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Nicolas Sarkozy à La Courneuve : discrimination positive, stigmatisation des cités et dynamisme local : Braouezec et le maire de La Courneuve parlent

3 août 2005

Stigmatiser la Courneuve comme l’a fait Nicolas Sarkozy, c’est nier le dynamisme local.
Par Patrick Braouezec, député PCF de Seine-Saint-Denis et Gilles Poux, maire PCF de La Courneuve

Extrait de Libération du 3.08.05 : Cités : la méthode

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Le ministre de l’Intérieur se rend à trois reprises à La Courneuve en trois semaines, multipliant les promesses et les déclarations. Des centaines de cités en France vivent des situations semblables à celle de La Courneuve. Rien ne saurait justifier la campagne de stigmatisation qui est à l’oeuvre. On ne saurait pas davantage accepter à partir d’un drame la mise en concurrence des gens et des territoires qui connaissent des situations comparables.

Espère-t-on ainsi contribuer au règlement de questions de société inscrites dans la durée, résultat de tendances lourdes que l’Etat a rarement participé à inverser en s’investissant au niveau nécessaire ?

Espère-t-on faire oeuvre positive en créant un climat d’urgence, présupposant un environnement de guerre, pour rapatrier sur ce terrain quelques moyens (bien insuffisants de surcroît) pris ailleurs sur d’autres projets ainsi supprimés, sur d’autres quartiers qui en ont le même besoin, dans le but de concentrer quelques effets ici, au risque de promouvoir une logique désastreuse pour tous ?

Espère-t-on faire oeuvre positive en tentant d’instrumentaliser, non sans mépris, les élus locaux (qui, pour leur sensibilité de terrain, leur souci d’efficacité et leur proximité des gens, sont pourtant les politiques les mieux appréciés des citoyens), ainsi que l’ensemble des administrations, en particulier celles de l’Etat à tous les niveaux, traités en serviteurs ?

Espère-t-on faire oeuvre positive en humiliant les gens eux-mêmes puisque ce quartier des 4 000 à La Courneuve a été déclaré comme devant être nettoyé au Karcher (des mots lourdement chargés d’histoire, qui parlent d’épisodes sanglants portant toujours le sceau du racisme et de la négation de la personne humaine, qui méritent toute l’inquiétude qu’ils suscitent) ? Mesure-t-on l’impact de telles formules prononcées par un représentant du gouvernement, des formules qui assimilent des gens (cela fait mal à écrire) à des saletés, qui les rayent de leur qualité de citoyens égaux, qui ne les « calculent » plus, alors que c’est précisément de ce doute dont souffre le plus tout un chacun ? Mesure-t-on la charge d’exclusion portée par de tels mots ?

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Espère-t-on faire oeuvre positive ainsi ? Ou cherche-t-on bien autre chose que le positif ?

Elus locaux, avec les populations nous avons toujours su refuser les fatalités auxquelles on semble s’acharner à vouloir nous soumettre.

Nous sommes ensemble confrontés aux enjeux vitaux d’une société qui va mal, en général, pas seulement ici. Peut-être même ici moins qu’ailleurs si l’on veut bien regarder plus loin que la surface, parce que les gens qui vivent ici n’ont jamais renoncé à un avenir riche de mélange, de solidarité et de vivre ensemble.

Depuis toujours il se tisse ici du positif. Pas sur ordonnances : en mobilisant les capacités d’initiative, les compétences de chacun, le désir d’une vie meilleure, la certitude que rien n’est octroyé, le besoin d’égalité, le potentiel associatif, tous les potentiels de toute sorte du territoire, y compris en développement d’activités, les savoir-faire solidaires. Dans des réseaux de participation à la vie locale, des réseaux citoyens et démocratiques, où tous doivent savoir avoir également leur place, que l’on soit citoyen français ou étranger, quelles que soient les ressources.

Nous savons d’expérience que le vivre ensemble se tisse d’abord sur la reconnaissance de la valeur de chacun, de chaque culture.

Dans notre département de Seine-Saint-Denis se trouvent les huit communes dont les familles ont les revenus les plus modestes d’Ile-de-France (le revenu fiscal moyen des habitants de La Courneuve est de 8 500 euros par an, à comparer aux 17 500 euros pour l’Ile-de-France). Ces villes se sont regroupées en communauté d’agglomération pour se donner plus de poids, s’ouvrir des partenariats plus larges, se donner un nouvel élan et donc des perspectives plus importantes.

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Il est inacceptable, de même, de prétendre régler les questions de l’école et de la formation par des rendez-vous imposés dans l’urgence au recteur, au coup par coup. C’est nier le remarquable travail collectif mené plusieurs mois durant sous le pilotage du recteur avec les lycées et les deux universités (Paris-VIII à Saint-Denis et Paris-XIII à Villetaneuse, et leurs IUT) du bassin de vie, pour un plan de développement cohérent et ambitieux pour les jeunes d’ici, des formations postbac.

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La banlieue, les quartiers populaires des villes sont largement porteurs de positif. Un positif qui s’invente sans doute ici plus qu’ailleurs, poussé par la difficulté des problèmes, porté par la capacité des gens et leur volonté de résistance, de ne jamais renoncer à l’espoir.

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