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Rapport Armand-Gille des deux inspections générales (nov. 2006) : l’état des primes dans les différentes "zones" et des incitations de carrière

novembre 2006

« La contribution de l’éducation prioritaire à l’égalité des chances des élèves »

octobre 2006

Rapport conjoint Inspection générale de l’Education nationale (IGEN) et Inspection générale de l’Administration de l’Education nationale (IGAENR).

Voir le texte complet du rapport des inspections générales

 

pp. 19-21 Des personnels mieux payés : un empilement historique de mesures destinées à
trouver, puis à maintenir des enseignants et des personnels dans les établissements
d’éducation prioritaire

De nombreux dispositifs, qui se voulaient attractifs, ont été mis en place et se sont peu à peu
surajoutés en direction des personnels pour leur assurer des bonifications financières (cf infra
ISS, NBI, ASA), pour faciliter la mutation des enseignants après quelques années dans
l’Éducation prioritaire (prise en compte dans les barèmes de mutation des années passées en
ZEP, PEP IV, APV), pour accélérer l’avancement de carrière (avancement de grade et
promotion de corps), auxquels il convient d’ajouter des dispositifs spécifiques de formation et
d’accompagnement social afin de répondre aux difficultés d’installation, de logement et
d’entrée dans le métier (Île-de-France).

Certaines de ces mesures sont destinées à tout le territoire de l’éducation prioritaire, d’autres à
certains périmètres géographiques (PEP IV, NBI etc...), d’autres sont interministérielles
(politique de la ville). Beaucoup ont été décidées pour enrayer des situations de crise.

En ZEP :
 l’indemnité de sujétion spéciale (ISS) d’un montant annuel de 1 116 € instituée par le
décret du 11 septembre 1990 pour les enseignants et les personnels d’éducation et de
documentation exerçant en ZEP (94 235 agents répartis dans 6 746 établissements pour
un montant total de 103 M € en loi de finances de 2005) ;
 la nouvelle bonification indiciaire (NBI) de 15 points d’indice, soit 805 € annuels par
agent, destinée aux personnels ATOSS affectés en ZEP (10 815 emplois pour un
montant total de 8,5 M € en 2005) ;
 le sur classement des catégories d’établissements du second degré qui augmente les
régimes indemnitaires (BI et NBI) des personnels de direction.

En zone sensible :
 une NBI de 30 points d’un montant annuel de 1 611 € non cumulable avec l’ISS ZEP
est versée aux personnels enseignants et de documentation exerçant en zone sensible
(10 760 emplois, 17 M €) ;
 la part modulable de l’indemnité de suivi et d’orientation des élèves (ISOE),
normalement versée au professeur principal peut, en zone sensible être versée à deux
enseignants. La quasi-totalité des enseignants affectés en zone sensible bénéficie de la
part modulable (de 854 à 1 344 € annuels) ;
 une NBI de 20 points est versée aux ATOSS exerçant en zone sensible, soit 1 034 €
annuels (3 306 emplois pour un montant de 3,5 M €).

En zone violence :
 l’avantage spécifique d’ancienneté (ASA) qui est accordé aux agents accomplissant de
manière continue l’essentiel de leurs fonctions en zone violence, consiste en une
bonification d’ancienneté égale à trois mois pour les trois premières années, puis deux
mois ensuite. 60 000 agents en bénéficient, le coût est difficile à évaluer puisqu’il varie
en fonction du corps, du grade, de l’échelon, de l’ancienneté dans le poste.

Certaines de ces mesures sont très structurantes : à titre d’exemple, l’ISS et les NBI sont les
seules mesures qui marquent la spécificité de l’appartenance à une ZEP ou une zone violence.

Certaines sont très coûteuses, d’autres ne coûtent rien.
L’objectif était de favoriser la nomination d’enseignants titulaires dans ces zones peu
attractives, d’essayer d’assurer la stabilité des équipes, de « reconnaître » un effort considéré
comme particulier.

