Carte scolaire et réussite en EP : l’opinion d’un prof de ZEP

22 mai 2007

Extrait de « Rue89 », le 21.05.07 : Assouplissement de la carte scolaire : tous en ZEP !

Xavier Darcos a annoncé un premier chantier nous concernant tous : assouplir la carte scolaire.

Si les parents d’élèves peuvent choisir l’établissement où envoyer leurs enfants, ne risque-t-on pas la désertion de ces établissements dont les difficultés sans cesse soulignées font peur ? Que faire pour garder dans nos collèges ZEP un public varié s’épanouissant dans une mixité sociale intelligente ?

Ces deux questions sont obsédantes pour quiconque aime travailler dans ces établissements.

Outre l’option chinois, choisie actuellement pour détourner la carte scolaire et inscrire les enfants dans une autre école que celle de leur secteur, voici quelques pistes de réflexion, s’appuyant sur le terrain actuel, pour une autre vision de la ZEP.

D’abord, en ZEP comme ailleurs, rappelons que les cours se déroulent bien dans leur grande majorité. La différence est que le professeur de ZEP passe beaucoup de temps à amener différemment savoirs, compétences et savoir-faire, pour pouvoir apprendre en suscitant l’attention et l’adhésion des élèves. C’est donc une école où l’on apprend souvent de manière plus originale, plus gaie, plus libre et plus ouverte. Une école où l’adolescent écouté doit prendre confiance en lui et gagne peu à peu sa place de citoyen, dans un réel respect des autres et de leurs différences.

L’autorité en ZEP, c’est pour tous le respect profond d’un travail, pas le vain résultat d’un dressage.
Ce travail est difficile. Il ne fonctionne que si tout est centré sur sa réalisation. Si les enseignants et les Conseillers principaux d’éducation (CPE) ne sont pas formés à ce travail, s’ils ne sont pas incités à le choisir, si les chefs d’établissement n’y viennent pas avec une vision et une ambition claires qui leur feront réclamer les moyens nécessaires pour rendre leurs professeurs et leurs élèves heureux d’y travailler, cette formidable promesse d’éducation au monde de demain est (comme trop souvent) mise en péril.

La ZEP une école de la réussite ?

Oui, si l’Etat tient compte de ces exigences et si l’on se fie au mouvement actuel des projets émanant des collèges ZEP unis et combatifs. En effet, les offres d’ateliers pédagogiques sont croissantes : on y fait, dans le cadre de partenariats avec des institutions culturelles (centres dramatiques nationaux, espaces musicaux ou de danse, musées, laboratoires scientifiques, cinémas, etc.), des ateliers d’écriture, du théâtre, de la danse, de la musique, des sciences, des arts plastiques et visuels, de manière rigoureuse et ambitieuse, aux côtés des professionnels.

Paradoxe : ce mouvement s’étend, malgré la pénurie des moyens, car les professeurs engagés se battent (parfois seuls dans leur coin) pour dénicher ces moyens.
Reste à inciter les principaux de collège (souvent trop mous) à tracer ce cadre. Qu’ils osent inviter les professeurs et les familles à créer ces offres scientifiques et artistiques qui feront des élèves des citoyens modernes capables de travailler en équipe et de leurs écoles des lieux vivants de culture et de savoir.
Les professeurs motivés ont besoin d’un réel soutien pour offrir cette école nouvelle qui, faute d’attention, ne ferait que se dessiner, avant de retomber dans la sphère si triste d’un socle vidé et trop "commun" pour survivre.

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