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Le Conseil économique et social favorable à la politique d’éducation prioritaire

9 janvier 2008

Extrait de Localtis.info du 08.01.08 : Conseil économique et social : "La politique de la ville doit être élevée au rang de grande cause nationale"

[Voir le long extrait concernant les ZEP à la fin de la notice]

"La question de la politique de la ville est avant tout liée à la représentation qu’on s’en fait : il y a une réelle difficulté à assumer une partie de notre société." Par ses propos introductifs, le rapporteur du projet d’avis du Conseil économique et social (CES), Gérard Le Gall est explicite : "Il n’y a pas d’alternative, la politique de la ville, véritable investissement national, doit être élevée au rang de grande cause nationale. Les quartiers sensibles rassemblent très majoritairement une population avide de travail, de création, qui souhaite participer pleinement à l’avenir de notre pays."
Saisi par le gouvernement l’été dernier, le CES devrait adopter, les 8 et 9 janvier, en assemblée plénière, l’avis intitulé "Réunifier et réconcilier la ville : constat et propositions". Après le rapport de la Cour des comptes et celui du Conseil national des villes, tous deux présentés en novembre dernier, la réflexion sur la politique de la ville se poursuit alors qu’un plan gouvernemental pour les banlieues doit être dévoilé en février.

Au-delà des quatre-vingts propositions formulées dans le domaine de l’éducation, de la sécurité, des services publics, du logement ou de l’emploi, le CES dénonce le "stop and go" des gouvernements successifs en matière de politique de la ville. Gérard Le Gall est incisif : "Une des choses les plus choquantes c’est que personne ne peut quantifier les ressources de la politique de la ville car elle n’a pas de définition claire." Selon le rapporteur, la politique de la ville, "c’est le surplus que l’on donne à des quartiers où il y a des problèmes supplémentaires".

Chef de file : l’intercommunalité

Le CES est donc favorable à la politique d’éducation prioritaire et souhaite que les moyens financiers et humains soient renforcés par un engagement pluriannuel de l’Etat. Ambitieux, l’avis demande notamment que soit assigné à tous les établissements publics et privés d’un même bassin d’emploi un devoir de mixité sociale.
Pour la mise en œuvre de la loi Dalo, l’avis met en avant un risque déjà rélevé par les acteurs du logement : une remise en cause des efforts entrepris en matière de mixité sociale.
De manière générale, Gérard Le Gall déclare que le bon niveau d’intervention est celui de l’agglomération : "Dès qu’une intercommunalité existe, toutes les conventions, les contrats doivent être signés par les intercommunalités." Et d’illustrer son propos avec l’attribution du logement social qui "doit faire l’objet d’une coordination systématique inter-bailleurs sous l’autorité du président de l’EPCI".
Autre enjeu majeur, l’accès à l’emploi des habitants des zones urbaines sensibles (ZUS). Sur ce chapitre, le CES milite pour un programme national d’action ciblé sur les quartiers, la mise en place de maisons de l’emploi, le renforcement du soutien aux associations en charge de la réinsertion, la généralisation des expériences d’accompagnement individualisé des jeunes très éloignés de l’emploi ou encore la création d’un compte emploi-mobilité pour les jeunes diplômés. Les zones franches urbaines (ZFU) font aussi l’objet de préconisations très précises comme l’ouverture des exonérations aux professions libérales.

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Extrait de Les echos.fr du 08.01.08 : Le CES fait 80 propositions pour réunifier et réconcilier la Ville

Les mesures proposées par le Conseil économique et social dans un avis portent aussi bien sur le logement, l’école, la culture que l’accès à l’emploi

Le Conseil économique et social fait 80 propositions dans un avis qui a été présenté mardi à la presse par son rapporteur Gérard le Gall. Conscient que malgré les lois de rénovation urbaine (2003) et de programmation pour la cohésion sociale (2005) et malgré les mesures prises après les émeutes de novembre 2005 "la vie quotidienne reste difficile et s’est même aggravée à certains égards", le CES propose une série de mesures touchant justement à la vie quotidienne.

