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Une note de lecture du « Monde » sur "La pauvreté en héritage : deux millions d’enfants pauvres en France", par Martin Hirsch

20 janvier 2007

Extraits du « Monde », le 20.01.07 : Les trappes de misère

Deux millions d’enfants pauvres en France. Le chiffre fit l’effet d’une bombe lorsqu’il fut porté à la connaissance du public, il y a trois ans, grâce à un rapport du Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion (CERC). Cette statistique résulte d’un mode de calcul propre à Eurostat, l’Office statistique des Communautés européennes, qui fixe le seuil de pauvreté à 60 % du revenu médian. L’Insee, pour sa part, retient un pourcentage plus faible (50 %) et aboutit à un nombre de mineurs pauvres deux fois moins important (environ 1 million pour 1999).

Mais quel que soit l’indicateur adopté, nul ne conteste l’ancrage de la pauvreté dans certaines franges de la population française. Que faire ? Fin 2004, alors qu’il venait d’être nommé ministre des solidarités dans le gouvernement Raffarin, Philippe Douste-Blazy proposa à Emmaüs d’organiser une manifestation au profit des enfants pauvres. L’idée était de leur offrir "un cadeau (...) à Noël", raconte le président de l’association, Martin Hirsch, dans le livre qu’il a rédigé avec Sylvaine Villeneuve. Rétif aux "opérations ponctuelles", l’auteur suggéra au ministre de s’y prendre différemment et de lancer une vaste réflexion sur les actions qu’il conviendrait d’engager "pour éradiquer la pauvreté des enfants". Banco, répondit M. Douste-Blazy. C’est ainsi que fut formée une commission, dirigée par le responsable d’Emmaüs France. Composée de syndicalistes, de chercheurs, d’élus, de représentants du monde associatif et du mouvement familial, elle rendit un rapport sur "la famille, la vulnérabilité et la pauvreté".

Ses recommandations sont reprises dans l’ouvrage de Martin Hirsch à travers une série de témoignages, de portraits et d’enseignements fournis par la littérature sur le social. Destiné à un large public, le livre veut démontrer que la lutte contre les exclusions "nécessite une volonté politique forte", assortie d’objectifs clairs et d’évaluations à intervalles réguliers. Le premier ministre britannique, Tony Blair, a procédé de la sorte en s’engageant à ce qu’il n’y ait plus d’enfants pauvres d’ici à 2020. "Cinq ans après le lancement de ce programme, le nombre d’enfants pauvres a effectivement diminué de près de 25 %", rapporte Martin Hirsch.

En France, l’Etat providence n’est ni inerte ni pingre, mais son efficacité est amoindrie par une multitude de carences ou de dysfonctionnements, décrits avec minutie dans l’ouvrage : cloisonnement des services sociaux, insuffisance des systèmes de garde d’enfant, dispositifs de formation professionnelle ultra-sélectifs... Ces constats étaient certes déjà connus. Mais les auteurs de La Pauvreté en héritage apportent une plus-value en exposant, à la fin de chaque chapitre, des solutions concrètes - quitte à chiffrer le coût de certaines d’entre elles.

Par-dessus tout, Martin Hirsch entend mettre fin aux situations où le bénéficiaire du RMI ou d’un autre minimum social n’augmente pas ses ressources lorsqu’il reprend un emploi. Certains sont même perdants s’il s’agit d’une activité professionnelle à temps partiel rémunérée sur la base du smic horaire. Ces manques à gagner dissuadent de retravailler et constituent de véritables "trappes à inactivité". Pour résoudre le problème, le responsable d’Emmaüs France propose d’instituer un "revenu de solidarité active" : versé par la collectivité, il garantirait à tout RMiste retournant au travail un accroissement de ses ressources.

Certains chercheurs et responsables syndicaux redoutent qu’un tel dispositif ne favorise le développement des petits boulots mal payés. Mais l’idée commence néanmoins à faire son chemin. Plusieurs conseils généraux, présidés par des élus de droite comme de gauche, sont en train de l’expérimenter et Ségolène Royal l’a récemment inscrite dans son programme de candidate à la magistrature suprême.

«  La pauvreté en héritage : deux millions d’enfants pauvres en France  » de Martin Hirsch avec Sylvaine Villeneuve, Robert Laffont, 222 p. 18 €

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