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Des ZEP sans bonifications indiciaires ? (Libération)

10 décembre 2004

Extrait de « Libération » du 10.12.04 : des ZEP sans bonifications indiciaires ?

La bonification des profs de ZEP n’est plus prioritaire : un nouveau classement des zones risque de spolier nombre d’entre eux.

Le 6 novembre, l’Education nationale a annoncé via le Bulletin officiel que les bonifications indiciaires automatiquement accordées aux enseignants des zones d’éducation prioritaire (ZEP) seront supprimées. Ces bonifications permettent de booster la carrière et font partie des signes de reconnaissance adressés aux personnels des établissements difficiles : outre une petite indemnité et quelques moyens supplémentaires, ces derniers ont plus de facilité à obtenir le poste de leur choix après être passés par les ZEP.

Dans la foulée, le ministère a décidé de créer un nouveau système. Désormais, certains établissements seront classés « APV », soit « affectations prioritaires à caractère volontaire ». Ce label APV est attribué de droit aux établissements classés « sensibles » ou bénéficiant d’un autre dispositif incitatif et dérogatoire : les « Pep 4 ».

Quid des autres ZEP ? La décision est laissée à l’appréciation de chaque académie. Créteil et Versailles ont ainsi choisi de transformer toutes leurs ZEP en APV, mais Paris a décidé de ne retenir que 11 collèges sur la trentaine classés ZEP. A Bordeaux, il n’y en aura qu’un, à Grenoble ou à Rennes, aucun. Les enseignants qui resteraient l’an prochain dans ces collèges ZEP mais non APV perdraient le bénéfice des bonifications accumulées depuis leur arrivée en ZEP. Seule porte de sortie offerte pour en profiter : demander sa mutation pour l’an prochain avant ce soir si on veut changer d’académie (au printemps si on veut bouger, mais dans la même académie).

Rupture

Pour l’heure, quelques dizaines d’enseignants, seulement, se sont élevés contre cette mesure, notamment ceux des collèges parisiens Michelet, Dolto, Fontaine-au-Roi, Mozart, Marx-Dormoy, Berlioz... Réunis hier en assemblée générale, ils dénonçaient une « rupture du contrat de travail ». Tous se sentent pris au piège, pour diverses raisons. Lionel, professeur d’éducation physique et sportive : « Je suis originaire d’Agen. C’est là-bas que j’aimerais faire ma vie, fonder une famille. En venant à Paris, en ZEP, je sais que je m’expose à des conditions de travail plus dures qu’ailleurs. Mais aussi que je pourrai rentrer chez moi plus vite. Là, je suis coincé. » Marlène, professeur de lettres, treize ans de ZEP : « Avec leur système, je dois partir maintenant ou attendre cinq ans de plus. Ce n’est pas tenable : j’ai vu les conditions de travail se dégrader, la mixité sociale disparaître. C’est crevant, usant, on côtoie la misère, des gamins en loque. Je peux envisager de tenir un ou deux ans de plus, mais cinq, je n’en sais rien. Pour ne pas être coincée, je suis obligée de partir. » Résumé par une enseignante du collège Mozart : « On en chie toute l’année. Alors les bonifications, on y est attachés. »

Fatigue

Le combat n’est pas gagné. Lors de l’assemblée générale d’hier, les enseignants faisaient état de la difficulté à mobiliser ­ leurs collègues sont « fatigués », « ne croient plus à la grève »... Et peinent à trouver un terrain d’entente avec les syndicats, notamment avec le SNES-FSU, opposé au principe même des APV. Les enseignants parisiens auront pourtant fort à faire dans les semaines à venir : comme partout ailleurs, les restrictions budgétaires vont conduire à de douloureux redéploiements.

Emmanuel Davidenkoff.

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