Pour l’école, il préconise notamment de lutter contre l’absence de mixité sociale dans les écoles, de réduire le nombre des élèves par classe, d’organiser un suivi scolaire personnalisé. Pour la famille, il propose de développer les services à la personne, les solidarités intergénérationnelles, de renforcer les services publics. Il estime aussi que "la politique culturelle doit considérer les quartiers déshérités comme une priorité au plan des moyens humains et financiers".

[...]

(Source AFP)

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Lire le texte complet du projet

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Un extrait de l’avis

concernant l’éducation prioritaire

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A - LE DÉFI ADRESSÉ AUX INSTANCES DE SOCIALISATION ET DE L’INTÉGRATION

1. L’éducation prioritaire pour l’école

L’école qui éprouve de grandes difficultés à offrir à chaque élève la même éducation indépendamment de son origine sociale et de son lieu de résidence, est particulièrement à la peine, dans un certain nombre de territoires, pour porter un projet de vie et pour assumer ses missions fondatrices : l’éducation, la formation, comme plus largement l’intégration sociale et l’apprentissage à la citoyenneté. Un grand nombre d’élèves sortent du système éducatif sans disposer de la maîtrise de la langue, à l’écrit comme à l’oral : 15 % d’entre eux éprouvent des difficultés en lecture à l’entrée en classe de sixième. Ils sont deux, parfois trois fois plus nombreux dans ce cas en ZEP.

Il ne s’agit pas dans les propos qui suivent d’appréhender le vaste champ des questions relatives à l’école mais, dans l’esprit de la saisine à propos de la politique de la ville, de centrer la réflexion sur sa place dans le dispositif, avant de formuler quelques propositions susceptibles d’améliorer la réussite scolaire dans les quartiers sensibles.

Ici, les obstacles rencontrés par les jeunes pour leur insertion professionnelle sont, pour l’essentiel, dus à la conjonction de trois facteurs : la faiblesse de leur niveau scolaire, de qualification et de diplôme, leur insuffisante intériorisation de certains codes sociaux et la discrimination à l’entrée du monde du travail.

La proportion des 15-24 ans non diplômés y est plus de dix points supérieure à la moyenne nationale, 40 % des jeunes en ZUS sortent du système éducatif sans bagage, 38 % des enfants de milieu défavorisé redoublent (contre 17 % dans l’ensemble de la population), 12 % des jeunes de Seine-Saint-Denis ont 16 ans et plus en troisième (contre 6 % en moyenne nationale).

Au coeur de la décennie qui a vu leur création (1982), les Zones d’éducation prioritaire (ZEP) ont souvent contribué à apporter des réponses adaptées aux élèves qui rencontrèrent le plus de difficulté. Mais en raison d’évolutions successives, de leur multiplication (363 en 1982, plus de 900 en 2005, 708 aujourd’hui), sans beaucoup de moyens supplémentaires, sans véritable formation du personnel, avec un pilotage incertain et la dilution des objectifs, la force initiale du projet s’est atténuée.

Aujourd’hui, les 807 Réseaux d’éducation prioritaire (REP), environ 18 % des collégiens, concernent des territoires très variés. Si certains cumulent des taux d’échec très élevés, tous sont confrontés aux mêmes problèmes. De plus, les mesures de soutien individualisé (loi d’orientation pour l’avenir de l’école) comme celles de réussite scolaire (plan de cohésion sociale), en raison d’une insuffisante coordination et de cohérence entre elles, pèsent sur l’efficacité des ZEP.

Le Conseil économique et social favorable à la politique d’éducation prioritaire se satisfait de voir se concentrer les efforts sur un nombre plus restreint de territoires.

