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Une prof de collège ZEP à Garges et une prof de lycée ZEP à Sarcelles : « Redonner l’image du prof dans la société »

4 septembre 2007

Extrait du « Figaro » du 03.09.07 : Deux jeunes professeurs de ZEP ont la passion chevillée au corps

Sophie Jay et Sophie Thouvenin refusent les clichés misérabilistes. Elles disent se sentir utiles.

« ON EST supermotivées ! » Loin des caricatures d’enseignants aigris ou désabusés par la « baisse du niveau » ou le « manque de respect » des élèves, à la veille de leur rentrée, deux jeunes enseignantes expliquent être devenues professeurs par choix.

Agrégée de lettres modernes, Sophie Thouvenin, 29 ans, entame sa cinquième rentrée dans un lycée de Sarcelles (Val-d’Oise). Sophie Jay, certifiée d’histoire-géographie, 24 ans, est affectée dans un collège de Garges-lès-Gonesse (Val-d’Oise). Leur envie de retrouver les élèves est intacte.

Comme la plupart des jeunes enseignants, elles font face à un public majoritairement issu d’un milieu défavorisé, mais le sentiment d’être « vraiment utiles » les enthousiasme. « C’est difficile, mais stimulant humainement et intellectuellement, juge Sophie Thouvenin. Voir un élève réussir ou progresser, c’est réjouissant ! » Dans son collège précédent, privilégié et situé en centre-ville, Sophie Jay estimait qu’elle n’apportait pas tellement plus à ses élèves « que ce qu’ils ont chez eux avec leurs parents : ils ont déjà accès à la culture, aux livres ». Pour des élèves de ZEP, l’enjeu de l’école est, selon elle, plus important.

Les deux femmes se tiennent à distance d’un discours désabusé : « Je perçois parfois une certaine lassitude chez les enseignants qui ont vingt-cinq ans de carrière, souligne Sophie Jay, mais je ne suis pas du tout dans ce cas. » Elle constate aussi une forme d’individualisme plus grande chez ses aînés : « Ils ne voient pas toujours l’intérêt de travailler en équipe, par exemple. » Certains en ont assez de « faire les flics », expliquent-elles, alors que le métier a évolué au rythme d’une société plus violente : « Nous en avions conscience lorsque nous avons passé le concours. Cela n’a donc pas été une surprise pour nous. Même si notre formation à l’IUFM nous prépare mal à cette réalité. »

Plus de quarante heures de travail par semaine

Dans l’entourage de Sophie Thouvenin, certains enseignants attendent même « une histoire sanglante d’agression au couteau ». « Eh bien, oui, il y a du racket et une forme de banalisation de la violence dans nos établissements. Mais c’est loin d’arriver toutes les semaines ! », souligne le jeune professeur. Elle assure même : « Dans mon lycée de ZEP, le rapport à l’autorité ne marche pas si mal. » Toutes deux suivront avec intérêt les travaux de la commission chargée de réfléchir sur le métier d’enseignant : la priorité serait, selon elles, de revaloriser l’image du professeur au sein de la société.

« On nous décrit comme tout le temps en grève, paresseux, bénéficiant de longues vacances. Certains profs sont des planqués, comme dans tous les métiers, mais c’est une minorité ! » Leur temps de travail, entre les heures de cours en classe et celles passées à la maison, dépasse 40 heures par semaine : « Quand je refuse de rejoindre mes amis pour boire un verre le dimanche, ils ne comprennent pas ! C’est pourtant une réalité, je travaille beaucoup chez moi », souligne Sophie Thouvenin qui a monté un club théâtre dans son établissement.

Les deux jeunes femmes ont débuté respectivement avec 1 500 euros et 1 800 euros net par mois : « Ce n’est pas beaucoup valoriser notre niveau d’études qui correspond à un bac+5. C’est même un peu méprisant, mais on n’a pas fait ce métier pour l’argent... », soulignent-elles. Sophie Jay n’exclut pourtant pas de changer de métier : « Je ferai le bilan d’ici dix ou quinze ans et je verrai si je suis toujours épanouie. J’ai fréquenté trop de profs blasés. » Sophie Thouvenin, elle, a la passion chevillée au corps et se voit bien faire ce métier « toute la vie ».

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