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Une évaluation collective du dispositif Ambition réussite par des enseignants de Montreuil (Seine-Saint-Denis)

7 avril 2008

Extrait du blog « Quinzeplustrois », le 05.04.08 : Une déclaration commune d’enseignants en établissement EP1 "ambition réussite"

S’associant au mouvement national contre la suppression d’emplois dans l’éducation, des enseignants du collège Lenain de Tillemont à Montreuil, classé EP1 "réseau ambition réussite", se sont mis en grève le 3 avril 2008.

Ils revendiquent le maintien sur leur poste l’année prochaine de tous les personnels volontaires pour l’être, particulièrement celles et ceux qui pourraient être en sous service à cause d’une baisses d’effectifs, alors même que l’emploi de ces moyens propres, en ambition réussite, doit prioriser la stabilisation des équipes.

Ils ont mis à profit l’exercice de leur droit de grève pour se concerter et construire collectivement une évaluation de la mise en oeuvre réelle du dispositif "ambition réussite". La déclaration suivante est le résultat de ce travail.

Déclaration publique

Etablissements EP1

Deux ans après le démembrement des Zones d’Education Prioritaire et la mise en place du dispositif Ambition Réussite, nous assistons à la dénaturation et au dérèglement des objectifs affichés, à savoir : un recentrage des moyens pour améliorer qualitativement les pratiques, le travail en équipes, les différents partenariats, l’innovation, la structuration d’un réseau, le renforcement des inspections et de la contractualisation.

Or, pour réaliser ces objectifs, il faut en premier lieu des personnels stables et expérimentés comme le rappelle les rapports Moisan-Simon de 1997, Hussenet de 2004 et Anne Armand de 2006.

Actuellement dans les EP1, nous constatons une réalité à l’opposé des objectifs affichés :

• La mise en place d’EP1 s’est traduite par une table rase des projets bâtis par les équipes dans la durée, sans considération de leur efficacité.

• Le recentrage sur quelques piliers du socle commun a en fait servi de prétexte à des mesures uniquement budgétaires ; on constate un appauvrissement de l’offre en matière linguistique et scientifique, ayant pour conséquence un renforcement des inégalités des chances.

• Nous constatons qu’en fait d’autonomie accrue, les équipes sur le terrain sont sommées d’exécuter, dans la plus grande précipitation et l’improvisation, des choix dont elles ne perçoivent pas la cohérence pédagogique et qu’elles ne peuvent donc pas s’approprier.

• Ces projets sont reconduits sans évaluation réelle ; ils apparaissent le plus souvent à l’interne, comme des variables d’ajustement des postes et à l’externe, comme des supports de communication à bon compte.

Que reste-t-il aujourd’hui de l’objectif d’améliorer l’efficacité des pratiques, l’innovation pédagogique et le travail en équipe ?

Au lieu de créer un cadre dans le service de chaque enseignant à cette fin, le choix de concentrer des décharges horaires sur un nombre réduit d’enseignants (les professeurs supplémentaires) - au risque de déréglementer l’ensemble des statuts de la fonction publique - n’a pas créé la dynamique attendue au plan national. Malgré l’investissement de ces personnels, force est de constater que les pratiques locales sont tellement disparates qu’elles sont inévaluables.

De plus, ces décharges, de par leur précarité, deviennent des variables d’ajustement au même titre que les différents projets.

Enfin, la différenciation des services est souvent néfaste à la constitution d’une dynamique collective, voire même peut créer une compétition nuisible entre les personnels.

Par ailleurs, la suppression des postes fixes entraîne le départ de personnels expérimentés et motivés au profit d’une utilisation abusive de remplaçants néo-titulaires, d’heures supplémentaires et de postes précaires de vacataires. Et ceci malgré l’absurdité d’alourdir la charge de travail déjà élevée des personnels en poste et l’assurance du ministère de ne nommer aucun néo-titulaire en établissement ambition réussite.

De même, la dotation supplémentaire en assistants pédagogiques n’a pas permis une amélioration de l’encadrement pédagogique ni un soutien efficace aux différents projets, du fait d’un taux de rotation impressionnant de ces personnels, dû au statut mal conçu, précaire et dévalorisant de ces postes (à Lenain de Tillemont, 5 départs).

Enfin, la surcharge de travail des corps d’inspection ne leur permet pas d’assurer l’accompagnement renforcé dans les EP1, comme promis par M. de Robien. Le suivi de l’établissement n’est pas effectif puisque les divers courriers adressés depuis septembre par certains établissements à l’Inspection Académique ainsi qu’au Rectorat sont restés sans réponse.

Tout cela entraîne une démotivation des personnels.

Depuis 25 ans, les recommandations nous demandant de faire plus et mieux en éducation prioritaire s’accumulent.
Or, le renforcement de la formation didactique, l’innovation et la convergence des pratiques pédagogiques et le développement d’une approche transdisciplinaire sont subordonnés à une plus grande stabilité des équipes, dans l’Education Prioritaire plus qu’ailleurs.

Pourtant depuis 25 ans dans les quartiers défavorisés socialement, où en sommes-nous d’une politique efficace pour rendre ces équipes plus stables ?
Les incitations hasardeuses et irréalistes pour rendre l’enseignement plus attractif (primes, indemnités) ont démontré leur inefficacité. Tout comme il est illusoire de vouloir surcharger un travail difficile par des heures supplémentaires dévalorisantes, précaires, et parfois jamais rémunérées.

Aucun progrès ne peut être réellement observé. Tout ceci aggrave de manière inquiétante la démotivation des équipes.

Quel avenir pour ce dispositif encore balbutiant, alors que dans le plan Espoir Banlieue annoncé par Mme Amara, il est prévu la déconstruction/reconstruction des ghettos scolaires ?

Comment parler d’ambition et de réussite dans des établissements peut-être déjà condamnés ?

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