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La Réunion :Crabek, un conte écrit par une enseignante et sa classe de CP en REP+

15 février 2007

Extraits de « Témoignages », le 14.02.07 : Valoriser l’enfant et son parlé créole pour apprendre le français

« Crabek », un conte écrit par une enseignante et sa classe de CP en ZEP

Crabek, c’est l’histoire d’un terrible crabe, qui vit dans la mer, au bord d’une île qui rappelle étrangement La Réunion. Un jour, Crabek le terrible décide de sortir de l’eau et de faire peur à tous les habitants de la ville Saint-Touin-Touin qui, jusque-là, vivaient paisiblement. Mais Crabek est-il si méchant ? Non. Comme tout le monde, il a un cœur. Ce sera sa découverte au bout de l’aventure. Ce conte est le résultat du travail de Marie-Claude Mallin et d’une classe de CP de l’école Les Girofles, classée en ZEP. De belles illustrations, une belle histoire écrite en français où le créole a eu toute sa place.

Comment avez-vous procédé avec les enfants, pour les aider à construire l’histoire de Crabek ?

L’histoire de Crabek s’est construite en 3 mois environ avec une classe de CP, en Zone d’Éducation Prioritaire (ZEP). En tant qu’enseignante, j’ai intégré les enfants dans l’histoire de leur île pour les amener vers l’apprentissage de la langue française. Nous avons sillonné la ville de Saint-Benoît, à la découverte des vestiges comme l’ancien chemin de fer, les vieux ponts. C’était une façon de motiver les élèves puis d’éveiller leur curiosité sur La Réunion lontan. Nous sommes allés faire des recherches dans les archives de la médiathèque pour répondre à leurs interrogations : comment vivaient les gens ? Comment était l’école ? Les murs de ma classe étaient tapissés de documents historiques. Ma classe est devenue un musée !

Nous avons aussi visité l’aquarium. Si je me souviens bien, c’est de cette façon qu’est né Crabek. Un gamin vraiment en difficulté scolaire, à la vue d’un crabe, m’avait dit : « Madame, le crabe lé gaillard ça. I morde lo pié après i cour dan la mèr ». Il nous fallait un animal méchant pour le conte. Les enfants n’ont pas manqué d’imagination pour trouver un nom à ce petit crabe. Craboulouk, Cribik... c’était le plaisir de jouer avec les sons. Finalement, nous avons choisi Crabek. Un nom court, qui sonnait bien, idéal pour le terrible crabe.

La création de l’histoire de Crabek s’est appuyée sur l’expression orale des enfants en créole. Il n’était pas question de parachuter le français dans une classe en difficulté. Je crois que les enfants doivent d’abord bien posséder la langue créole pour apprendre le français. C’est aussi une façon de les installer dans leur fierté d’être créoles. On ne peut pas évacuer comme ça leur langue maternelle, tout en gardant à l’esprit que l’objectif est d’apprendre à bien parler français. Alors, chaque jour, les enfants s’exprimaient en créole pour inventer l’histoire de Crabek. Je leur expliquais que c’était génial ce qu’ils me disaient en créole et je les aidais à traduire en français. Tenir compte de l’expression des enfants en créole, valoriser sa langue, sa culture créole, l’aider à mieux la connaître, c’est pour moi la condition pour qu’ils trouvent la liberté et la joie dans la culture française. Comme on le dit, un arbre fréquemment transporté ne peut pas prendre racine.

Quelles compétences et connaissances les enfants ont pu développer ?

En CP, les enfants apprennent à lire. Nous devons mettre l’accent sur la manipulation de la langue française. Mais à La Réunion, je pense qu’il faut manipuler la langue aussi bien à l’oral qu’à l’écrit, pour permettre aux enfants de bien distinguer le créole et le français. Avec ma classe de CP, les enfants s’exprimaient sans complexe en créole, puis, ensemble, nous nous demandions comment dire la même chose en français. Ils écrivaient parfois les phrases pour bien s’imprégner. Ce qui les motivait aussi pour entrer dans l’écriture.

Les marmailles ont appris de nouveaux mots, parfois savants. Crabek a amené les enfants à s’intéresser au monde marin. Je lisais les dictionnaires avec eux. Un mot difficile leur plaisait beaucoup : le nauplius. Nous l’avons d’ailleurs intégré au conte. Ce mot est devenu un mot familier pour eux, au point qu’ils l’utilisaient dans la cour de l’école, pour remplacer les gros mots. « Espèce de nauplius ! ». Ils étaient fiers de connaître ce mot, et pas leurs petits camarades. C’était aussi un joli mot prononcer.

