteurs, l’école maternelle est vraiment fondamentale, au sens où elle fonde l’avenir scolaire des enfants. Ce qui motive ce livre c’est le creusement des inégalités et l’abandon des programmes de 2015 qui avaient été accueillis avec enthousiasme par les enseignants.

Peut-on dire que les inégalités augmentent malgré les dédoublements en cours en GS ?

On verra quand on aura des résultats solides. Mais il ne suffit pas de dédoubler, même si c’est une mesure intéressante, pour diminuer les inégalités. Il faudrait que les enseignants soient mieux formés à ce qui fait la différence entre les enfants de façon à les aider à dépasser ce qui les bloque. Avec ce livre on veut intervenir sur cette question et sur le sens de l’école, la création de l’appétence à apprendre.

Dans l’ouvrage vous dites que la maternelle ne doit être ni la préparatoire du CP ni l’école de l’épanouissement. Mais ne doit-elle pas être les deux ? Que voulez vous dire ?

Elle ne doit pas être l’école préparatoire au CP telle qu’elle est conçue actuellement. La maternelle doit préparer le CP avec d’autres modalités. Quant à l’épanouissement, il doit être le fruit du plaisir à apprendre, de la découverte des pouvoirs que cela donne. Ce n’est pas naturel mais une construction culturelle qui fait écho à ce qui est enseigné à l’école. Le plaisir d’apprendre reste quelque chose de fondamental à l’école.

Vous dites que la réforme met l’accent sur l’apprentissage du langage et non de la langue. Mais qu’est ce que ça change ?

Cette confusion est largement signalée dans l’ouvrage. Le langage est un rapport au monde, une façon de le regarder. La langue d’est l’outil pour cela. On donne la priorité à l’outil. Or ce qui est essentiel c’est le langage. Le langage permet de penser le monde, de comprendre ce qu’on fait. Il donne du pouvoir aux enfants. Il permet de trouver sa place dans le collectif.

La place du jeu est aussi interrogée dans l’ouvrage. Quels jeux sont recommandés et pour quoi faire ?

Dans le nouveau programme, le jeu est un habillage pour faire passer la pilule des connaissances. Il est là pour cacher les savoirs comme si les enfants n’en voulaient pas. Anne Clerc-Georgy montre qu’il faut s’appuyer sur les jeux font spontanément, par exemple les jeux de faire semblant où ils imitent les adultes. Ce jeu de faire semblant est accompagné par l’enseignant qui obtient des informations sur ce qu’il doit travailler. L’enfant s’installe dans un scénario amené de la maison et progressivement le fait évoluer avec ce qu’il fait à l’école. Et cela aune forte incidence sur ses apprentissages. Petit à petit les enfants construisent des jeux où les objets changent de signification et la pensée se détache de l’objet et du mot. C’est une mise à distance de son expérience et c’est essentiel pour les apprentissages scolaires.

Qu’a changé la réforme des programmes au regard des objectifs de l’école maternelle ?

Elle omet de considérer les enfants comme des sujets. On a l’impression que les enfants doivent se remplir de connaissances indispensables, de savoirs fondamentaux réduits au minimum. Des évaluations ne peuvent que stigmatiser les enfants. Les programmes de 2015 méritaient plus de temps pour leur mise en place. Il faudrait vraiment arrêter de tout transformer sans arrêt, mieux prendre en compte les pratiques des enseignants et davantage faire confiance aux capacités des enfants.

Cette nouvelle école maternelle ne prépare pas à l’acculturation au monde scolaire. Ou alors dans une acception trop étroite.

Propos recueillis par François Jarraud

Viviane Bouysse, Véronique Boiron, Joël Briand, Anne Clerc-Georgy, Patrick Lamouroux, Maryse Rebière et Christine Passerieux, L’école maternelle face à ses enjeux. Créer les conditions de l’égalité. Les éditions de l’atelier. ISBN : 9782708253803

Extrait de cafepedagogique.net du 08.09.21

 

Note du QZ : Viviane Bouysse est membre du Conseil scientifique de l’OZP.

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