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Des précisions du ministre sur l’évolution du dossier de la carte scolaire

5 juin 2007

Extrait de « L’Expresso » du 05.06.07 : Carte scolaire : Le ministère précise la procédure

Qui pourra bénéficier de "l’assouplissement" de la carte scolaire ? Le ministère publie le 4 juin une liste de cas dérogatoires "dans la limite des places disponibles dans les établissements". Sont prioritaires pour intégrer un établissement hors du secteur initial de rattachement : "les élèves souffrant d’un handicap ; les élèves boursiers au mérite ; les élèves boursiers sur critères sociaux ; les élèves nécessitant une prise en charge médicale importante à proximité de l’établissement demandé ; les élèves qui doivent suivre un parcours scolaire particulier ; les élèves dont un frère ou une sœur est déjà scolarisé(e) dans l’établissement souhaité ; les élèves dont le domicile est situé en limite de secteur et proche de l’établissement souhaité". Les parents doivent déposer un dossier avant le 30 juin.

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Extrait du site du ministère de l’Education nationale, le 05.06.07 : Xavier Darcos assouplit la carte scolaire

À la rentrée 2007, une liberté nouvelle est donnée aux familles dans le choix du collège ou du lycée de leur enfant

La carte scolaire - c’est-à-dire l’affectation d’un élève dans un collège ou un lycée correspondant à son lieu de résidence - a été créée il y a plus de quarante ans, pour une École qui n’a plus rien à voir avec celle d’aujourd’hui. Régulièrement contournée, elle n’assure plus l’égalité des chances et ne répond plus aux attentes des familles. C’est pourquoi, Xavier Darcos, ministre de l’Éducation nationale, a souhaité instaurer une règle plus claire, qui s’imposera de la même façon à toutes les familles : dès la rentrée 2007, davantage d’élèves pourront s’inscrire dans un établissement hors de leur secteur, dans la limite des places disponibles. Il s’agit de donner une liberté nouvelle aux familles tout en renforçant la diversité sociale et géographique au niveau de chaque établissement.

Bien évidemment, cet assouplissement ne modifie en rien le droit pour une famille d’inscrire son enfant dans l’établissement de son secteur.

Quels établissements seront concernés par l’assouplissement de la carte scolaire à la rentrée 2007 ?

Cette mesure s’applique aux collèges et aux lycées qui pourront accueillir des élèves ne relevant pas de leur secteur dans la limite des places disponibles dans les établissements.

Si un établissement ne peut accueillir toutes les demandes d’affectation, quels sont les critères de choix ?

Sont prioritaires pour intégrer un établissement hors du secteur initial de rattachement :

• les élèves souffrant d’un handicap ;

• les élèves boursiers au mérite ;

• les élèves boursiers sur critères sociaux ;

• les élèves nécessitant une prise en charge médicale importante à proximité de l’établissement demandé ;

• les élèves qui doivent suivre un parcours scolaire particulier ;

• les élèves dont un frère ou une sœur est déjà scolarisé(e) dans l’établissement souhaité ;

• les élèves dont le domicile est situé en limite de secteur et proche de l’établissement souhaité.

Comment procéder ?

Les familles doivent déposer un dossier avant le 30 juin 2007 auprès de l’inspection académique de leur département.
Une réponse leur sera apportée au plus tard le 20 juillet 2007.

Pour tout renseignement, contacter l’inspection académique

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Extrait du «  Monde » du 05.06.07 : Carte scolaire : les stratégies des parents des Hauts-de-Seine

Officiellement, selon l’éducation nationale, il n’y a aucune hiérarchie entre le collège Malraux, au nord d’Asnières (Hauts-de-Seine), et le collège Truffaut, au sud. Dans la réalité, sur le marché scolaire, établie par la rumeur, par les discussions entre parents d’élèves, entre voisins, entre amis, la cotation des deux établissements n’a rien à voir. Le premier, que les initiés tentent d’éviter, scolarise les enfants d’un quartier populaire, essentiellement des catégories sociales défavorisées, pour beaucoup maghrébins et noirs. Le second, pour lequel les mêmes initiés sont prêts à déménager ou à demander des dérogations, rassemble des élèves de milieux favorisés.