« C’est à l’école d’aider à distinguer le créole du français, pour ne pas fabriquer des illettrés »
Les enfants n’ont pas tous le même niveau. Comment, ceux qui sont en plus grande difficulté scolaire, se sont-ils impliqués dans le projet ?

Un élève qui est en difficulté n’est pas pour autant bête. Je trouve même qu’il est souvent plus pertinent que les autres dans ses interventions, avec une personnalité extraordinaire qui s’exprime quand l’enfant n’est pas mis en position de difficulté par l’école. A l’oral, en créole, il n’y a pas de problème avec cet enfant. Il a même plus d’idées. C’est à l’enseignant d’être à l’écoute, de le motiver et le valoriser. L’enfant en difficulté a souvent besoin de plus de temps pour apprendre. Malheureusement, l’école ne donne pas assez le temps à cet élève. Il faut parfois 2 ans pour apprendre à lire. A la fin de l’année de CP, les enfants qui ont participé au projet Crabek aimaient les livres et pouvaient apprendre à lire.

A l’intérieur du livre, vous avez gardé quelques mots créoles comme “pied d’bois”, “carry”. Pourquoi ?

J’ai voulu montrer aux enfants que c’était aussi joli quelques fois de dire les choses en créole et que l’on pouvait introduire le créole dans un livre, même s’il est difficile de tout écrire dans cette langue. J’ai essayé d’expliquer à mes élèves que l’avenir pour eux, c’est d’être trilingues. Le créole, le français et l’anglais, voilà la base pour les enfants. J’aimais bien les embêter en plaçant quelques fois des mots d’anglais à l’oral. La maîtrise de ces langues va dans le sens de l’ouverture au monde, et à notre région Océan Indien.
Les enfants ont dû se sentir très fiers d’avoir écrit un livre ? A 6 ans, ce n’est pas banal. Qu’est-ce que ça leur a apporté ?

Ils étaient heureux d’avoir un livre à eux, de le feuilleter, de voir leurs dessins dans ce livre. Avant la publication de ce livre par les éditions Azalées, j’avais fabriqué un livre de façon artisanale, à partir des peintures, de photocopies en couleur. Aujourd’hui, les enfants ont grandi, ils sont en classe de 6ème. Je leur apporterai des exemplaires de l’histoire de Crabek.
Et comment les parents ont réagi à votre façon de mener ce projet ?

Les parents étaient très contents. Chaque enfant était valorisé, intégré au projet. C’est autre chose que lorsqu’on vous appelle tous les soirs pour vous dire que votre enfant pose problème ! L’essentiel est de valoriser l’enfant. L’année suivante, j’avais organisé une comédie musicale, à partir des “Quatre saisons de Vivaldi”. Chaque élève était un prince ou une princesse pour représenter les saisons et devait dire son texte sur scène dans un français du 18ème siècle. Ces enfants de ZEP avaient tous appris leur rôle, et pour ça, ils avaient du apprendre à lire avant la fin du CP.

En tant qu’enseignante, je ne travaille jamais seule. J’ai l’habitude de recevoir les parents, de discuter avec eux. Je leur explique que je ne peux pas commencer directement avec le français alors que leur enfant parle le créole. J’invite aussi les parents à venir en classe, pour voir le travail avec les enfants.

On a tellement culpabilisé les parents qu’il ont fini par commettre l’erreur d’obliger leur enfant à parler français à la maison. Ce qui a donné un mélange des langues, puisque les parents ne maîtrisent souvent pas bien le français. C’est à l’école d’aider l’enfant à bien apprendre la distinction entre le créole et le français, pour ne pas fabriquer des illettrés. On ne dit pas “je sava” en français. L’objectif est de savoir lire et écrire en français à la fin de l’année scolaire.

Y a-t-il une “morale” à l’histoire de Crabek ?

Comme dans n’importe quel conte, Crabek se tourne vers le bien, ce qu’il y a de plus positif dans tout être. Crabek est un peu la transposition de la vilaine sorcière dans le conte. Crabek montre que l’on peut laisser parler son cœur, le cœur qui est rempli d’amour, et donc de respect et de l’attention à l’autre. Mais chaque lecteur peut interpréter le conte à sa façon.

