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Journée OZP 2009. Atelier : "La politique d’extraction des bons élèves des quartiers nuit-elle à la recherche de la mixité sociale dans les établissements ?"

27 mai 2009

Journée nationale OZP, 16 mai 2009

Atelier n° 1

La politique d’extraction des bons élèves des quartiers nuit-elle à la recherche de la mixité sociale dans les établissements ?

Intervenant et animateur : Nicolas Renard,
principal de collège en RAR,
président de l’OZP

Nicolas Renard fait une brève présentation de la thématique de l’atelier à partir de son expérience de principal de collège en réseau Ambition réussite à Asnières (Hauts-de-Seine).
Cette politique d’extraction se met en place de manière très progressive. Certains élèves restent réservés devant la perspective de changer d’établissement par crainte d’affronter un nouveau milieu et de quitter leurs copains.
L’assouplissement de la carte scolaire pour l’instant n’a eu que peu d’incidences sur le mixité scolaire dans son établissement, mais il est trop tôt pour juger des effets sur le moyen et le long terme.
Quant au « busing », qui n’est pas une politique d’extraction de bons élèves mais de mixité sociale, il est expérimenté dans la ville d’Asnières depuis plusieurs années et à différents niveaux scolaires, dans le sens quartiers Nord vers le centre ville mais pas du tout du centre ville vers les quartiers Nord.

Un principal du quartier du Mirail à Toulouse commente d’après son expérience du terrain les effets de cette politique d’extraction des bons élèves après la troisième. Les élèves, comme les parents, se montrent réticents, à cause des différences de codes entre les établissements et de l’importance de « l’entre soi ». Il souligne que, parmi les rares élèves concernés, certains iront en classes préparatoires.
Cette année scolaire, une réflexion concernant le repérage d’élèves avant le collège et associant les principaux de quatre collèges Ambition réussite du même quartier a été engagée. Les écoles ont eu à proposer deux élèves par classe de CM2 qui seraient pressentis pour aller dans un collège de centre ville, avec un accompagnement et la mise à disposition d’un ordinateur portable. Il s’agissait de repérer les élèves à haut potentiel.
Les enseignants des écoles élémentaires ont refusé cette politique d’extraction.

Pour les parents, le fait que l’école soit proche de leur lieu d’habitation est très important, particulièrement pour ceux qui viennent d’arriver en France. Seule la minorité la plus enracinée est intéressée, mais la décision revient aux enseignants, avec l’avis des enfants.
L’assouplissement de la carte scolaire a déjà eu plusieurs conséquences dans ce collège de Toulouse : une fuite vers le privé et une baisse des affectations en sixième de l’ordre d’un tiers. Le ministère dit ne pas pouvoir distinguer dans la baisse des affectations ce qui est dû à la baisse démographique de ce qui est dû à la politique d’extraction des bons élèves. Certes, les moyens sont maintenus pendant une année scolaire, mais on constate un processus de ghettoïsation de certains collèges.

Un principal adjoint de l’Orne explique que les élèves les plus faibles ont quitté le collège en réseau Ambition réussite, alors que les élèves issus de familles plus informées ont préféré continuer à bénéficier des structures et des moyens supplémentaires offertes en ZEP. Le collège de centre ville, avec des classes très chargées et des enseignants peu habitués à travailler avec cette nouvelle population, s’est trouvé complètement déstabilisé, malgré l’expérience et le savoir faire du principal. Il a connu une fuite importante vers le privé. Ce collège de centre ville a donc lui aussi fait les frais de cette politique.

Un participant souligne que le fait de pouvoir extraire certains élèves de collèges difficiles est l’aveu que l’offre n’est pas la même sur tout le territoire de la République.

Un parent d’élève, membre de la FCPE, note que la fédération s’est opposée à cette politique dans un lycée de région parisienne.

Un autre participant insiste sur l’idée que l’extraction de bons élèves est contraire aux principes de l’éducation prioritaire : c’est l’ensemble des élèves qu’il convient de faire progresser. Il faut considérer également les risques de problèmes d’adaptation que peuvent rencontrer certains bons élèves issus des quartiers transplantés dans un lycée prestigieux.
Par ailleurs, il relate une expérience de " busing " qui a pu être évaluée puisqu’elle a duré plus de vingt ans : cette formule est à gérer avec une extrême délicatesse. En effet, les difficultés viennent à la fois des parents des élèves transportés et de ceux qui reçoivent (sans parler des élèves transportés eux-mêmes). Il a fallu cinq années pour faire accepter cette solution.

Une ancienne directrice d’école rappelle qu’il existe des méthodes pédagogiques pour gérer l’hétérogénéité. Il faut surtout une cohésion de l’équipe, qui est tout à fait possible à instaurer, même avec des personnels débutants. Deux extrêmes sont à éviter : les lycées prestigieux et les lycées-ghettos.

En écho, un principal de Toulouse note qu’on ne « joue pas dans la même catégorie » selon les collèges. De manière ponctuelle, la politique d’extraction de bons élèves peut avoir un intérêt du collège au lycée, mais pas pour les écoles élémentaires.

La question de la formation des enseignants est posée ainsi que celle des modalités d’inspection en collège, trop souvent encore limitées au domaine disciplinaire et non en fonction d’un projet.
Nicolas Renard distingue deux aspects : la formation des enseignants et leur affectation ; le dispositif PEP IV permettait de travailler avec une équipe motivée qui avait choisi son affectation.

On revient sur le constat que le mouvement se fait uniquement des collèges de la périphérie vers le centre.
Les internats de réussite éducative restent un effet d’annonce : on compte 20 places pour toute l’académie de Toulouse et il manque toute une réflexion sur les critères d’affectation. Et pourtant cette formule de l’internat de réussite était particulièrement adaptée aux élèves vivant seuls et livrés à eux-mêmes hors du temps de l’école. Elle aurait pu être une réponse à ce problème.

Les mesures d’extraction semblent bien converger vers un risque de ghettoïsation des établissements concernés.

Compte rendu rédigé par Lucienne Siuda

 

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