Il souhaite que les moyens financiers, humains et de formation soient nettement renforcés par un engagement pluriannuel de l’État en privilégiant les élèves les plus en difficulté. Jusqu’à présent le supplément de ressources en faveur des ZEP est estimé à 10 %. Pour l’essentiel, il est affecté à la réduction uniforme du nombre d’élèves par classe, leur taille moyenne en ZEP atteint vingt-deux élèves contre vingt-trois ailleurs !

Une amélioration de la performance des ZEP pourrait venir de leur réduction ciblée. Les recherches les plus récentes indiquent qu’une réduction de la taille des classes à dix-sept élèves en CP et en CE1 en ZEP permettrait de réduire de près de 45 % l’inégalité constatée aux tests de mathématiques à l’entrée en CE2 entre ZEP et hors ZEP.

Fondé sur le volontariat, l’enseignement au sein des ZEP doit être confié à des personnels ayant une réelle expérience professionnelle. Aujourd’hui, un enseignant en ZEP ne reçoit de l’administration qu’une prime annuelle d’environ 1 100 euros par an. Avec l’élaboration de projets cohérents dans le cadre d’un partenariat efficace, le classement en ZEP doit être porteur d’espoir. Il doit permettre une véritable égalité des chances pour l’avenir de tous les élèves et non, comme trop souvent, être le symbole d’un « déclassement » ou d’une relégation. Outre la pédagogie, la gestion des ressources humaines, la nécessaire évaluation, peut-être le zonage lui-même, ce sont les politiques d’offre scolaire et la carte scolaire qui doivent être repensées afin de faire reculer efficacement l’échec et la ségrégation scolaires.

L’offre en termes d’options de cours, par la diversité du choix de langues, de filières internationales, de sections musicales, artistiques, sportives tend à se raréfier dans les écoles en ZEP, à l’inverse des autres, aux publics plus aisés. Cette spécialisation de fait en direction des publics difficiles contredit les valeurs proclamées. Elle peut jeter un doute sur l’école dans sa volonté d’atteindre l’égalité des chances, tant il est vrai que la réussite d’un établissement contribue, avec d’autres facteurs, à construire la réputation d’un quartier.

Le Conseil économique et social estime que les collèges et lycées des quartiers sensibles devraient, comme les autres, disposer des options les plus attractives, avoir des classes préparatoires. Il suit avec intérêt les initiatives de plus en plus nombreuses au sein des grandes écoles afin de permettre aux élèves en ZEP d’accéder aux formations supérieures. Du fait de sa mission éducative, l’école peut et doit mieux contribuer à la formation des citoyens et à préparer au « vivre ensemble » dans une société de plus en plus pluriculturelle.

En ce sens, l’éthique républicaine qui récuse la défiance de l’autre comme la recherche de « l’entre soi » exige la cohabitation à l’école d’enfants et d’adolescents issus de la diversité de la société. Si la sectorisation, à travers la carte scolaire, peut contribuer à la mixité sociale, c’est le cas encore dans beaucoup de villes, force est de constater que sous l’effet de la croissance de la division spatiale et sociale des espaces de vie et des stratégies d’évitement de la part des parents, ladite carte scolaire renforce plus les particularismes sociaux qu’elle n’aide à les dépasser. Sans doute, à l’avenir, la carte scolaire qu’il faut adapter plus que supprimer, devra-t-elle s’affranchir des limites municipales pour recomposer des secteurs à l’échelle de bassins scolaires.

Plus globalement, il convient de favoriser la logique de prévention, sans négliger la réparation ; de veiller à assurer une bonne complémentarité entre les établissements, de redonner du sens à une autonomie aujourd’hui trop formelle, d’associer l’ensemble des acteurs (pouvoirs publics, services de l’Éducation nationale, collectivités territoriales, partenaires sociaux, parents d’élèves, associations péri-éducatives...) à l’élaboration des projets et à leur mise en oeuvre.

Le Conseil économique et social souligne l’importance des responsabilités de l’État, son souhait de voir organiser une authentique interministérialité, ainsi qu’une inscription plus nette de la démarche d’éducation prioritaire dans une approche territoriale globale (logement, transport, services...).

