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Projet de loi séparatisme : - le dossier du Menjs - l’avis de la défenseure des droits sur l’instruction en famille - "le défouloir du populisme" (Le Café)

18 janvier 2021

Projet de loi confortant le respect des principes de la République : quelles mesures pour l’Éducation nationale ?

[...] L’obligation scolaire à 3 ans (article 21)
La scolarisation obligatoire est l’expression d’une conviction profonde : l’École est bénéfique pour l’enfant, pour l’étendue de ses apprentissages, pour sa sociabilisation, pour son plein développement en tant que personne.

Le nombre d’enfants concernés en instruction en famille connaît une augmentation forte depuis 10 ans : on constate une multiplication par plus de 3, avec une accélération entre 2016 et 2020. L’instruction en famille (IEF) concerne globalement 0,5 % du total des élèves de France, soit 62 000 enfants à la rentrée 2020.

Projet de loi valeurs de la république - tableau

Les enfants instruits en famille peuvent relever du CNED réglementé, pour des motifs de maladie, handicap, famille itinérante, éloignement géographique ou activités sportives ou artistiques de haut niveau (cf circulaire n° 2017-056 du 14 avril 2017). En 2020, la part d’enfants inscrits au CNED réglementé représente 17 000 élèves, et la part d’enfants en IEF par choix des parents représente 45 000 élèves soit près de ¾ du total, une répartition qui s’est inversée au cours des dernières années.

Ce choix des familles "pour raisons personnelles" peut s’expliquer par de multiples facteurs, dont en partie cette année la récente crise sanitaire, ou encore le succès grandissant des pédagogies alternatives, mais aussi par une volonté de repli associée à des phénomènes sectaires ou de radicalisation, pouvant menacer les droits de l’enfant. Il s’agit alors d’un détournement d’usage de ce choix d’éducation. Le fait que 50% des enfants présents dans les écoles clandestines récemment démantelées étaient officiellement déclarés comme instruits à domicile, illustre ce propos.

C’est pourquoi l’article 21 du projet de loi propose de restreindre la possibilité d’avoir recours à l’instruction en famille. Il s’agirait de passer d’un régime où l’instruction en famille est possible sur simple déclaration, à un régime où chaque famille souhaitant instruire ses enfants en famille devrait obtenir une autorisation basée sur une liste restreinte de motifs, à l’exclusion de tout autre motif en particulier politique, philosophique ou religieux.

Le régime de l’instruction en famille deviendrait donc dérogatoire, le droit commun privilégiant l’accès à l’École, que celle-ci soit publique, privée sous contrat ou hors contrat. Parmi les motifs permettant d’accéder à cette dérogation, figureront les exceptions du CNED réglementé – santé, handicap, activité sportive ou artistique de haut niveau, famille itinérante, éloignement géographique – ainsi que la justification d’être en capacité, pour le représentant légal, de faire l’instruction à domicile selon l’âge de l’enfant et dans le respect de ses droits.

À côté de ce nouveau contrôle a priori subsistera le contrôle a posteriori, destiné à vérifier les conditions effectives dans lesquelles s’exerce l’instruction dans la famille. Hormis ces situations particulières, les enfants devront nécessairement aller à l’École, les parents conservant à cet égard leur liberté de choix.

Établissements privés hors contrat : possibilité de fermeture administrative et renforcement du contrôle des équipes pédagogiques et des sources de financement (article 22)
À la rentrée 2020, la situation montre que 85 000 élèves se trouvent dans les établissements privés hors contrat – 50 000 dans le premier degré et 35 000 dans le second degré. On évalue que ces établissements se répartissent en trois tiers à peu près équivalents entre tenants de méthodes fondées sur une pédagogie alternative type Montessori, établissements qui se déclarent laïques et établissements revendiquant une appartenance confessionnelle.

Depuis trois ans, l’État s’est engagé pour un meilleur suivi des établissements hors contrat. Grâce aux mesures de la loi Gatel (2018) et de la loi pour l’École de la confiance (2019), l’ouverture de ces structures scolaires a été subordonnée à un contrôle beaucoup plus strict. Le cadre existant en matière d’ouverture et de gestion des structures hors contrat appelait quelques ajustements supplémentaires qui sont proposés dans le texte de la loi confortant le respect des principes de la République.

