> Enseignement supérieur et Ouverture sociale > Cordées de la réussite > Cordées de la réussite (Actions/Situations locales et acad.) > Malgré les instructions officielles, les cordées de la réussite ne (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Malgré les instructions officielles, les cordées de la réussite ne s’appliquent pas essentiellement aux collèges - et encore moins aux lycées - des territoires et dispositifs prioritaires. Une enquête du "Quotidien des ZEP"

1er février 2011

Malgré les instructions officielles, les cordées de la réussite ne s’appliquent pas essentiellement aux collèges - et encore moins aux lycées - des territoires et dispositifs prioritaires.

C’est ce que révèle une enquête du Quotidien des ZEP réalisée à partir des données disponibles en ligne et portant sur 6 académies : Aix-Marseille, Besançon, Créteil, Lille, Nice, Versailles (Val-d’Oise).

Rappelons que ces cordées de la réussite, selon les déclarations du 18.11.08 de Valérie Pécresse et de Fadela Amara sur le site du Premier ministre, créent "un label pour promouvoir l’égalité des chances et la réussite des jeunes face à l’entrée dans l’enseignement supérieur" et "instituent un partenariat entre des établissements de l’enseignement supérieur (grande école, université ou lycée à classes préparatoires) et des lycées situés dans des quartiers prioritaires".
Le dispositif a été étendu aux collèges en mai 2010.

 

Les chiffres sont éloquents
Pour l’ensemble de ces 6 académies, sur environ 167 lycées en cordée, 45 seulement (soit environ 27%) sont en territoire prioritaire (quartiers Espoir banlieues ou anciennes ZEP-REP) ou en dispositif prioritaire (site d’excellence, dispositif expérimental de réussite scolaire (DERS) ou internat d’excellence) (2).

Les collèges, qui ont été introduits plus tardivement, sont mieux - ou moins mal - représentés puisque, sur les 97 en cordée, 49 (soit environ 51%) sont en RAR, en RRS, en quartiers Banlieues (ou en internat d’excellence).

 

Ce que disent les textes officiels
Ils sont clairs sur ce point.
La circulaire fondatrice du 14 janvier 2009, très restrictive, indique que le dispositif "institue un partenariat avec des "lycées sources" relevant de l’éducation prioritaire (1) ou des territoires de la Ville (2)".

La circulaire du 5 mai 2010, qui fixe les modalités de la campagne pour la rentrée 2010, précise : "Les collèges partenaires relèveront prioritairement des 215 quartiers de la dynamique "Espoir banlieues" et/ou de l’éducation prioritaire, plus particulièrement des réseaux ambition réussite".
« …vous devez veiller à la présence dans les cordées de l’ensemble des établissements du second degré relevant des 215 quartiers prioritaires (soit 60 lycées généraux et technologiques ou polyvalents, 53 lycées professionnels et 247 collèges)  » [l’enquête du QdZ montre qu’on est très loin du compte, ndlr].

Cependant cette seconde circulaire autorise un élargissement à d’autres dispositifs, tous faisant partie du plan Espoir banlieues, et même de façon très limitée (zones rurales) à des établissements hors dispositifs : « Pour autant, les projets intégrant des établissements situés hors des 215 quartiers de la politique de la ville, notamment en zone rurale, ne doivent pas être systématiquement écartés. En effet, les élèves y rencontrent des difficultés analogues : même manque d’ambition scolaire, même phénomène d’autocensure et d’ancrage dans un lieu et un milieu. De même, les lycées déjà concernés par des mesures de la dynamique « Espoir banlieues », comme les sites d’excellence et les lycées qui expérimentent le dispositif de réussite scolaire ont vocation à entrer dans une cordée. »
Cette possibilité d’élargissement s’étend aussi aux internats d’excellence (3) et aux lycées avec CPGE (4).

 

Comment expliquer cette non-application des textes ?
Faut-il avancer l’idée que la recherche de la performance dans ces programmes d’excellence pousse l’administration et les chefs d’établissement d’un côté comme les grandes écoles et universités de l’autre à choisir des établissements situés dans des banlieues déshéritées mais sans aller jusqu’à privilégier ceux qui sont le plus en difficulté (avec l’idée implicite qu’on a statistiquement moins de chances dans ceux-ci de trouver des élèves d’un certain niveau scolaire) ?

On retrouverait alors au niveau des établissements la dérive constatée souvent au niveau des élèves dans les dispositifs de soutien : ce sont ceux qui en le plus besoin qui en profitent le moins.
Un effet pervers auquel on devrait être davantage attentifs !

Une autre explication réside dans la tension qui existe entre deux options de la politique actuelle en direction des élèves de milieu défavorisé et qui a souvent été analysée.
. une politique d’excellence qui vise à extraire les élèves de milieu modeste et "méritants" de leur environnement scolaire et social pour les aider à rejoindre l’élite scolaire ;
. une politique de lutte contre la ségrégation scolaire et sociale qui vise à améliorer les performances de tous les élèves résidant dans ces territoires marginalisés.
Il est permis de penser que les cordées de la réussite, comme la majorité des autres mesures du volet éducatif de la dynamique Espoir banlieues, s’inspirent plutôt de la première option.

Entendons-nous bien. Il ne s’agit pour le Quotidien des ZEP d’exclure de ce louable dispositif d’autres élèves issus de milieu modeste sous prétexte que leur établissement n’appartient pas à un territoire prioritaire, mais seulement de veiller à ce que la priorité soit réellement donnée, comme les textes officiels le prescrivent, aux zones les plus défavorisées et en particulier à celles qui relèvent de l’éducation prioritaire ou des quartiers Espoir banlieues.

En ce sens, on doit considérer comme une inflexion positive le fait que les collèges en éducation prioritaire (RAR et RRS) et ceux des quartiers Espoir banlieues sont mieux représentés (avec un petit 51%) dans les cordées de la réussite que les lycées.

 

Notes

1) En janvier 2009, cela faisait référence à l’ancienne liste des ZEP-REP de 2005, qui comprenait un certain nombre de lycées. Nous les avons pris en compte.
Mais nous n’avons pas relevé les collèges et lycées en Clair, dispositif plus récent.
2) Il s’agit des établissements situés dans les 215 quartiers Espoir banlieues.
3) La plupart des lycées et collèges entrant dans cette catégorie sont des établissements offrant des places labellisées "internat d’excellence" et non de véritables internats d’excellence.
4) Les lycées avec CPGE sont cités dans les deux circulaires comme entrant dans la catégorie des "formations longues" vers lesquelles tendent les cordées de la réussite, au même titre que les université et les grandes écoles. Les classes prépas relèvent effet de l’enseignement supérieur et certaines sont installées dans des lycées de centre ville très prestigieux et n’ayant pas grand chose à voir avec les zones prioritaires.
Cependant tous les lycées avec CPGE ne sont pas situés dans des quartiers favorisés et certains figurent dans les listes des "lycées sources" des cordées. Nous les avons signalés en italiques maigres mais sans les prendre en compte dans nos calculs.

Important : Les listes d’établissements relevant des différents dispositifs cités se trouvent réunies sur une seule page dans la rubrique "Annuaires" du site de l’OZP

Le Quotidien des ZEP

 

Lire les commentaires déposés sur l’ensemble du site

Répondre à cet article

2 Messages de forum