Alors la politique de la ville et le Plan national de rénovation urbaine (PNRU) prendront pleinement leur sens : contribuer au recul des discriminations et à la fin de la stigmatisation des quartiers sensibles en réconciliant la ville.

Proposition 1

Combattre l’absence de mixité sociale dans les écoles de toute la ville.

Moyens :

 Assigner un devoir de solidarité aux établissements publics et privés du même bassin de formation par leur mise en réseau et la mutualisation de la richesse d’offre éducative.

 Ouvrir à tous toutes les options et combattre ainsi le détournement à des fins ségrégatives de certaines d’entre elles. Développer les filières d’excellence (sections européennes, musicales, langues rares...) au sein des établissements prioritaires, ainsi que l’utilisation des TICE.

 Fermer les établissements où la situation, sous le double rapport de la faiblesse des résultats scolaires et de l’absence de mixité sociale, paraît irréversible.

Proposition 2

Concentrer plus d’efforts sur moins d’élèves.

Moyens :

 Concentrer l’effort de réduction des effectifs scolaires sur les établissements prioritaires. Faciliter dans les écoles primaires un suivi individualisé très réactif en mettant à disposition de l’établissement des maîtres non chargés de classes.

 Développer le partenariat avec et entre établissements pour permettre l’accès des élèves issus des quartiers aux filières d’excellence grâce à une préparation spécifique.

 Diversifier dans les établissements en ZEP, après expérimentation, les méthodes d’apprentissage, encourager l’innovation pédagogique.

 Réexaminer l’organisation du temps scolaire. Généraliser les études encadrées en faisant appel à des intervenants rémunérés, par exemple retraités ou étudiants du service civil volontaire.

Proposition 3

Faciliter le rôle des enseignants pour leur permettre un meilleur suivi des élèves.

Moyens :

 Lors de la formation initiale, préparer les enseignants à la rencontre de publics scolaires différents.

 Leur donner des méthodes de dynamique de groupe et de résolution des conflits.

 Favoriser le travail en équipe dans les établissements, le développement de projets, donner de la souplesse en termes de temps et de modalités de présence.

 Veiller à ce que les enseignants débutants ne soient pas nommés en trop grand nombre dans les établissements prioritaires. Favoriser le volontariat des professeurs expérimentés ainsi que leur maintien en poste grâce à une politique incitative (bonification de retraite par exemple) et en s’appuyant sur le projet d’établissement.

Proposition 4

Mobiliser localement tous les acteurs de l’éducation.

Moyens :

 Clarifier le pilotage du projet éducatif local : redéfinir les instances de dialogue, organiser des rencontres entre enseignants, personnels scolaires et acteurs locaux (personnels d’éducation, élus, travailleurs sociaux, associations, entreprises, syndicats...).

 Mettre en place un projet éducatif local d’accompagnement à l’éducation qui intègre en particulier les aspects culturels et la formation à la citoyenneté.

 Construire un « cadre » global d’éducation qui puisse par son exemplarité servir de référence sur les plans territorial et comportemental.

 Renforcer les liens avec les parents. Développer le lien avec ceux d’entre eux qui sont le plus distants par rapport à l’école.

Proposition 5

Lier les moyens des établissements à la contractualisation des objectifs.

Moyens :

 Faire élaborer par chaque établissement un projet pluriannuel (trois à cinq ans) contenant des objectifs contractualisés. En contrepartie, octroyer plus d’autonomie de moyens pour atteindre les objectifs fixés.
 Évaluer les résultats.

 Assouplir les conditions dans lesquelles les établissements sont classés en ZEP ou sortent du dispositif, sur la base de tels objectifs.

 Renforcer les équipes de direction et l’encadrement des élèves afin de renforcer la présence humaine dans les établissements, limiter la taille pour faciliter la mobilisation sur les objectifs.

Texte adopté en Assemblée plénière le 9 janvier 2008 dont la publication officielle interviendra le 14 janvier 2008 26

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