Synthèse des réponses au questionnaire adressé aux recteurs
La plupart des académies (Limoges, Lille, Orléans-Tours, Paris, Toulouse, Guyane) déclarent explicitement s’en
tenir, dans le premier degré, comme dans le second degré, à la mise en oeuvre des mesures nationales :
bonifications au barème pour les mutations, les promotions, mesures indemnitaires. Quelques-unes d’entre elles (Aix-Marseille, Amiens, Clermont, Créteil, Montpellier, Poitiers, Strasbourg) évoquent des mesures
« spécifiques », sans pour autant mettre en évidence ce qui les distinguerait des mesures générales prévues au
plan national.
Grenoble est la seule académie à évoquer explicitement un « quota spécifique REP » en CAPA
pour les promotions ; mais le champ de cette mesure (premier degré, second degré), sa teneur (quel
pourcentage ?), les conditions de sa mise en oeuvre (imposée, négociée ?) ne sont pas précisés.
Plusieurs
académies indiquent que les avantages de carrière ZEP sont désormais dilués dans le dispositif APV (Affectation
à caractère prioritaire justifiant une Valorisation) dont les champs ne se recoupent pourtant pas. Ce constat est à
rapprocher des observations sur l’attractivité et la difficulté de pourvoir les postes en secteur d’isolement rural ou ulturel. Par exemple, à Clermont : alors que 12 collèges sont en ZEP, seuls 2 d’entre eux sont inclus dans le
dispositif APV qui s’applique à 24 collèges. À Reims : seuls 12 des 30 collèges ZEP sont inclus dans les 26
collèges en APV.

Sur l’attractivité de l’éducation prioritaire, l’impact de ces dispositifs qui sont suffisamment
anciens pour qu’on puisse en mesurer l’efficacité, est faible, les académies qui concentrent
des moyens importants dévolus à l’éducation prioritaire restent pour beaucoup les variables
d’ajustement du mouvement national. Ce qui signifie que ces mesures ne sont que très peu
incitatives.

En intra académique, les établissements concernés sont souvent en queue de barème dans les
académies fortement urbanisées, dans les académies plus rurales, les établissements en
éducation prioritaire situés dans les grandes villes gardent en général une certaine attractivité
par rapport aux zones rurales, mais pas en raison des régimes indemnitaires. À l’intérieur des
établissements, ce sont souvent les nouveaux qui prennent en charge les classes les plus
difficiles, ou les cours préparatoires en primaire. Les effets de seuil dus à ces classements
d’établissement provoquent des effets pervers dans les académies concernées.

Sur la stabilité des équipes, si ces mesures ont pu produire quelques effets, c’est sans doute
plutôt la couverture des besoins en personnels titulaires qui a amélioré à la fois l’effectivité du
service et la permanence des équipes. La proportion des jeunes enseignants affectés dans les
ZEP est toujours très importante (34 % de moins de 30 ans contre 18 % hors éducation
prioritaire).

Synthèse des réponses au questionnaire adressé aux recteurs
La plupart des réponses des recteurs s’en tiennent au constat chiffré ; elles s’accompagnent quelquefois d’une
explication des phénomènes enregistrés. Le nombre réduit de réponses utiles, leur champ variable (premier
degré, collèges) selon les académies, limitent les enseignements à en tirer. Sous cette réserve, on peut dégager les observations suivantes. Le phénomène n’est pas nécessairement caractéristique de l’Éducation prioritaire.
Montpellier constate des taux de rotation assez comparables avec les écoles et collèges hors EP. La Charente et les Deux-Sèvres (académie de Poitiers) expriment un diagnostic comparable. Plusieurs académies soulignent que l’isolement géographique et/ou culturel, la ruralité pèsent plus sur la stabilité que le seul classement en EP.