Aujourd’hui, lorsqu’un établissement hors contrat ne respecte pas ses obligations pédagogiques, l’État ne peut demander sa fermeture qu’en se fondant sur des règlementations particulières (droit du travail, règlementation sanitaire ou de sécurité, etc.) et la fermeture définitive d’un établissement hors contrat ne peut être ordonnée que par le juge pénal. Pour sa part, le ministère de l’Éducation nationale a seulement le pouvoir de mettre en demeure les parents des élèves d’inscrire leur(s) enfant(s) dans un autre établissement, et de saisir le procureur de la République. Cette situation implique des délais de jugement longs et une incertitude sur la condamnation prononcée, la fermeture de l’établissement ne constituant que l’une des peines prévues. La fermeture administrative vise, dans l’intérêt de l’enfant, à accélérer la fermeture effective de la structure concernée, la décision de l’administration étant placée sous le contrôle du juge.

Obligation de déclarer, tous les ans, l’ensemble des personnes qui travaillent dans un établissement hors contrat. Cette déclaration permettra à l’administration de s’assurer que l’ensemble des personnels de l’établissement, et non seulement son directeur et les professeurs, ne fait l’objet d’une quelconque incapacité juridique. L’administration pourra notamment vérifier le casier judiciaire des intéressés.
Contrôle du financement des établissements tout au long de leur existence. La Loi Gatel prévoyait déjà un contrôle des financements d’un établissement hors contrat lors de son ouverture. Désormais l’établissement devra fournir, sur demande de l’administration, les documents comptables, la nature et l’origine de ses ressources, en particulier lorsqu’elles proviennent de l’étranger.
Soumettre la conclusion d’un contrat simple et d’un contrat d’association à la condition d’un enseignement conforme à l’objet de l’instruction obligatoire (article 23)
Tout établissement scolaire public, sous contrat ou hors contrat, se doit de transmettre à ses élèves un socle minimal de connaissances. Le respect des normes minimales de connaissances requises par le code de l’éducation s’impose à tous. Le respect de ces normes minimales ne figurant pas explicitement dans la liste des conditions préalables à la conclusion d’un contrat simple ou d’un contrat d’association, le projet de loi propose de clarifier ce point.

Précisions concernant l’identifiant national élève (INE)
L’identifiant élève ou INE est aujourd’hui attribué à l’ensemble des élèves inscrits dans les écoles publiques et privées sous contrat et au CNED. Plus de 12 millions d’élèves scolarisés en France aujourd’hui ont déjà un identifiant national élève (INE).

Environ 130 000 élèves pourraient ne pas avoir d’INE car à aucun moment ils n’ont pu être pris en compte par l’éducation nationale. Il s’agit d’une partie des élèves inscrits en établissement privé hors contrat et d’une grande partie des élèves en IEF hors CNED réglementé.

Appliquer un INE à tous les élèves sans exception demande des ajustements techniques importants qui requièrent une expertise et du temps supplémentaire. Son principe est maintenu mais il va être décalé par rapport au projet de loi, le temps du règlement de ces problèmes. À cette fin, un groupe de travail avec le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales et l’appui de la direction interministérielle du numérique (DINUM) a été mis en place afin d’expertiser les moyens permettant d’étendre à l’ensemble des communes la mise en œuvre d’un traitement automatisé de données pour le recensement scolaire. Ce nouveau dispositif permettra de garantir la remontée systématique et exhaustive de ces données aux autorités académiques.

Les conclusions de ce groupe de travail seront connues courant décembre ce qui permettra au gouvernement d’en tirer les conséquences juridiques et de déposer un amendement afin de proposer un dispositif approprié à la représentation nationale.

Extrait de education.gouv.fr

 

Avis du Défenseur des droits n°21-01
La Défenseure des droits,
Vu l’article 71-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu la loi organique n°2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ;
Auditionnée par la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la République, Emet l’avis ci-joint.

