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Les ZEP (en 7 articles) dans le rapport du Sénat sur « Le nouveau pacte de solidarité pour les quartiers » (1)

8 février 2007

Extraits du site du Sénat, le 05.02.07 : La rapport sur le nouveau pacte de solidarité pour les quartiers

Le 11 novembre 2006, le « Quotidien des ZEP » indiquait que le site du Sénat avait mis en ligne les conclusions du rapport sur le « nouveau pacte de solidarité pour les quartiers » et en donnait des extraits

Aujourd’hui, sont publiés les deux tomes du rapport complet.

Nous en extrayons d’une part le compte rendu de la table ronde du 3 mai 2006 consacrée à l’éducation, d’autre part la partie du rapport final du M. Pierre André, consacrée à l’éducation prioritaire.

Ces extraits étant fort longs, le « Quotidien des ZEP » les publiera pendant plusieurs jours

Table ronde consacrée à l’éducation prioritaire

M. Alain BOISSINOT, recteur de l’académie de Versailles, M. Bernard SAINT-GIRONS, recteur de l’académie de Créteil, M. Pierre POLIVKA, délégué national à l’éducation prioritaire, M. Nicolas RENARD, président de l’Observatoire des zones prioritaires, Mme Anne-Marie HOUILLON, vice-présidente chargée de l’éducation, et M. Arnold BAC, responsable du secteur éducation à la Ligue de l’enseignement

M. Alex TÜRK, président.- Madame et messieurs, je vous remercie d’avoir accepté notre invitation à venir présenter vos positions et vos observations et à participer, avec les membres de notre commission, à un débat consacré aux problèmes de l’éducation dans le domaine de compétence qui est celui de notre mission commune relative aux perspectives d’avenir des politiques conduites envers les quartiers en difficulté.

Je vous propose d’entrer dans le vif du sujet et de procéder comme nous le faisons régulièrement depuis quelques mois dans le cadre de cette mission, c’est-à-dire de vous donner la parole successivement dans un ordre que je ne choisis pas et qui nous a été proposé pour la table ronde. Chacun pourra s’exprimer, si possible, en une dizaine de minutes, après quoi nous pourrons vous poser des questions et le débat pourra s’engager. Je passe la parole à M. Boissinot, recteur de l’académie de Versailles.

M. Alain BOISSINOT.- Je commencerai par quelques mots pour présenter l’académie puisque c’est un point important pour le sujet qui nous intéresse. L’académie de Versailles est la première académie de France, elle représente environ 10 % du système éducatif et elle compte 1 200 000 élèves, 600 établissements du second degré et 3 500 écoles.

La masse de l’académie est connue et reconnue, mais ce qui est peut-être encore plus important par rapport au sujet qui nous intéresse, c’est l’extraordinaire diversité et l’hétérogénéité de l’académie qui fait que, sur son territoire, coexistent à peu près tous les types de situation que l’on peut rencontrer au sein du système éducatif, depuis les grands lycées et les grands établissements classiques de prestige qui fonctionnent sur un modèle assez traditionnel, jusque tous les problèmes de banlieue et de zones difficiles que l’on connaît, ainsi que certains secteurs qui relèvent plutôt de la ruralité.

Nous avons donc à peu près toute la gamme des situations possibles et tout cela coexiste sur des périmètres géographiques souvent très étroits : par exemple, il n’y a pas un département qui, plus que les autres, porterait le poids de la difficulté sociale. A l’intérieur de chacun des quatre départements (Hauts-de-Seine, Val-d’Oise, Yvelines et Essonne), on trouve les différents types de sociologie scolaire que je viens d’évoquer, et souvent sur des secteurs géographiques très proches.
Le problème de la prise en compte de cette diversité et de la manière d’aborder la question des secteurs difficiles est donc particulièrement complexe dans l’académie de Versailles. Si on regarde, historiquement, la façon dont ce problème a été pris en compte, il est intéressant de noter qu’au début du lancement de la politique des zones d’éducation prioritaire (ZEP), au début des années 1980, l’académie de Versailles avait été très modeste dans la définition des secteurs relevant de l’éducation prioritaire et que cette attitude de relative modestie par rapport aux choix nationaux s’est complètement inversée au fil du temps.

En effet, le phénomène, bien connu au niveau national, d’accroissement progressif du nombre des secteurs classés en éducation prioritaire s’est vérifié dans l’académie de Versailles dans des proportions beaucoup plus importantes qu’ailleurs. C’est ainsi que, désormais, le poids de l’éducation prioritaire est particulièrement lourd dans notre académie : nous avons actuellement 20 % des écoles, 25 % des collèges et, ce qui est une particularité de l’académie et ce qui pose d’ailleurs un certain nombre de problèmes, presque 20 % des lycées classés dans le domaine de l’éducation prioritaire.

J’ai donc tendance à penser qu’à Versailles encore plus qu’ailleurs, nous nous sommes trouvés confrontés depuis quelque temps à ce constat, qui a été fait au niveau national, que l’extension de l’éducation prioritaire finissait par remettre en cause le principe même de l’éducation prioritaire et qu’inévitablement, nous assistions à une espèce de dilution de l’effort collectif au fur et à mesure que s’était accru le nombre d’établissements classés en éducation prioritaire.

