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Cinéma
Cinéma : Claire Simon retourne à l’école pour « Apprendre »
Apprendre, le nouveau documentaire de Claire Simon, simple et belle immersion à hauteur d’enfant dans le quotidien d’une école élémentaire d’Ivry-sur-Seine, en salles dès le 29 janvier prochain. Après Récréations en 1992 (les petits de la Maternelle dans la cour entre eux), Le Concours en 2017 (des filles et des garçons traversant les épreuves au fil du parcours d’obstacles pour intégrer la Fémis, l’école de cinéma très sélective) et Premières Solitudes en 2019 (lycéennes et lycéens réunis dans un atelier cinéma confient tourments et joies, soucis familiaux et emballements amoureux, matière d’un film coréalisé avec eux), Claire Simon retourne à l’école pour Apprendre.
Filmée du point de vue des élèves, ‘la fabrique du citoyen’
Magnifique réussite, fruit d’un tournage au long cours dans cinq classes de l’école Anton Makarenko, avec l’accord de l’équipe éducative et des parents. Accompagnée de son ingénieur du son, munie d’une petite caméra de la taille d’un appareil photo, la cinéaste se tient aux côtés des enfants (rapidement oublieux de sa présence, pris dans la concentration sur leurs activités), toujours dans le mouvement des différentes formes de découvertes, d’apprentissage, des savoirs fondamentaux à la musique et au chant, en passant par les jeu ou le sport, de la cour de récréation et ses violences au rappel à la loi et aux règles de discipline ; de la parade masquée dans les rues ou la visite de Paris en remontant la Seine à bord d’un bateau mouche.
Ainsi voyons-nous se dessiner une microsociété, une petite communauté de plus en plus large, ouverte au groupe, aux autres, aux adultes, et au monde.
Et ce, grâce au regard et à l’écoute d’une réalisatrice sensible à l’étonnement, aux questionnements incessants des enfants en confiance et aux sollicitations des enseignants obstinés à ne laisser aucun des élèves en panne de progression, de compréhension.
Pas de commentaire en voix off ni de parole intrusive de la part de Claire Simon. Nous entrons sans a priori ni mode d’emploi, à rebours des reportages spectaculaires filmés à la va-vite. Pas d’angélisme non plus : dans cette école élémentaire accueillant des enfants de toutes les origines, la confrontation avec la culture légitime dominante, la difficulté d’accès à certaines œuvres musicales, picturales ou architecturales (comme les monuments ‘célèbres’ de la capitale), entre autres épreuves de classe ou de genre, la tentation de la violence au détriment du recours à la parole et à la maîtrise des émotions, les différences en matière de croyances et de religions, ces facteurs essentiels à la construction de chacune et de chacun, dans son rapport à la société et sa place dans le monde de demain, ne sont pas éludés.
Une vision juste et énergique de l’exigence et de la patience des enseignants
Pourtant, Apprendre parvient à restituer la richesse infinie du verbe ‘apprendre’. Les enfants apprennent des adultes, et ces derniers leur apprennent. Et nous apprenons des uns et des autres. La souplesse du dispositif de tournage et l’extraordinaire disponibilité de Claire Simon – et de l’ingénieur du son, Pierre Bompy – mettent au jour un émerveillement partagé. A voir chaque élève évoluer au fil de l’année, prendre la main tendue par le directeur (et ne plus la lâcher) chez Amadou nouveau venu, perdu dans la cour, surmonter une difficulté de lecture pour Elisa, trouver enfin le groupe nominal dans la phrase, ‘Les tableaux de Picasso embellissent le musée’, pour Mohamed butant sur le nom du peintre, accepter pour un garçon et une fille de transformer la lutte de genre en combat sportif à condition d’en maîtriser la technique, chanter ensemble et en chœur « Diamonds » de Rihanna. Autant de prouesses individuelles ou collectives à accomplir. Et pas seulement pour faire plaisir à la maîtresse ou au maître, même si on l’aime.
La cinéaste montre ici la capacité d’accueil de l’école élémentaire ‘vraiment fondamentale’ dans ce ‘bastion républicain’ à ses yeux. Et elle confie avoir été ‘éblouie par l’attention, la pertinence des enseignants qui offrent un cadre ouvert à la singularité, aux rythmes d’apprentissage extrêmement divers’ ; et elle souligne ‘la patience, l’exigence’ qu’implique le geste d’apprendre.
Nous reviendrons bientôt sur ce remarquable documentaire, présenté en séance spéciale de la Sélection Officielle du Festival de Cannes 2024, en avant-première à l’automne dernier lors de la Journée mondiale de l’enseignement de l’Unesco notamment, et soutenu par Le Café pédagogique.
Samra Bonvoisin
« Apprendre », film de Claire Simon-sortie le 29 janvier 2025
Extrait de cafepedagogique.net du 21.01.25
Le dossier sur condor-films.fr
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