Propos recueillis par Edith Poulbassia

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Extrait du site Orange «  La Réunion », le 15.02.07 : Les moyens académiques et les grandes orientations de la rentrée 2007

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La rénovation de l’éducation prioritaire, pour une égalité des chances mieux garantie

En ce qui concerne les réseaux ambition réussite (RAR), ils se sont mis en place dès la rentrée 2006 et sont au nombre de 19 dans notre académie.

A la rentrée 2007, c’est l’ensemble des réseaux à public prioritaire (anciens collèges en REP et en ZEP) qui devra se constituer en réseau de réussite scolaire (RRS), en s’inspirant de l’expérience des RAR.

Il s’agit d’apporter aux élèves des réponses pédagogiques et didactiques concrètes et appropriées en prenant en compte les difficultés sociales des familles. C’est donc le critère d’origine sociale qui est prépondérant dans le classement des collèges en RRS.

Ainsi sera proposée au prochain Comité technique paritaire (9 février 2007) une liste de 21 collèges qui constituerait le réseau de réussite scolaire dès la prochaine rentrée.

De manière générale, les collèges en RAR et RRS bénéficieront d’une dotation globale de moyens leur permettant une moyenne du nombre d’élèves par division de 24 et 26, respectivement. Pour les établissements qui ne font pas partie de l’éducation prioritaire, cette valeur est maintenue à 28 élèves par division.

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Extraits de « Clicanoo », le 15.02.07 : Priorité au développement de la Rivière du Mât Les Hauts

Claude Villeneuve, le sous-préfet de Saint-Benoît et Gilles Jeanson, 1er adjoint au maire de Bras-Panon, ont signé un Contrat urbain de cohésion sociale (CUCS). Financé à hauteur de 110 000 euros par an, il recense toutes les actions qui vont être menées à la Rivière-du-Mât-les-Hauts retenu comme quartier prioritaire.

Après Saint-Pierre, Bras-Panon est dans les premières communes de l’île à signer un Contrat urbain de cohésion sociale (CUCS). La cérémonie de signature s’est déroulée hier après-midi à la mairie de Bras-Panon lors d’une réunion de travail entre l’État (représenté par le sous-préfet de l’arrondissement de Saint-Benoît, Claude Villeneuve), la commune (représentée par son 1er adjoint, Gilles Jeanson) et tous les partenaires du Contrat de ville. Dans son allocution, le sous-préfet Claude Villeneuve, a salué l’enthousiasme de la municipalité bras-panonnaise pour ce contrat urbain de cohésion sociale. Il a appelé à l’union des forces entre l’État, les collectivités et leurs partenaires pour la réussite de ce CUCS. Ce contrat entre dans le cadre de la politique de la ville en faveur des quartiers en difficulté. Signé pour une période de trois ans, il est renouvelable pour la période 2007-2012.

Améliorer la vie quotidienne des habitants

À Bras-Panon, c’est le quartier de la Rivière-du-Mât qui a été choisi comme quartier prioritaire. Dans cet écart sensible, les autorités ont souvent affaire à de nombreux actes de délinquance, à des histoires de familles désœuvrées, avec en toile de fond, l’alcool et le zamal.

Le CUCS agit dans divers domaines : l’habitat et le cadre de vie, l’accès à l’emploi et le développement économique, la réussite éducative, la santé, la citoyenneté et la prévention de la délinquance.

Dans le cadre de ce Contrat urbain de cohésion sociale, l’État et la commune vont donc s’engager, à la Rivière du Mât à : réduire les écarts de développement entre les micro-quartiers, ce quartier et l’ensemble du territoire ; intégrer le mieux possible ce quartier dans le fonctionnement de la ville et l’agglomération ; améliorer la vie quotidienne des habitants ; favoriser l’égalité des chances entre tous les habitants du quartier et de la ville ; structurer les hauts. Deux thèmes ont particulièrement l’attention de l’État et de la commune de Bras-Panon pour l’année 2007 : la citoyenneté et la prévention de la délinquance d’une part et la santé d’autre part.

Ce contrat sera financé à hauteur de 110 000 euros par an pendant trois ans. Une évaluation sera faîte à l’issue de la première année.

D’autres quartiers de Bras-Panon pourraient, à terme, bénéficier des mesures du CUCS.

Juliane Ponin-Ballom

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