A Asnières, comme dans le reste des Hauts-de-Seine, le marché officieux des valeurs scolaires reflète l’angoisse parentale face aux risques, réels ou supposés, de l’inscription dans un "mauvais" établissement. Une angoisse qui se transmet sur un mode viral. "Si on apprend que quatre ou cinq copains ne mettent pas leurs enfants dans un collège, on se dit qu’il doit forcément y avoir un problème. Si on voit qu’ils scolarisent leurs enfants, on n’hésite pas à y aller", résume Valérie Marty, 43 ans, mère de trois enfants, présidente de la PEEP 92. "Il y a beaucoup d’informations qui circulent, mais on est toujours dans la subjectivité", ajoute Sophie Dannery, 40 ans, mère de quatre enfants, militante de la PEEP sur Asnières.

La pression sociale de l’environnement est considérable. Et contribue à faire de la suppression de la sectorisation, promise par Nicolas Sarkozy, un sujet extrêmement sensible.

"Ne pas céder à l’entourage, qui recommande de ne surtout pas aller dans un collège, s’apparente presque à du militantisme", note Gilbert Lazaroo, professeur d’histoire et géographie au collège André-Doucet, un établissement mal coté de Nanterre.

Un effet papillon, version éducation nationale : "Les parents de Clichy veulent inscrire leurs enfants à Levallois. Ceux de Levallois voient arriver les enfants de Clichy et veulent alors aller à Neuilly. Et donc, ceux de Neuilly vont dans le privé ou dans les grands lycées parisiens", schématise Isabelle Balkany, vice-présidente du conseil général chargée des affaires scolaires.
Les ficelles pour éviter la sectorisation sont connues depuis longtemps, notamment par les catégories sociales plus favorisées : fausse domiciliation, demande de dérogations, changement de domicile, choix d’options rares, recours au privé, etc. Des stratégies qui s’adaptent en continu : "Tout ça évolue. Par exemple, j’ai le sentiment que les achats de garages pour obtenir une bonne adresse ont quasiment disparu. Avec l’explosion des prix de l’immobilier, c’est devenu beaucoup trop cher", note Didier Bernard, père de trois enfants, président de la FCPE départementale. La tendance est aujourd’hui à la recherche de langues rares ou à l’inscription dans les sections européennes.

Dans la fixation de la hiérarchie scolaire, la crainte des violences reste un facteur essentiel. Le collège Malraux, malgré le travail accompli par ses enseignants, reconnu au plus haut niveau ministériel, pâtit toujours de l’image d’établissement dangereux dû à des incidents, il y a six ans.

Sylvain Canet, directeur de l’école du Forum dans le quartier populaire du pont de Sèvres à Boulogne, décrit les mêmes effets de réputation : "Tous les ans, en janvier, au moment des inscriptions, on doit convaincre les parents de ne pas fuir l’école et le collège du secteur. Tout ça parce qu’il reste une vieille image du quartier "coupe-gorge" avec des gens qui vous disent : "Ouh la la, vous travaillez à Pont-de-Sèvres !"."
Les parents se révèlent extrêmement sensibles aux questions de violences. Parfois de manière irrationnelle. "Le soir, après le goûter, des parents viennent me voir en me disant que leur enfant subit du racket. Je me renseigne et en général c’est un autre gamin qui a volé le choco BN du copain. Mais les craintes sur les violences sont telles que c’est perçu comme de la violence scolaire", poursuit Sylvain Canet.

Ce constat explique la frilosité des chefs d’établissement à communiquer sur les questions de violence, par crainte de toucher à l’image de marque de leur collège ou lycée.
Face à ce désir de fuite, les établissements disposent d’armes limitées. Des enseignants du collège le plus mal côté de Nanterre ont ainsi voulu mettre en place des projets (classe européenne, projet cinéma, etc.) pour attirer les élèves extérieurs et conserver ceux relevant du secteur. "Le problème, c’est qu’on n’a pas de moyens. On a demandé des heures supplémentaires mais on nous a répondu qu’il n’y en avait plus, explique Gilbert Lazaroo. Les projets sont donc restés dans les cartons. L’équipe ressent une grande colère. On a perdu confiance dans l’institution scolaire."

De fait, l’éducation nationale est complice de ces processus, comme le démontre l’enquête réalisée par le sociologue Marco Oberti sur les Hauts-de-Seine. Alors que la République prétend offrir le même service dans tous ses établissements, la réalité est nettement moins glorieuse. "L’offre scolaire la plus riche et la plus diversifiée se concentre dans les collèges et lycées situés dans les communes à forte présence de catégories supérieures telles Neuilly, Sceaux, Rueil-Malmaison, Boulogne-Billancourt, Saint-Cloud", écrit Marco Oberti dans L’école dans la ville, qui doit paraître le 7 juin aux Presses de SciencesPo.