Le phénomène n’est pas toujours uniforme au sein de l’éducation prioritaire. Limoges note que la stabilité -
instabilité n’est pas généralisée, mais propre à chaque ZEP, sans lien direct avec les CSP. De même, Paris
observe des comportements variables, liés à la qualité de la direction, du travail pédagogique, de la vie d’équipe
et des résultats enregistrés ; la Vienne (académie de Poitiers) fait le même constat comparatif sur ses deux ZEP.
Certaines académies (Orléans-Tours) ou départements (Pas-de-Calais) mesurent le phénomène, mais en
minimisent l’ampleur. Dans le Pas-de-Calais, le taux de maîtres du premier degré en poste depuis moins de 2 ans
(36 % à la RS 2004) s’est globalement aggravé en six années, mais le différentiel REP (37,1 %) / hors REP
(35,8 %) s’est aussi fortement réduit.
Quelques académies font, en revanche, état d’une rotation marquée des enseignants dans l’EP, même si la
mesure académique ou départementale globale cache parfois des évolutions plus ciblées. À Aix-Marseille : une
comparaison académique EP/hors EP de l’ancienneté des enseignants dans le poste (2 années ou moins) fait
ressortir une situation moins favorable pour l’EP, dans le premier degré (41 % en EP et 36 % hors EP), comme
dans le second degré-collèges (34 % en EP et 30 % hors EP). Ce constat est rapproché du poids des néo-titulaires
(ayant moins de 30 ans) en ZEP (26 % contre 10 % hors ZEP pour le 1er degré ; 23 % contre 11 % hors ZEP dans
les collèges).
Toulouse fait état d’un taux de mutation académique à cinq ans de 8 % dans le second degré ; il est de près de
11 % en ZEP et de 14 % dans les collèges en APV. À Créteil, dans le second degré, l’ancienneté moyenne dans
le poste est plus faible en ZEP (6 ans contre 6,8 ans en moyenne académique) ; mais le problème est double :
ainsi, plus de 27 % des professeurs de l’EP ont muté en 2001 (contre 15 % en moyenne académique) et le
différentiel s’est aggravé sur quatre années.

Pour le premier degré, la situation est différenciée selon les départements. Il est massif et généralisé (ZEP
comme hors ZEP) en Seine-Saint-Denis où seuls 13 % des maîtres ont une ancienneté de sept années dans le
poste. En Val-de-Marne, l’ancienneté en ZEP est, en revanche, plus favorable (37 % contre 32 %) ; ce constat est rapproché de la pratique de postes hors EP réservés -à titre provisoire- aux débutants. En Seine-et-Marne, la forte stabilité ZEP (66 %) est expliquée par la géographie départementale. Seules deux académies apportent une
information (peu comparable) sur la stabilité des équipes dirigeantes. Orléans-Tours ne constate pas d’instabilité
particulière des principaux de l’EP et attribue cette situation au sur classement des collèges et à l’affectation
systématique d’un adjoint ; Créteil (réponse à la Cour des comptes) souligne l’instabilité des équipes REP ; ainsi
entre 1999 et 2002, seuls 4 des 23 REP avaient conservé l’intégralité de leurs responsables.

L’attractivité limitée des mesures indemnitaires (Aix-Marseille) est souvent soulignée, lorsque celles-ci ne
s’accompagnent pas d’un contexte social, professionnel et pédagogique lui-même attractif (Vienne). Le poids du
contexte local : attractivité de la commune, des conditions de travail à l’école, pour pourvoir les postes dans le premier degré (Amiens).

L’isolement, notamment rural, mais aussi culturel, est jugé plus important que l’étiquette « éducation
prioritaire » pour pourvoir les postes (Orléans-Tours, Guyane, Vienne). Orléans-Tours évoque ainsi le cas de
Dreux qui cumule un double handicap : celui de l’étiquette « éducation prioritaire » avec l’isolement rural et l’absence d’implantation universitaire. La Vienne oppose les deux ZEP : celle de Poitiers, où un projet d’équipe vient conforter l’attractivité du régime indemnitaire, et celle de Châtellerault, où l’impact de la crise socialelimite l’effet des mesures financières incitatives.

Tous ces systèmes sont totalement déconnectés d’une véritable évaluation des enseignants.
L’avis général est qu’aucune incitation financière ne suffirait à elle seule à faire venir en
nombre dans les établissements les plus difficiles des enseignants dits expérimentés et rien ne
prouve, d’ailleurs, que ces enseignants soient mieux préparés à y enseigner ; toutes ces
mesures n’auraient pas d’effet significatif sur la carrière des enseignants. La demande des
équipes sur le terrain est davantage une demande d’aide à la concertation, de formation et de
soutien et d’accompagnement.

Or les principales mesures qui ont été prises en direction des personnels sont des incitations
financières et des aides à la mutation après quelques années. Le message implicite étant qu’on
récompense ainsi ceux qui feraient une sorte de purgatoire.

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