C’est ainsi que, ces dernières années - c’est également un constat qui est largement partagé - on essayait d’entretenir les projets d’un certain nombre d’équipes, de les accompagner et d’entretenir les différents partenariats qui sont l’une des facettes importantes de l’éducation prioritaire, mais cela manquait inévitablement de lisibilité au niveau de l’académie et il était difficile de se remobiliser sur un projet clair.
J’ajoute que le problème n’était pas simplement quantitatif : là comme ailleurs, au fil du temps, des décalages qui s’étaient creusés faisaient qu’un certain nombre d’établissements présentant de réelles difficultés n’étaient pas forcément classés en éducation prioritaire alors que, a contrario, d’autres qui continuaient à l’être par la force des habitudes ne relevaient peut-être plus stricto sensu de cette logique.

Dans une académie comme celle dont j’ai la responsabilité, la clarification qui a été engagée depuis quelques mois était absolument indispensable pour tenter de redonner une véritable dynamique à l’éducation prioritaire. Nous sommes donc en train, comme ailleurs, de tenter d’aborder la réorganisation en partant de la définition des « réseaux ambition réussite » et en essayant ensuite d’identifier, parmi les autres, les secteurs qui continueront de relever de l’éducation prioritaire et ceux qui, éventuellement, pourraient en sortir.

Arrivé à ce niveau du constat, je rencontre immédiatement l’autre difficulté que posent tous ces problèmes qui sont, je le pense, dans vos réflexions : la territorialisation de l’éducation prioritaire et des limites, à Versailles peut-être encore plus qu’ailleurs vu la diversité que j’évoquais tout à l’heure, d’une réflexion qui fonctionnerait d’abord sur la tentation ou la tentative de définir des secteurs géographiques pour entrer dans la problématique que pose la prise en compte de la difficulté.

L’extrême hétérogénéité des situations fait que, me semble-t-il, on a intérêt - comme le permet la réforme actuellement en cours - à raisonner au moins en termes de prise en compte des établissements et non pas simplement de zones géographiques. Dans l’académie de Versailles, nous avons des exemples innombrables d’établissements qui ne sont pas classés en éducation prioritaire mais qui sont en très grande difficulté et qui obtiennent des résultats très décevants. A contrario, des établissements classés en éducation prioritaire ont opéré des redressements spectaculaires et obtiennent des bons résultats. L’un des lycées de mon académie qui obtient les meilleurs résultats au baccalauréat professionnel est un lycée de Corbeil qui est très difficile et qui connaît de grandes difficultés de recrutement, mais qui a opéré ces dernières années, sous la houlette de chefs d’établissement remarquables, un redressement tout à fait impressionnant.

Il me semble donc que nous avons besoin, au moins du point de vue de l’analyse des résultats scolaires, qui n’est évidemment qu’une composante du problème, d’avoir une réflexion fine, école par école et établissement par établissement, et de pouvoir moduler notre accompagnement des établissements de façon beaucoup plus fine que sur la base de la prise en compte un peu binaire de leur appartenance ou non à un territoire classé comme relevant de l’éducation prioritaire.

Je suis parfaitement conscient du fait qu’il s’agit là d’une logique qui vaut pour une analyse des performances scolaires. La référence au territoire garde probablement sa signification dans une logique plus péri-éducative qui veut que le territoire soit le lieu privilégié d’un certain nombre de partenariats avec les collectivités, par exemple. On rencontre ici la problématique de la réussite éducative, qui est complémentaire de celle de l’éducation prioritaire mais que, me semble-t-il, on a tout intérêt à ne pas confondre avec celle de l’éducation prioritaire.

Voilà les éléments d’analyse, résumés très sommairement pour essayer de dégager des lignes de force, sur lesquels on peut se fonder dans une académie comme celle de Versailles pour tenter de procéder à une relance de l’éducation prioritaire. Celle-ci s’organise actuellement autour des 21 « réseaux ambition réussite » qui ont été définis dans l’académie et qui représentent, dans ses quatre départements, ceux des établissements, collèges et écoles qui sont objectivement, au vu de critères parfaitement transparents, les plus en difficulté de l’académie. Bien évidemment, il faudra, pour procéder à une vraie relance de l’éducation prioritaire, aller au-delà de ces 21 « réseaux ambition réussite » et il y aura à définir un bon étiage de l’éducation prioritaire dans l’académie. Dans mon esprit, il devra être en deçà des quelque 25 % qu’elle représente actuellement pour les raisons que j’évoquais tout à l’heure. C’est un chantier évidemment délicat auquel, comme ailleurs, nous aurons à nous attaquer à partir de la rentrée scolaire prochaine. Le premier temps de la réflexion consiste à essayer de réussir la relance de la dynamique de l’éducation prioritaire sur la base des « réseaux ambition réussite ».

J’ai le sentiment que c’est probablement la dernière opportunité que nous ayons de relancer la logique de l’éducation prioritaire réaménagée dans l’esprit que je viens d’évoquer. Si nous ne réussissons pas cette relance et cette nouvelle approche de l’éducation prioritaire, il faudra faire le constat que la logique traditionnelle du début des années 1980 doit être repensée encore plus profondément. A ce moment-là, s’ouvrira le débat, qui est dans l’air du temps, sur la question de savoir comment il faut apprécier les difficultés rencontrées au sein du système scolaire, s’il faut les apprécier au niveau des territoires, des établissements ou des élèves pris individuellement. C’est un débat d’actualité qui n’est pas simple.

En tout cas, il me semble que la démarche actuellement engagée permet de dégager une voie qui, en s’organisant prioritairement autour des établissements, sans exclure, évidemment, les partenariats avec les différentes collectivités concernées, peut redonner un sens à l’effort de discrimination positive tel qu’il avait été imaginé au début des années 80 et tel qu’il s’est dilué au fil des années jusqu’à la période récente.

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