Dans le nord du département, plus populaire, l’éducation nationale n’a pratiquement pas mis en place d’options rares. Au sud, beaucoup plus favorisé, les lycées croulent sous les langues rares ou les sections prestigieuses (musique, sections européennes, etc.).

Même si les instances locales tentent de rééquilibrer l’offre, l’ouverture officielle du marché, avec la suppression de la sectorisation, risque ainsi de s’effectuer dans un contexte de concurrence déloyale. "Une chose est sûre, l’angoisse parentale ne va pas se réduire", souffle Sophie Dannery, en pensant à ses quatre enfants. Déjà, des parents téléphonent aux associations de parents d’élèves pour savoir quelle stratégie adopter en prévision de la disparition de la sectorisation.

Luc Bronner

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Extrait du « Monde » du 05.06.07 : M. Darcos demande aux collèges de "contribuer" à la mixité sociale

« Au plus tard en 2010, nous aurons vraiment donné la liberté de choix aux familles", a assuré Xavier Darcos (Le Monde du 1er juin). Le ministre de l’éducation nationale vient de décider, pour la rentrée prochaine et pour commencer à réaliser la promesse présidentielle de "suppression progressive" de la carte scolaire, de doubler le nombre de dérogations accordées aux familles. De 10 % en moyenne nationale, selon lui, elles pourraient atteindre 20 %.

Qui dit dérogation, dit évitement de certains établissements, donc perte possible d’effectifs d’élèves, et augmentation pour d’autres. Le ministre assure que dans les deux cas, la différence ne sera que de quelques dizaines d’élèves. Il écarte le risque d’une désorganisation. Les dotations horaires des établissements étant calculées en fonction du nombre d’élèves inscrits, il a voulu rassurer ceux qui subiraient une perte d’effectifs en leur garantissant le maintien de leurs moyens.

M. Darcos a également, en conformité avec toutes les déclarations de Nicolas Sarkozy lorsque celui-ci était candidat à la présidence, réaffirmé l’objectif de mixité sociale, et l’annonce qu’à terme chaque établissement scolaire sera tenu de "contribuer" à cette mixité. Comment ? La question, pour l’instant, reste entière. M. Darcos refuse d’employer le mot "horrible" de quota mais n’a encore donné aucune autre piste.

S’agirait-t-il de limiter la mixité à l’accueil dans des établissements bien réputés d’une frange de bons élèves méritants venus des quartiers difficiles ? La priorité aux boursiers (à titre social ou titulaires de bourses du mérite), également annoncée par le ministre, va dans ce sens, mais ne saurait ni résumer son ambition ni faire office de mixité sociale généralisée.

Offre d’options attractives

Le SNPDEN - syndicat de chefs d’établissement auquel M. Darcos a demandé de formuler des propositions - appelle "d’autres modes de régulation" dont pourrait faire partie, par exemple, l’offre systématique d’options attractives dans des établissements actuellement évités.
Redoutant les effets possibles d’une "dérégulation totale", ce syndicat propose "que la priorité soit accordée aux demandes d’affectation dans un établissement proche du domicile". Proposition paradoxale, puisque le principe de la carte scolaire, en cours d’abandon, est justement celui de l’inscription d’un élève dans un établissement en fonction de son lieu d’habitation. Mais si chacun s’inscrit où il veut, on ne pourrait exclure, selon ces chefs d’établissements, des cas d’élèves habitant à côté d’un collège et arrivant "trop tard" pour leur inscription.

Dramatisation ? L’hypothèse illustre, en tout cas, la complexité du dossier auquel M. Darcos est confronté.

Luc Cédelle

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Chronologie de la « Carte scolaire »

 1963
La carte scolaire est instituée par Christian Fouchet pour gérer l’implantation des collèges.

 1983
Alain Savary desserre la sectorisation dans cinq départements. Cette expérimentation sera étendue, jusqu’à toucher 74 départements en 1987.

 1993
François Bayrou freine ces assouplissements, mais une grande diversité de situations locales perdure.

 22 février 2006
Nicolas Sarkozy se prononce "pour la suppression à terme de la carte scolaire" et "le libre choix des familles".

 3 septembre 2006
Ségolène Royal propose de "desserrer la contrainte de la carte scolaire" et s’attire une salve de critiques à gauche.

 7 septembre 2006
Dominique de Villepin estime que supprimer la carte scolaire serait "se retrouver sans règles et sans repères" avec des problèmes "insolubles" et "sans doute des injustices".

 20 mai 2007
Le ministre de l’éducation nationale, Xavier Darcos, annonce que la carte scolaire sera assouplie dès septembre, en vue de sa suppression.

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