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Un prof de collège en ZEP à Stains : « Je suis plutôt enthousiaste »

4 septembre 2007

Extrait de « Libération » du 03.09.07 : 25 000 nouveaux profs font leur première rentrée cette année. Témoignages

Pour sa première rentrée Jean-Philippe, 28 ans, professeur d’histoire-géo, est franchement stressé : « Déjà c’est dans ma nature... Mais là, j’ai appris au dernier moment que je suis ¬affecté dans deux collèges. Heureusement, ils ne sont pas trop éloignés, à Asnières et à Gennevilliers [dans la banlieue nord de Paris, ndlr]. En revanche, j’aurai tous les niveaux, de la sixième à la troisième, ce qui est très lourd pour un débutant. » L’an dernier alors qu’il était encore stagiaire, Jean- Phi¬lippe passait quatre à cinq heures pour préparer une heure de cours : « Il va vraiment falloir que j’accélère. »

Les jeunes professeurs expriment tous plus ou moins d’appréhension à l’idée de se retrouver demain seuls face à des classes. La plupart ont été affectés dans des établissements sensibles, désertés par leurs aînés. Sauront-ils accrocher les élèves et installer un bon climat dans la classe ? Et l’équipe enseignante en place va-t-elle bien les accueillir ? « Deux fois par semaine, je vais rater le déjeuner avec les collègues pour me rendre dans mon autre établissement alors que c’est le moment idéal pour s’intégrer et demander des conseils », regrette Jean-Philippe.

« Vocation ». La rentrée se déroule en outre sous de sombres auspices : 11 200 postes, dont plus de 9 000 dans le secondaire, vont être supprimés en 2008 dans l’éducation. Le métier lui-même a perdu du prestige, avec des enseignants moins considérés et de plus en plus attaqués sur leur temps de travail - dix-huit heures de cours par semaine pour un pro¬fesseur certifié comme Jean-Philippe, quinze heures pour un agrégé.

Mais il en faut davantage pour décourager les jeunes enseignants, fiers d’avoir réussi un concours de plus en plus dif¬ficile (le nombre de postes ¬diminuant) et impatients de se confronter à « leur » classe. « Toutes ces coupes sombres, c’est du calcul à courte vue. Les enfants du dernier baby-boom, actuellement en pri¬maire, vont arriver dans le secondaire où il faudra alors de nouveaux postes », prédit Jean-Philippe. Devant les conditions de travail qui se détériorent, lui parle de « vocation » : « Je vais toucher 1 500 euros net par mois, ce n’est pas pour l’argent que j’ai choisi ce métier, c’est un goût de l’humain, du rapport avec les élèves, la volonté de leur faire aimer les ¬études au-delà de ma propre discipline. »

« Attachants ». A 21 ans, Vincent, champion de tennis de table, est un « néotitulaire » : reçu en juin au concours de professeur d’Education physique et sportive (EPS), il va travailler à mi-temps dans un collège de Stains (Seine-Saint-Denis), en Zone prévention de la violence, et aura une journée de formation par semaine à l’IUFM (Institut universitaire de formation) de Créteil. « Je suis plutôt enthousiaste, on a appris des tas de trucs, on a envie de les mettre en pratique, dit-il. Je m’attendais à être dans le 93, je n’ai aucune inquiétude, j’ai déjà travaillé dans l’animation dans les quartiers défavorisés. »

Sur la volonté du président Nicolas Sarkozy de renforcer le sport à l’école, il est un peu sceptique : « Nous ne sommes pas là pour former des sportifs et faire du résultat. Mais pour apprendre des pratiques sportives, comment développer son corps, certains ne savent même pas courir, alors... »

Amandine, « néotitulaire » de 24 ans, rentre demain comme documentaliste dans un lycée professionnel à Combs-la-Ville (Seine-et-Marne) avec quatre heures de transports en commun par jour. « Nos vœux d’établissements n’ont pas été respectés », déplore-t-elle, fataliste. Elle sait qu’elle va trouver des élèves presque aussi âgés qu’elle : « J’ai déjà fait un stage en lycée pro, j’ai trouvé les élèves attachants, très en demande. » Amandine a choisi la documentation pour son « côté social, les qualités de dialogue et d’écoute que cela suppose ». Elle aime son métier mais elle sait déjà qu’elle en changera un jour : « Beaucoup partent avec la foi comme moi, mais on s’use avec les années. »

Véronique Soulé

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