EXTRAIT (page 5)
V. L’instruction dans la famille
L’article 21 du projet de loi pose que l’instruction à l’école deviendrait la règle et l’instruction à domicile l’exception, substituant ainsi un régime d’autorisation au régime de déclaration.
Tout au long de son histoire, l’École de la République s’est développée sur la base de la seule obligation d’instruction assortie de contrôles, qui a permis la cohabitation de l’École publique, gratuite et laïque, de l’enseignement privé sous contrat d’association, de l’enseignement privé hors-contrat et de l’instruction en famille – ce qui n’empêche pas la priorité accordée aux établissements d’enseignement (depuis la loi n° 98-1165 du 18 décembre 1998 tendant à renforcer le contrôle de l’obligation scolaire).
Cette possibilité étant inscrite depuis la loi du 28 mars 1882 dite « loi Ferry », notons donc à titre liminaire qu’il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre une école républicaine et la liberté laissée aux parents de choisir des modalités pratiques de l’instruction de leur enfant – dans le respect de leur intérêt supérieur.

La Défenseure des droits formule donc plusieurs réserves sur cette nouvelle disposition.
Quant à l’objectif visé, tout d’abord. En effet, la place de ces dispositions dans ce projet de loi interroge sur la possibilité qu’elles soient motivées par des seuls impératifs sécuritaires plutôt qu’au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant. A ce titre, la loi viendrait remettre en cause l’instruction à domicile de nombreux enfants aux besoins fondamentaux desquels elle répond pourtant de manière satisfaisante.
Quant à sa nécessité et sa proportionnalité ensuite :
 D’une part, et sous toutes réserves, l’étude d’impact n’apporte aucun élément clair et aucune visibilité sur les profils des enfants et des familles concernées actuellement par l’instruction à domicile et sur le risque de prosélytisme au sein de l’instruction dans la famille ;
 D’autre part, la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance vise déjà à clarifier et resserrer l’encadrement des contrôles pédagogiques de l’instruction dans la famille. Il semblerait utile de commencer par faire le bilan du renforcement des modalités et du contenu des contrôles introduit par cette loi. D’autant qu’un vademecum a été élaboré très récemment par le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports pour présenter le cadre législatif et réglementaire du
ontrôle de l’instruction en famille.
Plusieurs réserves méritent par ailleurs d’être formulées quant à la compatibilité des dispositions introduites par le texte avec la liberté d’enseigner des parents.
 Alors même que la valeur constitutionnelle de cette liberté a été reconnue et qu’elle découle de la liberté d’élever ses enfants conformément à ses croyances religieuses et morales (reconnue notamment par la CIDE et la Charte des droits fondamentaux de l’UE)1, elle se trouve très amoindrie par cet article ;

Notes
1 V. not. art. 14 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 12/12/2007 : « (…) « 3. La liberté de créer des établissement d’enseignement dans le respect des principes démocratiques, ainsi que le droit des parents d’assurer l’éducation et l’enseignement de leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses, philosophiques et pédagogiques, sont respectés selon les lois nationales qui en régissent l’exercice ».

 En outre, les critères qui seront utilisés par les services académiques pour mesurer la « capacité des parents à assurer l’instruction en famille », d’ailleurs évoquée uniquement dans le 4e motif dérogatoire, ne sont nullement précisés. Cette formulation trop générale pourrait générer d’éventuelles discriminations, selon l’interprétation qui en sera faite par les services académiques, les situations amenant à déroger à la règle de la scolarisation obligatoire pouvant être diverses.
Si la Défenseure des droits comprend et partage pleinement la nécessité de mieux prévenir les risques de déscolarisation ou de soustraction des enfants à l’obligation d’instruction, il tient à rappeler que l’ensemble des mesures prises dans ce but doivent être subordonnées, dans leur conception comme dans leur mise en œuvre, à la considération primordiale de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Extrait de juridique.defenseurdesdroits.fr du 12.01.21

 

La loi séparatisme, défouloir du populisme
"La laïcité c’est la liberté. Il ne faut pas l’oublier". La remarque d’Emilie Trigo, secrétaire nationale de l’Unsa, retentit toujours. Alors que le texte du projet de loi va passer en commission, puis, début février, devant l’Assemblée, il apparait qu’il a surtout pour effet de coaliser populisme et extrémisme. Parmi les près de 2000 amendements déposés beaucoup relancent des guerres scolaires inutiles.

Extrait de cafepedagogique.net du 18.01.21

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